Systèmes - La Convention européenne des droits de l'homme - 4e - 216

La Convention européenne des droits de l'homme
§ 3 le démontre à l'envi6
: ils sont tous sourcilleux d'attester clairement de la fin des
mesures dérogatoires car ils savent - depuis l'arrêt Brannigan et McBride - que
l'article 15 § 3 2e
phrase « commande un réexamen constant des mesures d'exception
» (CEDH, plénière, 23 mai 1993, Brannigan et McBride c/ Royaume-Uni, § 54).
L'examen de ces notes diplomatiques démontre une imposante hétérogénéité
des mesures adoptées, tant sous l'angle temporel que matériel. Certaines
mesures dérogatoires sont adoptées pour un laps de temps assez court (entre
quelques jours à quelques mois)7
et sont tantôt présentées de façon générale,
tantôt de façon particulièrement précise, les lettres de dérogation pouvant cibler
les droits précis auxquels l'État entend déroger, bien qu'il ne s'agisse pas d'une
obligation posée par l'article 15 (ainsi de l'Albanie qui ciblait - dans sa note verbale
du 4 mars 1997, plus précisément la libre circulation, les droits de réunion et de
manifestation, ainsi que le droit à la liberté d'information).
L'exemple français est également topique de cette approche. Avant de
présenter le contenu des deux lettres que la France a envoyé au titre de l'article 15
§ 3, il est nécessaire de présenter les divers mécanismes dérogatoires dont elle
dispose dans son droit interne. Plusieurs fois confrontée, dans son histoire, à
des situations « exceptionnelles », elle put y faire face grâce à divers régimes
juridiques, soit de nature constitutionnelle - ainsi de l'état de siège de l'article 36
de la Constitution et des pouvoirs exceptionnels de l'article 16 -, soit de nature
législative. Il en va ainsi de l'état d'urgence qui est réglementé par la loi n° 55-385
du 3 avril 1955, plusieurs fois modifiée. Tandis que l'état de siège « permet le
dessaisissement des autorités civiles au bénéfice des autorités militaires en cas
de péril imminent résultant d'une guerre étrangère ou d'une insurrection à main
armée » (T. S. Renoux, M. de Villiers, X. Magnon (dir.), Code constitutionnel, Paris,
LexisNexis, 2016, p. 711), l'état d'urgence quant à lui est un « régime civil » qui
octroie de très larges pouvoirs au préfet. Il est mis en œuvre par décret en Conseil
des ministres et, s'il perdure au-delà de 12 jours, doit être autorisé par l'adoption
d'une loi.
Le régime de l'état d'urgence a été créé dans le contexte de la guerre d'Algérie
et a été mis en œuvre à six reprises ; toutefois, ce n'est qu'à deux reprises que la
France a averti le Secrétaire général du Conseil de l'Europe de son déclenchement.
Elle n'était évidemment pas tenue de le faire avant 1974, date à laquelle
elle ratifiait la Convention européenne ; partant les « événements » des années
1960 ont échappé par définition au mécanisme dérogatoire de l'article 15. En
revanche, après 1974, la France se devait de le faire pour chaque proclamation de
l'état d'urgence. Or, le gouvernement de Dominique de Villepin qui fut confronté
aux émeutes urbaines de 2005 ne prit pas la peine d'avertir le Conseil de l'Europe.
Il en est allé différemment en 1985 - afin de canaliser le « risque de développement
d'une situation insurrectionnelle opposant deux parties de la population en
6. http://www.coe.int/fr/web/conventions/search-on-reservations-and-declarations/
7. Ad. ex., en 1997, l'Albanie dérogeait à la Convention pour cinq mois ; en 2008, l'Arménie faisait
de même pour dix-neuf jours ; en 2006, la Géorgie le faisait pour treize jours et, en 2007, pour
sept jours.http://www.coe.int/fr/web/conventions/search-on-reservations-and-declarations/
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http://www.coe.int/fr/web/conventions/search-on-reservations-and-declarations/

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