Bibliothèque constitutionnelle et de science politique - Tome 168 - La préférence locale en droit public français - 409

LE RÉGIME FONDÉ SUR UNE HABILITATION CONSTITUTIONNELLE POSITIVE
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de la préférence locale. Néanmoins, en refusant de reconnaître comme motif d'intérêt
général autonome la solidarité territoriale, la préférence locale reste limitée par l'intérêt
général retenu. Le motif d'illégalité externe paraît être plus déterminant. De prime
abord, il existerait un lien naturel entre la préférence locale, l'intérêt public local et le
pouvoir normatif local. Ce lien naturel fonde une conviction : il revient au pouvoir
normatif local d'édicter la règle de préférence locale. Au regard du caractère indivisible
de la République, ce postulat ne saurait être vérifié. En matière de préférence
locale, il revient au pouvoir normatif initial - le législateur - de mettre en cause la
règle de préférence locale. Le pouvoir normatif local ne dispose que d'une compétence
résiduelle dans l'édiction de la règle de faveur. Les mécanismes de la révision
constitutionnelle de 2003, tendant à rénover le pouvoir normatif local, restent limités
et trop strictement encadrés pour servir de fondement à l'édiction de la règle de préférence
locale. En d'autres termes, le régime négatif de reconnaissance du droit de la
préférence locale ne permet qu'une préférence locale « localisée ». Il revient au législateur
d'identifier un territoire qui sera le support de la mesure préférentielle.
1034. Dès lors que la règle objective de préférence locale est légitime et valide
au sein de l'ordre juridique français, il convient de lui conférer des effets. Cette
dimension subjective de la préférence locale a trait à son effectivité, sous peine de
réduire la règle objective à une simple formule incantatoire. Elle implique que les
bénéficiaires puissent faire valoir un droit subjectif à sa mise en œuvre par les autorités
compétentes. L'ordre juridique français permet la reconnaissance d'un droit de
différence, mais reste rétif à la reconnaissance d'un droit à la différence. La relativisation
de la dimension active du droit à la préférence locale résulte d'une logique
permissive. Celle-ci repose sur la conception française du principe d'égalité qui ne
va pas jusqu'à obliger, les autorités compétentes, à traiter différemment les individus
placés dans une situation différente. En d'autres termes, il s'agit de préserver le pouvoir
discrétionnaire des autorités compétentes en matière de préférence locale. Par
ailleurs, la relativisation de la dimension active du droit à la préférence locale découle
de l'instabilité spatiale, personnelle et temporelle de la règle objective de préférence
locale. En d'autres termes, les bénéficiaires ne peuvent faire valoir un droit stable et
prévisible à la préférence locale. En raison de ces lacunes, il convenait de s'intéresser
à sa dimension défensive. Pour la doctrine, le droit à la différence repose, in fine, sur
le droit à l'indifférence de traitement. En d'autres termes, les bénéficiaires ou les nonbénéficiaires
souhaitent jouir d'un droit au respect des droits. Cette dimension défensive
repose, d'abord, sur un droit au traitement légal, puis sur un droit au traitement
égal. Le droit au traitement légal se caractérise par un droit au juge qui contrôlera,
notamment, la légalité de la mesure. En matière de préférence locale, ce droit fondamental
revêt quelques spécificités eu égard aux supports normatifs de la règle de
faveur. Certains, tels que la soft law ou la super law, peuvent avoir pour objet ou
pour effet de neutraliser l'accès au juge. De même, le risque de représailles n'étant
pas écarté, il importe pour les gardiens de la légalité républicaine d'être attentifs aux
règles de préférence locale, afin de les déférer au juge, lorsqu'il existe un doute quant
à leur légalité. Le droit au traitement égal se caractérise, pour les non-bénéficiaires,
spécifiquement, par un droit à la non-discrimination. Si un arsenal juridique existe, il
paraît, en matière de préférence locale, sous-exploité. Le juge fait preuve d'une forme
de prudence dans certains domaines. En d'autres termes, même dans sa dimension
défensive, les bénéficiaires de la préférence locale ou les non-bénéficiaires peinent à
faire valoir leurs droits. Cette limite est d'autant plus dommageable que le modèle
universaliste postule un droit quasi-automatique au traitement légal et égal. Or, de

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