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Article 15 - Dérogation en cas d'état d'urgence
Nouvelle-Calédonie » (état d'urgence de six mois) et en 2015, suite aux « attentats
terroristes de grande ampleur qui ont eu lieu en région parisienne » (état
d'urgence de 3 mois). La lettre d'information envoyée au Secrétaire général du
7 février 1985 détaille avec précision, non seulement les étapes juridiques internes
de la proclamation de l'état d'urgence en Nouvelle-Calédonie, les motifs qui en
furent à l'origine, mais également les mesures adoptées par l'arrêté (n° 85-70)
du 27 janvier 1985 ayant pour objet de limiter ou d'interdire l'exercice de certains
droits (comme celui de manifester ou encore de circuler à certaines heures).
En revanche, la note verbale du 24 novembre 2015, si elle détaille également le
processus interne d'adoption de l'état d'urgence, en présente les motifs de façon
solennelle et synthétique et préfère renvoyer - via la technique des annexes -
aux décrets précis adoptés qui, eux, détaillent l'éventail des mesures « apparues
nécessaires pour empêcher la perpétration de nouveaux attentats terroristes ».
Quand les mesures dérogatoires sont adoptées pour un laps de temps assez
long ou quand elles sont régulièrement renouvelées, il appert qu'elles ciblent - en
principe - des droits précis qui vont être affectés par un état d'urgence qui s'est
en quelque sorte « banalisé », même s'il ne s'agit pas d'une obligation conventionnelle.
En général, ces droits concernent la sûreté (article 5) et les garanties
afférentes au procès (article 6). Les pratiques irlandaise, britannique et, dans une
certaine mesure, turque, sont topiques de ce phénomène et n'ont pas manqué
d'engendrer des contestations ultérieures devant la Cour européenne (v. IIe partie).
Le Royaume Uni déclenchait la procédure dérogatoire en 1955, tandis qu'il était
rapidement suivi par l'Irlande, en 1957, dans le contexte de lutte contre le terrorisme
de l'IRA8
: elle avertissait le SG du Conseil de l'Europe qu'une loi de 1940 sur
les atteintes à la sûreté de l'État (entrée en vigueur en 1957) allait lui permettre
d'instaurer des « pouvoirs d'arrestation et de détention spéciaux » ; la dérogation
dura près de quatre ans et demi (22 juillet 1957-9 mars 1962) et ne manqua
pas d'être ultérieurement contestée, en donnant lieu au célèbre arrêt Lawless.
L'Irlande récidivait en 1976 pour une période d'un an afin de lutter contre une
nouvelle vague de terrorisme ; dans ce contexte, elle accroissait considérablement
les délais de garde à vue (21 octobre 1976-16 octobre 1977).
Quant à la France, le déclenchement de l'état d'urgence en 2015 a fait l'objet de
prolongements réguliers, tantôt pour assurer la sécurité d'événements majeurs
(l'Euro 2016 ou encore le Tour de France cycliste), tantôt suite à la perpétration
de nouveaux attentats, comme celui de Nice en juillet 2016 (causant la mort de
8. Aux termes du traité portant création de l'État libre d'Irlande, signé le 6 décembre 1921 entre
le Royaume-Uni et l'État libre d'Irlande, six Comtés situés dans le nord de l'Île irlandaise ont
été maintenus sous la souveraineté britannique. Durant la période qui s'est écoulée depuis la
création de l'État libre d'Irlande, des groupes armés se sont constitués à plusieurs reprises
sous le nom d'« Armée républicaine irlandaise » (I.R.A), dans le but avoué de se livrer à des
activités terroristes afin de mettre un terme à la souveraineté que la Grande-Bretagne exerce
sur l'Irlande du Nord. Les activités de ces groupes ont parfois pris des proportions telles que
la législation ordinaire ne permettait plus d'en assurer une répression efficace. Le législateur
a donc, à plusieurs reprises, conféré au gouvernement des pouvoirs spéciaux permettant à
celui-ci de faire face à la situation créée par ces activités illégales ; au nombre de ces pouvoirs
a figuré parfois le droit de détention sans jugement.
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