Hors collection - Droit de la « guerre atypique » - 103

Le contexte du droit de la guerre atypique
97
ou personnes visées, par souci d'efficacité, il demeure que ces règlements, d'une
part, ne formulent pas des sanctions de manière indistincte et générale mais au
contraire de manière ciblée et justifiée a priori et, d'autre part, que des recours sont
ouverts contre ces décisions, par exemple dans le cas très médiatisé des sanctions
prononcées contre la mère du chef de Wagner, finalement annulées168
.
Les mesures adoptées par l'Union européenne seraient donc a priori licites au
regard des règles internationales, dès lors que la Cour internationale de justice et
l'Assemblée générale des Nations unies ont condamné l'agression de l'Ukraine et
ce bien qu'il n'existe pas de règle internationale conventionnelle en matière de
droit de la guerre atypique, si l'on admet cependant l'application des principes
coutumiers ici dégagés169
.
Si ces principes ont vocation à prospérer, l'étape suivante est alors, s'agissant
des cas de guerre atypique et des mesures juridiques adoptées pour les justifier ou
les mettre en œuvre, de savoir si ces principes ont bien été respectés et, à défaut,
d'identifier des conséquences potentielles de leur violation, dans le cadre de la
solution d'un litige international170
, dont le mode principal de résolution est
alors l'arbitrage international, pour tous les avantages que celui- ci procure sur les
juridictions étatiques, celles- ci intervenant ensuite à l'occasion du litige, devant
les juges du siège de la sentence, de la contestation de la validité de la sentence
arbitrale rendue171
.
L'étape ultime consisterait alors à considérer que tout ou partie des règles internationales
alors identifiées ont une autorité suffisante pour être considérées comme
intégrant le jus cogens. C'est déjà le cas des principales règles du droit des conflits
armés : l'emploi de la force dans des conditions contraires au droit de l'ONU et ses
conséquences (annexions notamment), les crimes contre l'humanité ou de guerre
168. V. TUE 8 mars 2023, T-212/22, Violetta Prigozhina c. Commission et ce, bien que la requérante
ait cherché par tous les moyens à nier les faits reprocher à son fils, le chef de Wagner, sans doute pour
faciliter un recours ensuite par ce dernier, CJUE 17 sept. 2020, C-732/18, Rosneft et a., CJUE, 19 déc.
2018, C-530/17, M. Y. Azarov. V. cependant TUE 21 déc. 2022, T-243/21, Viktor Pavolvych Pshonka.
169. Contra : Ch. Beaucillon, « Crise ukrainienne et mesures restrictives de l'Union européenne : quelle
contribution aux sanctions internationales à l'égard de la Russie ? » : JDI 2014, p. 787, sp. n° 9 : « Les
mesures restrictives renvoient en droit de l'Union européenne à un mécanisme d'adoption particulier
qui a été constitutionnalisé par le traité de Lisbonne, mais ne correspondent pas aux concepts de droit
international public pertinents en matière de réactions décentralisées à l'illicite ». V. aussi C. Schneider,
« L'Union européenne face à la Guerre en Ukraine », JCP G 2022, 694, pour une étude critique de
l'ensemble des outils juridiques européens mobilisés.
170. Pour un exemple, v. infra, n° 157.
171. V. cependant M. du Bouexic de Pinieux, Entreprises et dignité humaine, op. cit., qui considère
(p. 240 s.) que ce sont les juridictions pénales qui sont le principal moteur de cette reconnaissance. Elle
montre par exemple le chemin tracé par les procès contre les industriels allemands et japonais pour
violation des droits humains après la Seconde Guerre mondiale (p. 248 s.).

Hors collection - Droit de la « guerre atypique »

Table des matières de la publication Hors collection - Droit de la « guerre atypique »