Bibliothèque de droit privé - Tome 642 - La réparation du dommage moral dans l’arbitrage international - 48

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LA RÉPARATION DU DOMMAGE MORAL DANS L'ARBITRAGE INTERNATIONAL
responsabilité contractuelle, elle permet de mieux appréhender les débats sur l'étendue
de la réparation due en la matière.
30. Dommage moral etpossibilité de la réparation pécuniaire. - L'équivalence
qualitative peut ensuite être obtenue en attribuant à la victime un équivalent du point
de vue de la valeur patrimoniale des biens ou intérêts atteints (qu'il s'agisse d'une
perte éprouvée ou d'un gain manqué)109. La nature patrimoniale d'une chose (entendue
comme un droit, produit, service ou toute autre forme d'intérêt) signifie qu'elle
est susceptible de se voir attribuer un prix. Cette propriété est le gage de leur fongibilité
indirecte, l'argent étant, par définition, la commune mesure des choses d'ordre
patrimonial110.L'octroi d'un équivalent à la perte patrimoniale subie peut donc toujours
a minima avoir lieu sous forme monétaire.
La réparation pécuniaire a pour seul objet le préjudice patrimonial qu'elle a pour
fonction de compenser, la réparation étant possible du fait du postulat d'une identité
de nature entre toutes choses d'ordre patrimonial. La question des éventuels bénéfices
extrapatrimoniaux de la somme accordée, ou encore de la réparation d'intérêts extrapatrimoniaux
par une somme monétaire, n'est pas abordée dans cette représentation
de la réparation pécuniaire. La reconstitution du patrimoine de la victime doit avoir
lieu dans la mesure où le dommage patrimonial est réparable, nonobstant les effets
extrapatrimoniaux de cette réparation.
Cette indifférence au dommage extrapatrimonial présente donc deux versants :
dans son versant négatif, le dommage extrapatrimonial n'est pas pris en compte puisqu'il
n'est pas l'objet de la réparation pécuniaire, dans son versant positif, le bénéfice
extrapatrimonial accidentel n'est pas non plus pris en compte pour l'appréciation de la
conformité de la réparation au principe indemnitaire.
La question de l'intégration de ces effets immatériels de la réparation pécuniaire
dans un second temps, à savoir au stade de l'appréciation de demande de réparation
du dommage extrapatrimonial, devra être appréciée de façon autonome (voir infra
nº 488).
31. Réparation pécuniaire et équivalence quantitative. - En tout état de cause, à
supposer que la nature extrapatrimoniale du dommage moral soit indifférente à la
réparation pécuniaire, (autrement dit, si on abandonne l'exigence d'équivalence
109. En matière contractuelle, le postulat de l'équivalence objective des valeurs patrimoniales échangées
sous un contrat ne suffit pas à rendre compte de l'économie de l'échange. Si les parties fixent une
valeur d'échange dans leur contrat, chaque partie entend réaliser un bénéfice, ou sinon elle n'aurait aucun
intérêt à contracter. La valeur que chaque partie attribue subjectivement à l'exécution du contrat, qui peut
ne pas se limiter à une valeur pécuniaire, est profondément distincte du prix des choses convenues (« [L]e
capitalisme consiste à attribuer des valeurs équivalentes entre des biens et services, mais la magie de l'économique
libérale est justement que l'échange de ces valeurs équivalentes engendre un gain pour chacun des
participants à l'échange et potentiellement une richesse qui a vocation à profiter, d'une manière ou d'une
autre, à la société entière », in Ibid., spéc. p. 343). L'intégration du gain manqué dans la réparation pécuniaire
ne remet pas en cause ce constat. Lorsque l'exécution forcée est impossible, le rétablissement de
l'équilibre patrimonial tel que défini par le contrat ne suffira donc pas toujours à restaurer l'économie du
contrat.
110. A. DORVILLE, De l'intérêt moral dans les obligations, op. cit.,p. 2.

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