Hors-collection - L'enseignement du droit aujourd'hui - 24

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L'enseignement du droit aujourd'hui
à allure de récitation. Pour comprendre, connaître et appliquer intelligemment le
droit des télécommunications, de l'urbanisme, de la consommation, de l'espace
ou autre encore, il faut maîtriser les principes et notions de base qui traversent ces
matières : le droit civil, le droit pénal, le droit commercial, le droit administratif,
le droit constitutionnel et aujourd'hui le droit institutionnel européen.
L'enseignement du droit doit fondamentalement et prioritairement porter sur
ces droits principiels en leurs différentes facettes pour aborder ensuite et ensuite
seulement - fort d'une culture juridique de base et de la maîtrise des notions cardinales
du droit et du vocabulaire juridique - sa mise en œuvre et son application
sectorielle aux diverses activités sociales. De façon imagée, on pourrait dire que la
maîtrise des « droits à adjectif », ces adjectifs correspondant aux différentes facettes
d'un système juridique unique, précède et commande l'enseignement des « droits
à gérondif » caractérisés par la désignation de la matière à laquelle ils s'appliquent.
Cette façon de concevoir le droit et son enseignement, cette vision unitaire d'un
droit de principes et de notions de base, éprouvés par l'histoire et servis par un
vocabulaire précis, est celle du demi- millénaire qui nous précède. Le droit est conçu
est présenté comme un tout ; c'est ce qui fait sa cohérence, c'est ce qui assure son
intelligibilité et sa disponibilité internationale. Portalis l'exposait lumineusement :
« il nous est apparu utile de commencer nos travaux par un Livre préliminaire " Du
droit et des lois en général " » ; et encore « l'office de la loi est de fixer par de grandes
vues les maximes générales du droit ; d'établir des principes féconds en conséquence
et non de descendre dans le détail des questions qui peuvent naître sur chaque
matière » ; ce qui conduisait à voir avec Jean Carbonnier, dans le Code civil, la
constitution civile de la France ; et c'est bien ainsi que Cambacérès l'avait voulu.
Encore jusqu'aux dernières décades du siècle dernier, l'enseignement du droit
est largement conçu sur ce modèle. Les études de base, celles de la licence, donnent
à connaître les caractères du système juridique français, ses origines, les principes et
notions qui le gouvernent, ses grandes subdivisions et - ce qui est fondamental -
l'exacte maîtrise du vocabulaire qui le sert. Cet enseignement « généraliste » rend
le premier juriste utilement formé et disponible pour les différentes et multiples
façons de « faire du droit », mais également aussi pour des activités qui, si elles ne
sont pas à proprement parler des activités juridiques, s'enrichiront de cette culture
juridique de base, facteur de sécurité et d'intelligibilité. C'est dès le début des
études de droit qu'il faut dépasser le strict positivisme juridique pour mettre en
évidence les grandes questions et les grandes évolutions de notre système juridique5
.
5. Voir à cet égard le très bel et toujours actuel ouvrage de B. Oppetit, Droit et modernité, éd. PUF,
1998.
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