Bibliothèque de droit privé - Tome 646 - Les droits finalisés dans le contrat - 21

INTRODUCTION
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strictement30. Cette idée de fonction sociale, assignée à l'exercice d'une prérogative, se
trouve encore parfois exprimée en doctrine à travers la référence au concept de « bien
commun »31. Si quelques auteurs considèrent que toutes les prérogatives du sujet se
trouvent soumises à une telle exigence32,d'autres estiment en revanche que seules certaines
d'entre elles sont effectivement concernées par celle-ci33.
8. La détermination de la nature des droits fait régulièrement l'objet de travaux
doctrinaux34. En effet, le développement progressif des prérogatives juridiques commande
de renouveler les efforts de conceptualisation. À ce titre, il a notamment été
proposé d'opposer les « droits à esprit égoïste » aux « droits à esprit altruiste »35, les
« droits subjectifs » aux « pouvoirs »36, les « droits discrétionnaires » aux « droits
contrôlés »37, les « droits absolus » aux « droits relatifs »38, les « droits subjectifs »
aux « libertés civiles »39, etc. Couramment, de nouvelles classifications des droits subjectifs
privés font l'objet de propositions doctrinales40. Au fil du temps, certains types
de prérogatives apparaissent tandis que d'autres disparaissent ou voient leur domaine
se réduire41. La matière contractuelle n'échappe pas à un tel phénomène.
B. LA JUSTIFICATION, ENJEU MAJEUR DES RELATIONS
CONTRACTUELLES EN DROIT POSITIF
9. Contrat et unilatéralisme. - L'une des principales mutations affectant la
relation contractuelle ces dernières années réside dans le développement de
30. A. KARIMI, « Essai de systématisation sur l'application de la théorie de l'abus de droit en matière
contractuelle », art. préc., spéc. nº 12, p. 590 ; E. GAILLARD, Le pouvoir en droit privé, op. cit., nº 3, p. 10.
31. Par exemple, à propos du pouvoir de l'autorité publique, A. ROSS, « Sur les concepts état et organes
d'état en droit constitutionnel », in Introduction à l'empirisme juridique, trad. par É. Millard et
E. Matzner, Bruylant/LGDJ, 2004, p. 167 et s., spéc. nº 3, p. 172.
32. J. GHESTIN et H. BARBIER, Introduction générale, t. 2, Droit de la preuve, Abus de droit,fraude et
apparence, op. cit., nº 651, p. 499 : « Les droits subjectifs comptent parmi les moyens tendant à atteindre le
bien commun ; leur exercice cesse d'être justifié lorsqu'il a lieu à l'encontre de ce but ». V. déjà en ce sens,
G.MICHAÉLIDÈS-NOUAROS,« L'évolution récente de la notion de droit subjectif», art. préc., spéc. p. 235.
33. Estimant que les prérogatives contractuelles se trouvent soumises au bien commun, P. LOKIEC,
Contrat et pouvoir, Essai sur les transformations du droit privé des rapports contractuels, op. cit., nº 261.
34. V. par ex. Le droit subjectifen question, APD 1964, t. IX, p. 97 et s.
35. J. DABIN, Le droit subjectif, Dalloz, 1952, rééd. de 2008, p. 217 et s. V. déjà, L. JOSSERAND, De
l'esprit des droits et de leur relativité, Théorie dite de l'abus des droits, op. cit., nº 305, p. 415. L'auteur
envisage une classification des droits subjectifs selon leur esprit en distinguant trois catégories : les droits
non causés ; les droits à esprit égoïste ; les droits à esprit altruiste. Comp. E. GAILLARD, Le pouvoir en droit
privé, op. cit., nº 32, p. 29.
36. E. GAILLARD, Le pouvoir en droit privé, op. cit., nº 21 et s., p. 22 et s. V. égal. P. ROUBIER, « Les
prérogatives juridiques », art. préc., p. 65 et s., spéc. p. 114.
37. A. ROUAST, « Les droits discrétionnaires et les droits contrôlés », art. préc., p. 1 et s.
38. Par exemple sur cette distinction, R. DEMOGUE, Les notions fondamentales du droit privé, 1911,
rééd., La Mémoire du Droit, 2001, p. 405-443. Estimant qu'il s'agit de l'« une des divisions les plus importantes
des droits », l'auteur relève notamment que « le droit absolu, c'est le droit à contenu fort ; le droit
relatif, le droit à contenu faible » (ibid., p. 405). Il est à noter que, selon les époques et les auteurs, la distinction
entre droits absolus et relatifs se rapproche tantôt de celle réalisée entre droits réels et droits personnels,
tantôt de celle entre droits discrétionnaires et droits contrôlés.
39. V. par ex. P. ROUBIER, « Les prérogatives juridiques », art. préc., spéc. p. 77.
40. F. HAGE-CHAHINE,« Essai d'une nouvelle classification des droits privés », RTD civ. 1982, p. 705 et s.
41. V. par ex. sur le constat du recul des droits discrétionnaires, A. ROUAST, « Les droits discrétionnaires
et les droits contrôlés », art. préc., spéc. nº 2, p. 2 ; D. ROETS, « Les droits discrétionnaires : une catégorie
juridique en voie de disparition ? », D. 1997, p. 92 et s. Contra,L. JOSSERAND, De l'esprit des droits et
de leur relativité, Théorie dite de l'abus des droits, op. cit., nº 307, p. 417.
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