Systèmes - La Convention européenne des droits de l'homme - 4e - 58

La Convention européenne des droits de l'homme
majeure aux politiques de réinsertion sociale. Et de considérer, dans l'arrêt de
2013, qu'une peine de réclusion à perpétuité incompressible va à l'encontre du
principe de réinsertion sociale qui constitue un des objectifs de la privation de
liberté (aux côtés de la rétribution, dissuasion et neutralisation) ; partant, dans
certaines circonstances (i.e. quand il n'y a pas de possibilité de réexamen de la
peine incompressible), elle entraîne la violation de l'article 3. Cette approche a été
confirmée à de nombreuses reprises (CEDH, 8 juillet 2014, Harakchiev et Tolumov
c/ Bulgarie, § 264), fondant un « droit à l'espoir » et considérant la réinsertion - à
savoir, la réintégration à venir dans la société - comme nécessaire dans toute
société qui a fait de la dignité humaine l'alpha et l'oméga de son fonctionnement
(CEDH, 7 mars 2017, Polyakova et a. c/ Russie, § 88). Cette intéressante politique
jurisprudentielle ne peut cacher, toutefois, le fait que les lieux clos de détention,
où l'autorité de l'État se manifeste de façon cardinale, restent encore trop souvent
des lieux de violences.
Les mauvais traitements peuvent résulter, non seulement d'une « volonté délibérée
» (ainsi de l'utilisation du gaz poivre pour vaincre la résistance d'un détenu
réfractaire aux ordres : CEDH, 14 février 2014, Tali c/ Estonie), mais être également
le résultat de déficiences dans l'organisation carcérale. Partant, sur la base des
critères posés par le Comité de Prévention contre la Torture (CPT), elle évalue de
façon globale les conditions de détention afin de vérifier si elles sont conformes
au respect de la dignité humaine. L'arrêt Kalashnikov (CEDH, 15 juillet 2002,
Kalashnikov c/ Russie) a été remarqué à cet égard comme marquant la détermination
de la Cour de ne plus accepter des conditions déplorables d'incarcération,
dont on sait qu'elles existent également dans les centres pour migrants (CEDH,
12 décembre 2013, Khuroshvili c/ Grèce ; CEDH, 30 juillet 2015, E.A. c/ Grèce).
Le tableau d'ensemble n'est guère reluisant ; les conditions de détention dans
les prisons en Europe révèlent l'insoutenable (surpopulation, exiguïté, insalubrité),
la lecture des arrêts ne laisse passer aucun détail sordide (CEDH, Gde. Ch.,
22 mai 2012, Idalov c/ Russie ; CEDH, 21 janvier 2011, Payet c/ France). Dans de
nombreux États parties, il s'agit, ni plus ni moins, d'un problème structurel. Si la
procédure de l'arrêt pilote permet logiquement de « révéler » l'existence de telles
déficiences (CEDH, 8 janvier 2013, Torregiani et autres c/ Italie ; CEDH, 25 novembre
2014, Vasilescu c/ Belgique), elle a surtout le mérite de contraindre les États à
légiférer afin d'améliorer de façon sensible les conditions de détention et d'établir
de nouvelles voies de recours afin de permettre aux détenus de se plaindre
efficacement de leurs conditions de détention (CEDH, déc., 16 septembre 2014,
Stella et autres c/ Italie). Même si la France, avec l'arrêt J.M.B. (CEDH, 30 janvier
2020, J.M.B c/ France) échappa officiellement à un « arrêt pilote », il n'en reste
pas moins que le constat de violation décerné à la France de façon très solennelle,
encouragea enfin les juges et le législateur à agir de concert pour tenter de
remédier aux déficiences structurelles existant au sein des prisons françaises.
La Cour de cassation (arrêt du 8 juill. 2020) créait une voie de recours auprès du
juge judiciaire permettant aux personnes placées en détention provisoire de faire
cesser leurs conditions indignes de détention, tandis qu'une décision du Conseil
constitutionnel (2 oct. 2020) prononçait l'abrogation au 1er
mars 2021 du second
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