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PARTIE 2 - LA LIBERTÉ DU TRAVAIL
Depuis 1968, la « liberté individuelle du travail » est protégée contre le collectif et en
particulier les possibles errements des syndicats par l'article L. 2141-4 issu de la loi du
27 décembre 1968, votée par la très large majorité UDR issue des législatives du 30 juin 1968 :
« L'exercice du droit syndical est reconnu dans toutes les entreprises, dans le respect des
droits et libertés garantis par la Constitution de la République, en particulier de la liberté
individuelle du travail ». Ainsi en est- il de l'interdiction en France du closed- shop51
, classique
en droit américain.
Créé par la loi de 1864 en lieu et place du défunt délit de coalition, le délit d'entrave à la
liberté du travail a depuis été dissous dans la longue liste de l'article 431-1 : « Le fait d'entraver,
d'une manière concertée et à l'aide de menaces, l'exercice de la liberté d'expression,
du travail, d'association, de réunion ou de manifestation ou d'entraver le déroulement des
débats d'une assemblée parlementaire ou d'un organe délibérant d'une collectivité territoriale
est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende (...).
Le fait d'entraver, d'une manière concertée et à l'aide de coups, violences, voies de fait,
destructions ou dégradations au sens du présent code, l'exercice d'une des libertés
visées aux alinéas précédents est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros
d'amende ».
Mais cet article « n'a pas pour objet la protection du travail ou de l'activité de l'entreprise
elle- même »52
, mais celle des non- grévistes ayant la liberté de continuer à travailler53
.
N'éprouvant qu'un préjudice indirect résultant de l'inexécution de leurs obligations contractuelles,
l'employeur ne peut lui- même se porter partie civile en cas d'entrave à la liberté du
travail, les victimes directes étant exclusivement les non- grévistes empêchés de travailler54
.
Mais ces derniers peuvent aussi agir en responsabilité à l'encontre des grévistes fautifs
devant le conseil des prud'hommes55
, s'agissant « d'un différend né entre salariés à l'occasion
du travail (...), peu important que l'exécution du contrat de travail eût été suspendue
entre les salariés grévistes et leur employeur ».
L'atteinte à la liberté du travail de non- grévistes peut être cependant invoquée par l'employeur
devant le tribunal judiciaire pour démontrer le trouble manifestement illicite que
constitue l'occupation non paisible de l'entreprise et obtenir une ordonnance d'expulsion
des occupants. Au- delà de la liberté d'entreprendre ou de l'atteinte au droit de propriété,
c'est même l'argument le plus opérant.
Il en est ainsi pour obtenir une ordonnance sur requête, comme l'a autorisé le célèbre arrêt
Ferodo56
précisant « peu
importe que les éléments constitutifs du délit de l'article 414 du Code pénal fussent ou non
51. « Clauses conventionnelles de sécurité syndicale », i.e. l'interdiction d'embauche de salariés non syndiqués :
cf. loi du 27 avril 1956 visant le monopole de la CGT du livre dans les imprimeries de presse. Aujourd'hui, C. trav.,
art. L. 2134-2 : « Tout accord ou disposition tendant à obliger l'employeur à n'embaucher ou à ne conserver à son
service que les adhérents du syndicat propriétaire de la marque ou du label est nul ». V., pour le licenciement d'un
non- gréviste exclu du syndicat, exigé et obtenu par le Syndicat du livre CGT : CA Paris, 11 janv. 1965, Roger/Le Monde.
52. Cass. crim., 3 juin 2008, n° 07-80079 : « le simple trouble apporté à l'activité professionnelle n'entre pas dans
les prévisions de l'article 431-1 du Code pénal ». Cf. olszAk N., RDT 2008, p. 603.
53. Cass. crim., 23 avr. 2003, n° 02-84375 F- P+F.
54. Cass. crim., 27 nov. 1979, Bull. crim., n° 339.
55. Cass. soc., 3 mars 1983, n° 81-15453, Bull. civ. V, p. 90.
56. Cass. soc., 17 mai 1977, Dr. social 1978, 119, obs. sAvAtier J.
57. Cass. soc., 21 févr. 1978, Bull. civ. V, n° 127.
371
- « il était urgent de mettre fin à une voie de fait manifeste entravant la liberté
du travail des autres salariés » -, confirmé par l'arrêt France- Printemps57
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