Systèmes - La Convention européenne des droits de l'homme - 4e - 47

Article 2 - Droit à la vie
- parce qu'il protège le droit à la vie, et non la vie in se, reconnaissait un droit de
choisir de vivre ou non. Le droit de mourir serait garanti en tant que corollaire
du droit à la vie et l'État aurait une obligation positive d'aménager le droit interne
afin de permettre aux individus d'exercer leur droit de mourir. La Cour a refusé
sans ambiguïté aucune de s'aligner sur une telle argumentation qui résulterait
manifestement d'une « distorsion de langage » (§ 39). Elle n'a pas imposé cependant
aux États le devoir de protéger la vie en toutes circonstances puisqu'elle a
octroyé aux États qui dépénalisent cette action, une marge d'appréciation bienvenue
(§ 41). Dix ans après l'affaire Pretty, c'est l'affaire Mortier (CEDH, 4 octobre
2022, Mortier c/ Belgique) qui donne l'occasion à la Cour de cerner les contours des
obligations pesant sur les États qui autorisent l'euthanasie. Elle prend en compte
trois éléments afin d'évaluer le respect par l'État de son obligation positive de
protéger la vie de l'intéressée : 1) l'existence d'un cadre législatif relatif aux actes
préalables à l'euthanasie conforme aux exigences de l'article 2 ; 2) le respect en
l'espèce de ce cadre ; 3) l'existence d'un contrôle a posteriori offrant toutes les
garanties requises par l'article 2. In casu, la violation de l'article 2 a été acté au
regard du 3e
critère : le mécanisme de contrôle manquait d'indépendance tandis
que la durée de l'enquête pénale était trop importante (§ 184).
3. L'arrêt de traitements qui « maintiennent artificiellement la vie »
L'affaire Vincent Lambert porta au grand jour un contentieux très douloureux
du point de vue humain (puisqu'il déchira une famille) et particulièrement
complexe du point de vue éthique et juridique (en ce qu'il questionna, notamment,
la place des experts dans le processus de décision judiciaire). La Cour européenne,
saisie par les parents de Vincent Lambert qui contestaient l'arrêt, décidé par
le Conseil d'État, de l'alimentation et de l'hydratation de leur fils, indiqua une
mesure provisoire au gouvernement français en juin 2014 ; or, ce n'est qu'un an
plus tard, qu'elle rendit son arrêt de Grande Chambre (CEDH, Gde Ch., 5 juin
2015, Vincent Lambert et autres c/ France), pour in fine se rallier à la solution de
la haute juridiction française. Une telle perte de temps fit dire à certains auteurs
qu'il faudrait créer une véritable procédure de référé devant la Cour européenne
appliquée aux questions de fin de vie (X. Dupré de Boulois).
Une fois la requête des parents de Vincent Lambert déclarée admissible sous
l'angle du seul article 2 de la Convention2
; une fois la question placée sur le terrain
des obligations positives et une fois le point de vue des tiers intervenants synthétisé,
la Cour européenne put entrer dans le vif du sujet. Elle ne cacha point son
fardeau judiciaire en rappelant dans un paragraphe récapitulatif - intitulé « considérations
finales » (§ 181) - à quel point elle était « consciente de l'importance des
problèmes soulevés par la présente affaire, qui touche à des questions médicales,
2. Ils considéraient que l'arrêt de l'alimentation (par sonde gastrique) et de l'hydratation
artificielles de leur fils serait contraire aux articles 2, 3 et 8 de la Convention. Il y aurait tout à
la fois une violation des obligations de l'État sous l'angle de l'article 2 ; un mauvais traitement
constitutif de torture sous l'angle de l'article 3 et une atteinte à l'intégrité physique au sens de
l'article 8. La question était de savoir s'ils pouvaient agir au nom et pour le compte de leur fils
incapable d'exprimer un quelconque avis sur la question.
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