Systèmes - Droit constitutionnel britannique - 3e - 35

Introduction
vivement critiqué ce texte9
. Ainsi, quand bien même l'attachement
aux libertés serait culturel, il n'empêche malheureusement pas
leur éclipse dans la vie quotidienne des citoyens.
Il paraît donc bien difficile d'identifier au Royaume-Uni un « système
» de protection des droits et libertés des individus tel que nous
le concevons pour les autres États continentaux et les organisations
européennes ou internationales. Par son origine non étatique, sa
portée d'abord limitée, sa conditionnalité et sa dimension concrète,
la garantie des libertés outre-Manche doit être abordée avec une
grande prudence. Il faut enfin se garder des parallèles historiques
hasardeux entre la reconnaissance des libertés et les révolutions.
L'Angleterre puis la Grande-Bretagne n'ont connu qu'une véritable
révolution conçue comme un changement violent de régime juridique,
politique, économique et social : l'établissement du Commonwealth
par Cromwell à la suite de la décapitation de Charles Ier
en
1649 ayant amené la rédaction d'une Constitution. Cette révolution,
souvent présentée comme devançant de plus d'un siècle les soulèvements
de 1789 en France, n'a pas conduit à l'adoption de textes
relatifs aux libertés à portée universelle. Dans la même veine, l'expression
de « Glorieuse Révolution » pour désigner la crise de 1688
est partiellement trompeuse puisque le changement relativement
peu brutal pour l'époque, bien qu'il n'ait pas été un long fleuve tranquille,
est avant tout politique et juridique. Il n'a pas la violence économique
et sociale de 1789. De surcroît, si à cette occasion un Bill of
Rights a bien été rédigé, il est sur le fond comme sur la forme très
éloigné de ce que sera la Déclaration des droits de l'Homme et du
citoyen. Le contenu demeure circonstancié, limité à des catégories
de personnes et ne traitant pas exclusivement de droits et de libertés.
À l'instar de la Magna Carta de 1215, le Bill of Rights est présenté
à tort comme l'un des ancêtres des déclarations modernes des
droits humains ; ils n'en sont que les inspirateurs par une interprétation
extensive. Par conséquent, nous rejetterons l'usage du mot
« révolution » en dehors de l'avènement du Commonwealth de Cromwell
qui demeure la seule rupture temporaire et brutale dans l'ordre
institutionnel, politique et social. Il sera plus rigoureux d'évoquer les
guerres, les changements dynastiques ou territoriaux, les crises de
régime et leur prévention pour expliquer des transformations structurelles
en réalité toujours à l'œuvre. Les enjeux constitutionnels
contemporains auxquels doit faire face le Royaume-Uni s'inscrivent
dans cette logique de « mutation constitutionnelle permanente ».
9. First Report of Session 2022-23, HC 351 - HL Paper 16.
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