Hors-collection - L'enseignement du droit aujourd'hui - 88

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L'enseignement du droit aujourd'hui
avenir, destinés à lui permettre de s'élever dans la hiérarchie des activités humaines
et sociales. Ce qui ne signifie donc pas que, dans son champ d'application, une
culture reste toujours dominante. Mais, par son lointain ancrage et son long
processus de perfectionnement, une culture, même diminuée, continue de caractériser
l'activité qu'elle a façonnée, presque sous forme d'un implicite partagé
par tous ceux qui l'exercent. Même en perte d'influence, une culture fait office
de matrice, de milieu nourricier où continuent d'être produits ces valeurs et ces
pratiques qui dessinent l'identité d'une activité.
Les activités intellectuelles de production ou de transmission des savoirs
donnent naturellement matière à la formation de cultures. C'est notamment le cas
dans les disciplines juridiques, qui dépendent alors « des débats et des controverses
qui les animent, de l'existence éventuelle de cycles doctrinaux et jurisprudentiels,
de leurs figures de proue - leurs «grands juristes» respectifs -, de leurs modes de
légitimation, des idéologies qui les sous- tendent, des institutions qui les façonnent,
des réseaux qui les animent, de la façon dont ces droits structurent la société ou
dont ils sont structurés par elle »119
culturelles récentes des professions juridiques120
. Notamment, dans le prolongement d'études
, ce que l'histoire des programmes
dans l'enseignement supérieur du droit en France nous donne à voir, c'est bien
la naissance d'une culture propre à cette activité particulière qu'est la formation
universitaire des étudiants en droit, sous- tendue par des finalités précises et portée
par des modalités spéciales. Parmi tous les facteurs explicatifs qui se conjuguent
toujours pour façonner la culture propre à un système ou à une institution, l'un
d'entre eux a joué, en l'espèce, un rôle prédominant : c'est l'existence d'une masse
de granit napoléonienne. Si une culture privatiste s'est imposée dans le mode de
formation universitaire des juristes, c'est avant tout en raison du poids d'une telle
masse.
Rappelons pour mémoire que cette formule fut employée par Napoléon
Bonaparte en 1802, lors des discussions préalables à l'adoption de la loi relative
à la Légion d'honneur, pour désigner les « grains de sable », précieux mais laissés
éparpillés par la disparition des lois anciennes et la confusion des idéaux révolutionnaires,
dont seule l'agglomération en « masses de granit » permettrait de donner
à la France une assise stable et durable, grâce précisément à de tels socles détachés
des contingences politiques et des excès idéologiques qui les ont vus naître, pour
former de solides fondations apolitiques et anhistoriques121
. Or le système français
119. C. Jamin, F. Melleray, Droit civil et droit administratif. Dialogue(s) sur un modèle doctrinal,
op. cit., p. VIII.
120. A.-S. Chambost (dir.), Approches culturelles des savoirs juridiques, op. cit.
121. Formule citée notamment par A.-C. Thibaudeau, Mémoires sur le Consulat, Paris, Beaudoin,
1827, p. 85.

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