Systèmes - La Convention européenne des droits de l'homme - 4e - 267

Article 2 du protocole n° 4 - Liberté de circulation
avait été conçue pour freiner l'exclusion ? Seul le juge Pinto de Albuquerque releva
cette occasion manquée - en reprenant à son actif l'approche développée par
les tiers intervenants, le Centre de recherche de Ghent et l'Equality Law Clinic
de l'Université Libre de Bruxelles. Non seulement il discuta la légitimité de la loi
néerlandaise - pointant du doigt le phénomène de gentrification qu'elle mettait
en place au moyen de « l'expulsion des populations les plus défavorisées » (pt 7
de son opinion), mais aussi et surtout déplora l'absence de prise de position sur
la discrimination à raison de la pauvreté comme sur le vaste phénomène des
discriminations inter-sectionnelles.
II.
Protéger
Les États doivent protéger leurs ressortissants non seulement en ne les
expulsant point de leur propre pays (article 3 § 1 du protocole n° 4), mais encore en
ne leur refusant pas le retour chez eux (3 § 2). L'article 3 § 2 n'emporte pas toutefois
la consécration d'un « droit à la nationalité », à l'inverse de ce que prévoient
les autres instruments internationaux (articles 15 DUDH et 20 CADH). Est-ce que
l'interprétation évolutive de la Convention amènera un jour la Cour de Strasbourg
à affirmer ce que sa consœur de San José fit dès 1984, à savoir que « la nationalité
est le fondement des droits politiques et qu'elle influence l'exercice des droits
civils » (CIDH, 19 janvier 1984, Avis, Modification des dispositions de la Constitution
du Costa Rica relatives à la naturalisation) ? Rien ne permet aujourd'hui d'en être
sûr. En revanche, ce qui est certain, c'est que l'arrêt H.F. et autres donne un sens
singulier à l'article 3 § 2P4, loin des questions de nationalité (CEDH, Gde Ch.,
14 septembre 2022, H.F. et autres c/ France).
Les requérants - parents de femmes parties combattre en Syrie et grandsparents
des enfants de ces femmes - ont tenté en vain d'obtenir de l'État français
leur rapatriement. La saisine des juridictions administratives et judiciaires est un
échec : elles se déclarent incompétentes, la demande de rapatriement n'étant
pas détachable de la conduite des relations internationales. La théorie de l'acte
de gouvernement exhumée, elle s'érige en une barrière procédurale dirimante
à l'échelle nationale. Devant la Cour européenne, les requérants estiment que
le refus de rapatriement de leurs filles et petits-enfants les expose à des traitements
inhumains et dégradants au titre de l'article 3 et viole leur droit d'entrée
dans leur pays au titre de l'article 3 § 2 du protocole n° 4. La question préalable
de l'affaire était celle de savoir si la « juridiction » de la Cour était établie au titre
de l'article 1 de la Convention (voir com. art. 1). La Cour écarte l'application de
la théorie du « contrôle effectif » comme celle de « l'autorité », mais l'établit au
regard de l'existence d'un « lien de rattachement » des requérants à l'État français
au moyen d'une disposition substantielle : non pas l'article 3, mais plutôt
l'article 3 § 2P4 (§§ 204-216). Cette disposition - peu mobilisée jusqu'à présent
dans la jurisprudence de la Cour (excepté pour le bannissement des membres
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