CRFPA - Précis de culture juridique - CRFPA - Examen national Session 2024 - 8e - 72

PRÉCIS DE CULTURE JURIDIQUE
Cette évolution de la comparaison juridique confère à la représentation des droits étrangers
en « grands systèmes » un caractère désuet. Les insuffisances méthodologiques dont
souffre cette grille de lecture l'ont discréditée auprès de nombreux comparatistes. On ne
s'en aperçoit pas toujours en France, sans doute parce qu'à la classification mondiale des
droits est attaché le nom du célèbre comparatiste René David (1906-1990) dont l'héritage
est précieusement conservé2
. Mais les limites de la cartographie juridique n'en sont pas
moins réelles.
Cartographie du monde juridique - Les droits du monde entier sont classés dans des
ensembles qualifiés de « systèmes » (de préférence à « familles », peut- être pour ne pas
donner le sentiment que le rattachement est la conséquence d'une donnée naturelle). Le
terme étant employé dans un sens vague3
, il est tantôt remplacé par « droit » (exemple :
les droits de common law), tantôt par « tradition ». Chaque système regroupe les droits
de plusieurs États - éventuellement, mais c'est rare, celui d'un État fédéré (le Québec par
exemple) - en application d'un ou plusieurs critères. Fidèle à cette méthode, un groupe de
recherche de l'université d'Ottawa publie en ligne un atlas détaillé de chaque région du
globe4
. Une carte du monde y est jointe qui donne un bon aperçu de la répartition des droits
et qui mérite que l'on s'y reporte.
« Une carte n'est pas le territoire qu'elle représente » selon la formule célèbre d'Alfred
Korzybski. Pour notre propos, ce décalage entre la réalité et sa perception est une invitation à
porter un regard critique sur l'identification des systèmes de droits étrangers et plus encore
leur classification (§ 1), mais également à dépasser cette vision statique afin de dévoiler les
interactions à l'œuvre entre les droits ainsi représentés (§ 2).
§ 1. L'identification des systèmes de droits étrangers
Un système ne se résume pas à l'addition de plusieurs droits au sein d'un même ensemble.
Il faut encore qu'un élément caractéristique soit identifié qui en garantisse l'homogénéité.
À cet égard, la gamme des possibles est immense. Par exemple, cet élément unificateur
peut tenir à la structure des sources du droit, à la prédominance de l'une d'entre elles, aux
institutions publiques, au caractère codifié de certaines normes, à l'histoire, à la langue, au
caractère religieux du droit, à la mentalité des acteurs juridiques, au style juridique, à la place
qu'occupe le droit parmi les autres normes sociales ou à l'effectivité du droit. Ces éléments et
d'autres encore ont tous été utilisés soit de manière exclusive, soit de manière cumulative,
ce qui explique l'extrême diversité des classifications proposées. Cette diversité découle
également de l'ambition de leurs auteurs : il s'agit de cartographier le monde entier. En cela,
les classifications des systèmes de droits, dont on verra les principales (B), ne doivent pas
être confondues avec la présentation des deux traditions juridiques auxquelles l'Occident
a donné naissance : la tradition « civiliste » et celle de common law (A).
2. V. dAvid R., JAuffret- sPinosi C., goré M., Les grands systèmes de droit contemporains, 12e
éd., 2016, Dalloz.
3. Dans la littérature comparatiste, la notion de « système » a progressivement été assimilée à celle d'ordre juridique
interne, v. ZenAti- CAstAing f., « Repenser le système juridique », in Bonnet B., (dir.), Traité des rapports entre ordres
juridiques, LGDJ, 2016, p. 1549, spéc. p. 1555 et s.
4. V. le site internet dédié : http://www.juriglobe.ca.
72

http://www.juriglobe.ca

CRFPA - Précis de culture juridique - CRFPA - Examen national Session 2024 - 8e

Table des matières de la publication CRFPA - Précis de culture juridique - CRFPA - Examen national Session 2024 - 8e