Bibliothèque de droit privé - Tome 646 - Les droits finalisés dans le contrat - 284

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LES DROITS FINALISÉS DANS LE CONTRAT
caractère d'ordre public de protection180. Il en irait par conséquent de la sorte des règles
encadrant le congé délivré à l'initiative du bailleur, et plus particulièrement de celles qui
finalisent la prérogative de rupture qui lui est reconnue. La restriction des conditions d'exercice
de cette prérogative par les lois successives prises en matière de baux d'habitation se
destine à la protection des intérêts des locataires181. De la sorte, le rattachement de la réglementation
du bail d'habitation à l'ordre public de protection paraît difficilement contestable.
Il semble néanmoins, à la lecture d'un arrêt de la troisième chambre civile en date du 2juin
1999182, que l'ordre public de protection des règles régissant les baux d'habitation soit
également mâtiné d'ordre public de direction183. En effet, la Cour de cassation considère
que « les dispositions de l'article 25 de la loi du 23 décembre 1986, d'ordre public, ne sont
pas destinées à assurer la seule protection du preneur »184.Il enrésulte,selon l'un des
annotateurs de la décision, que l'ordre public dont il est ici question possède un caractère
« composite »185. La politique législative en matière de baux d'habitation serait donc simultanément
tournée vers la protection du preneur et la régulation du marché locatif.
308. Cette ambivalence des finalités de la protection légale se retrouve également
au sein d'autres droits spéciaux186. Il en va par exemple de la sorte du droit de la consommation
à propos duquel s'observe une « ambivalence de la matière, qui oscille entre droit
de protection et droit de régulation »187. Cette ambivalence du droit de la consommation
se retrouve également en jurisprudence puisque les juges attribuent aux règles qui en
découlent des finalités diverses188. «Vieille notion neuve »189,l'ordre public de
180. Par ex., CA Aix-en-Provence, 23 mai 2018, nº 16/07517. V. également sur l'impérativité du
droit au renouvellement, J. MONÉGER, « Le bail du local d'exploitation de l'entreprise entre les statuts
d'hier et les exigences de demain », art. préc., spéc. nº 59, p. 525.
181. En ce sens, à propos de la nullité pour fraude à la loi de congés préétablis et signés par les
locataires à la demande des bailleurs, Cass. 3e
civ., 12 oct. 1994, nº 92-14324.
182. Cass. 3e civ., 2juin 1999, nº 97-17373 : Bull. civ. III, nº 123 ; D. 2000, p. 733, note S. BEAUGENDRE.
183. Rappr. à propos des baux commerciaux, J. MONÉGER, « Le statut des baux commerciaux est-il
encore un ordre public de protection ? », art. préc., spéc. nº 2, p. 22 : « L'ordre public est là pour protéger ;
mais à cet effet, il vient dire, imposer, interdire non pas au " bénéfice " de tel cocontractant, mais dans l'intérêt
général, telle obligation ou contrat ». Comp., estimant que « l'ordre public du statut des baux commerciaux
[est] toujours de protection et non de direction », J.-P. BLATTER, « Bail dérogatoire : cinquante ans de
désaveu », in Liber Amicorum en l'honneur du Professeur Joël Monéger, op. cit., p. 419 et s., spéc. p. 432.
184. Cass. 3e
rapports locatifs par la loi nº 86-1290 du 23 décembre 1986 », art. préc., spéc. nº 10.
185. S. BEAUGENDRE,« L'ordre public dans les rapports locatifs », note sous Cass. 3e
civ., 2juin 1999, nº 97-17373, préc. V. égal. F. WAREMBOURG-AUQUE, « La réforme des
civ., 2juin 1999, D.
2000, p. 733 et s., spéc. nº 10. Rappr. J.MONÉGER, « Le bail du local d'exploitation de l'entreprise entre les statuts
d'hier et les exigences de demain », art. préc., spéc. nº 54, p. 524. Adde, de manière générale, M. HERVIEU,«Ordre
public économique de direction, ordre public de protection : L'avenir de la distinction », art. préc., spéc. p. 338 :
« [...] l'ordre public économique actuel prend tout particulièrement les traits d'un ordre public " métissé " ».
186. À propos des répercussions de cette pluralité de finalités sur la cohérence des régimes de protection
de la partie faible, J. ROCHFELD, «Du statut du droit contractuel " de protection de la partie faible " : les interférences
du droit des contrats, du droit du marché et des droits de l'homme », art. préc., spéc. nº 2, p. 837-838.
187. J. JULIEN, « La protection du professionnel par le droit de la consommation », art. préc., spéc.
nº 1, p. 554. Rappr. P. STOFFEL-MUNCK,« L'autonomie du droit contractuel de la consommation : d'une
logique civiliste à une logique de régulation », RTD com. 2012, p. 705, spéc. nº 22 et s.
188. V. J. ROCHFELD, « Du statut du droit contractuel " de protection de la partie faible " : les interférences
du droit des contrats, du droit du marché et des droits de l'homme », art. préc., spéc. nº 12, p. 851 :
« [...] le droit de la consommation est appliqué comme visant, en priorité, pour [la Cour de cassation], la
protection de la personne, au sein d'un ordre public de protection ; pour la Cour de Justice, le bon comportement
des professionnels et une police efficace du marché, au sein d'un ordre public de direction. Cette
distorsion des finalités n'est pas la seule envisageable ».
189. G. COUTURIER,« L'ordre public de protection, heurs et malheurs d'une vieille notion neuve », in
Études offertes à Jacques Flour, Répertoire du Notariat Defrénois, 1979, p. 95 et s. Adde,P. CATALA,« À
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