Systèmes - La Convention européenne des droits de l'homme - 4e - 131

Article 8 - Droit au respect de la vie privée et familiale
doivent « offrir un cadre juridique permettant aux personnes de même sexe de
bénéficier d'une reconnaissance et d'une protection adéquate de leurs relations
de couple » (§ 178). Si la marge nationale d'appréciation est alors stricte dès qu'il
est question des « aspects particulièrement importants de l'identité personnelle
et sociale des personnes de même sexe » (§ 187), elle redevient « plus étendue »
quand il s'agit de « décider de la nature exacte du régime juridique à accorder aux
couples de même sexe » (§ 188). Bien que la Cour ne reconnaisse par le mariage
homosexuel sur le fondement de l'article 12 de la Convention (CEDH, 24 juin
2010, Schalk et Kopf c/ Autriche), on voit qu'elle n'en impose pas moins aux États
de protéger juridiquement les couples homosexuels sur la base de l'article 8, au
nom des valeurs de la société démocratique promue par la Convention, au premier
rang desquelles « le pluralisme, la tolérance et l'esprit d'ouverture » (voir aussi
CEDH, 23 mai 2023, Buhuceanu c/ Roumanie ; 12 décembre 2023, Przybyszewska
et a. c/ Pologne). On relèvera l'important dictum de l'affaire Macaté où la Cour pose,
en guise de principe « qu'il n'est jamais admissible au regard de la Convention
d'insulter, de dégrader ou de dévaloriser des personnes au motif de leur orientation
sexuelle, ni de promouvoir un type de famille aux dépends d'un autre » (CEDH,
Gde Ch., 23 juin 2023, Macaté c/ Lituanie, § 214, italiques ajoutés).
2. Les pratiques sexuelles
C'est l'arrêt K.A et a.D qui a fixé la politique jurisprudentielle de la Cour s'agissant
des pratiques sexuelles qui relèvent du champ d'application de l'article 8,
en l'occurrence des pratiques sadomasochistes (CEDH, 17 février 2005, K. A. et a.
D c/ Belgique). La problématique pourrait se résumer de la sorte : les individus
peuvent-ils, au nom de la liberté de disposer de leurs corps comme ils l'entendent,
s'adonner librement à des pratiques qui confinent à la barbarie ? La réponse de la
Cour est positive, la seule limite étant le consentement des personnes à l'accomplissement
de tels actes. Elle en profita à cet égard pour rationaliser sa présentation
des différentes facettes de ce qui relève de la « liberté personnelle ». Le
§ 83 de l'arrêt mérite ici d'être reproduit : « L'article 8 de la Convention protège le
droit à l'épanouissement personnel, que ce soit sous la forme du développement
personnel (Christine Goodwin c/ Royaume-Uni, 11 juillet 2002) ou sous l'aspect de
l'autonomie personnelle qui reflète un principe important qui sous-tend l'interprétation
des garanties de l'article 8 (Pretty c/ Royaume-Uni, 29 avril 2002). Ce droit
implique le droit d'établir et entretenir des rapports avec d'autres êtres humains
et le monde extérieur [...] en ce compris dans le domaine des relations sexuelles,
qui est l'un des plus intimes de la sphère privée et est à ce titre protégé par cette
disposition [...]. Le droit d'entretenir des relations sexuelles découle du droit de
disposer de son corps, partie intégrante de la notion d'autonomie personnelle. À
cet égard, « la faculté pour chacun de mener sa vie comme il l'entend peut également
inclure la possibilité de s'adonner à des activités perçues comme étant d'une
nature physiquement ou moralement dommageables ou dangereuses pour sa
personne. En d'autres termes, la notion d'autonomie personnelle peut s'entendre
au sens du droit d'opérer des choix concernant son propre corps (Pretty, précité,
§ 66) ».
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