Bibliothèque de droit privé - Tome 641 - Concentration et procès civil - 354

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CONCENTRATION ET PROCÈS CIVIL
procédure de son objet et des résultats auxquels elle devrait parvenir. Ces descriptions,
parfois caricaturales, accordent peu d'intérêt à son statut qui devient alors
assez mystérieux. Il faut donc le réaffirmer : l'avocat est un auxiliaire de justice dont
la mission consiste à conseiller et accompagner le justiciable ; il participe bien à la
bonne administration de la justice, mais en facilitant, comme intermédiaire, l'expression
du contenu des prétentions des parties au juge ; il est un partenaire privilégié du
juge dans sa mission de Justice mais il ne peut être pris pour prétexte d'un durcissement
des règles de procédure.
632. Implications. La conscience des ambiguïtés et des risques qu'induit la
concentration sur la fonction d'avocat devrait conduire à une utilisation plus prudente
de la concentration par le législateur ou la jurisprudence. Son essor ne favorise pas
l'accomplissement de la mission de l'avocat et peut compliquer la consécration des
droits du justiciable. Ces difficultés concrètes devraient conduire, sinon à contenir la
concentration dans son essor, du moins à l'apprécier avec plus souplesse. À cet égard,
la jurisprudence du professionnel avisé pourrait être ajustée. Plutôt que d'aboutir à
une opposition stricte entre une lecture souple lorsque la représentation n'est pas obligatoire
et une lecture rigide lorsqu'elle l'est, elle pourrait autoriser une appréciation
graduelle. Il est, par exemple, satisfaisant que cette jurisprudence permette d'interroger
la connaissance effective d'une ordonnance rendue par le juge chargé d'instruire
par une partie non représentée avant de déclarer irrecevable le déféré formé au-delà du
délai de quinze jours après son prononcé455. Toutefois, il serait intéressant que la présence
d'un professionnel avisé dans les mêmes circonstances ne fasse pas automatiquement
obstacle à une recherche d'une connaissance effective456. Le cas échéant,
elle devrait être appréciée plus sévèrement que pour une partie seule, l'avocat étant
effectivement un professionnel, mais elle pourrait au moins exister.
633. Conclusion de section. L'amplification du rôle des parties n'est pas anodine
dans le procès ; elle ne produit pas seulement une recrudescence d'exigences
juridiques. En amplifiant le rôle des parties, la concentration induit de nombreuses
difficultés concrètes qui paraissent souvent sous-estimées et qui modifient la manière
de pratiquer le procès.
Cette amplification du rôle induit d'abord des difficultés personnelles pour les
parties. En l'absence de lien systématique entre la concentration et la représentation,
les parties peuvent y être confrontées sans être représentées. Lorsque c'est le cas,
comme pour la concentration stabilisatrice, les concentrations constituent des
contraintes excessives pour les parties. Il est dès lors proposé de conditionner systématiquement
la sanction d'une concentration à l'existence d'un mandat de représentation.
L'amplification
du rôle des parties emporte ensuite des effets considérables pour
l'avocat et pour sa pratique du procès. Elle le place dans une situation ambivalente à
l'égard de son client et accroît de manière substantielle les risques d'engager sa responsabilité
professionnelle. Concrètement, ces difficultés pratiques induisent une
adaptation de l'avocat qui, in fine, pèsera sur le justiciable, notamment quant au
coût de la représentation. C'est une conséquence sous-estimée et regrettable de l'essor
455. Cass. 2e civ., 25 mars 2021, nº 18-23299, P (cassation).
456. Dans un arrêt, la Cour de cassation a considéré que la CA « n'avait pas àprocéder à la recherche
invoquée » : Cass. 2e civ., 21 févr. 2019, nº 17-28285, P (rejet).

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