Hors-collection - L'enseignement du droit aujourd'hui - 308

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L'enseignement du droit aujourd'hui
Le Douaren tenait compte du premier fragment d'Ulpien selon lequel la science
juridique est la « vraie philosophie » (D. 1, 1, 1, 1). Cette idée sublime était chère
aux juristes, mais, selon lui, les bartolistes n'étaient pas en état de se l'approprier,
car en professant la lecture des commentaires, ils ne transmettaient que la connaissance
des litiges, et non celle de l'équité. C'est donc à eux qu'il fallait imputer
la responsabilité du penchant litigieux de l'époque. L'enseignement bartoliste,
confus et obscur, n'amenait en aucun cas les étudiants à méditer sur la justice
pour appliquer l'équité.
Le Douaren enrichit davantage la notion d'équité, en écrivant que l'enseignement
de ces professeurs n'amenait pas les étudiants à affronter, à l'avenir, l'infinité
des cas dans les tribunaux. Il était ridicule, écrivait- il, de les obliger à étudier
les commentaires et d'espérer qu'ils seraient capables d'en tirer des leçons utiles
pour chaque affaire52
. Les commentaires étaient en outre trop nombreux pour
. Dès lors, Le Douaren proposait de privilégier l'apprentissage des
principes généraux et fondamentaux tirés du droit romain :
De cette étude [du droit romain], il faut espérer seulement la connaissance de
certains préceptes et de théorèmes universels, grâce auxquels nous pouvons être préparés
et formés à juger selon l'équité de chaque affaire. En effet, les choses singulières,
puisqu'elles sont infinies, ne se rangent dans aucun art ou aucun précepte54
être retenus53
.
Comme les choses singulières, toutes les affaires judiciaires sont également
singulières et infinies55
. Selon Le Douaren, on ne peut donc jamais tout enseigner
à l'École. La charge du professeur consiste à transmettre aux étudiants les
connaissances générales applicables dans la pratique :
À vrai dire, afin que nous puissions accommoder plus sûrement et plus facilement
l'art de l'équité à chaque affaire, il faut recourir à l'usage, sans lequel tout fruit de la
discipline disparaît. Puisque, en revanche, l'usage sans méthode ni voie a très peu de
valeur, l'une exige ainsi le travail de l'autre et s'y lie harmonieusement56
.
52. Ibid., f. 91 : « Natura enim rei non patitur haec ullis literis, aut scriptis, comprehendi: tamen abest,
ut hominis memoria contineri possint. Quapropter eorum stultitiam admirari soleo, qui in uulgatissimis
interpretum commentarijs omnem aetatem terunt, ut inde singulorum negotiorum cognitionem hauriant ».
53. Ibid., f. 91-92 : « Nam ut quis memoriae mandet quaecunque a Bartolo, et caeteris scripta sunt, quod
fieri profecto nequit ».
54. Ibid., f. 92 : « Ex hoc igitur studio praeceptionum quarundam et theorematum uniuersalium, quibus ad
iudicandum ex bono et aequo de singulis negotiis praeparemur, et informemur, cognitio tantum speranda est ».
55. Ibid. : « Nam singularia, quia infinita sunt, sub nullam artem aut praeceptionem cadunt ».
56. Ibid. : « Verum ut certius atque expeditius boni et aequi artem ad negotia singula accommodare queamus,
adhibendus est usus, sine quo disciplinae fructus omnis perit: ut uice uersa usus absque methodo et uia minium
ualet: alterius sic altera poscit opem res et coniurat amice ».

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