Bibliothèque d'histoire du droit et droit romain - Tome 41 - Le régime juridique des cultes non reconnus dans la France concordataire (1801-1905) - 101

LES CONDITIONS DE LA RECONNAISSANCE JURIDIQUE
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une représentation plus forte auprès de l'autorité politique, en même temps qu'il
garantissait un renouvellement de la vie doctrinale des calvinistes. Le règlement de
l'an X consacrait sa disparition par prétérition. Au-dessus des consistoires locaux, la
loi ne reconnaissait que l'existence de « synodes » (art. 15 OP) formés de cinq Églises
consistoriales (art. 16 OP). La seule mention de ces synodes régionaux « fantômes »,
selon l'expression de D. Robert, dont la réunion était conditionnée à une hypothétique
autorisation du gouvernement253, excluait la reconnaissance d'un synode supérieur.
La loi témoignait donc « de la plus grande méfiance à l'égard de toutes réunions de
représentants des Églises Réformées : chaque consistoire de 6000 âmes [était] isolé en
face de l'appareil de pouvoir »254. Il ne faut, en outre, pas perdre de vue que la disparition
du synode national, organe de centralisation normative, permettait la réalisation
de l'un des objectifs de la police religieuse consulaire : la surveillance de l'évolution
doctrinale des Cultes reconnus, dont la maîtrise n'aurait été mieux assurée que dans la
garantie de l'immutabilité. « Il n'existe aucune autorité centrale, écrit A. Encrevé, -
aucun synode - chargé de faire appliquer les articles de la Discipline [de 1559] que
l'on souhaite conserver. [...] on se contente d'adaptations locales. Chaque consistoire
décide, de façon fortuite (en général à l'occasion d'un conflit), que tel article de la
Discipline est à conserver et tel autre à oublier. Cette décision n'aqu'une valeur
locale, limitée à la juridiction de ce consistoire »255. Que l'entourage du Premier
Consul n'ait pas eu une conscience claire d'agir en ce sens en supprimant le synode
général, c'est probable ; mais que l'immutabilité doctrinale en ait été l'heureuse
conséquence ne pouvait que satisfaire les successeurs d'un Portalis pour qui « les gouvernements
[étaient] rassurés sur des dogmes, une fois connus, qui ne change[aient]
pas »256. Face à cet ancrage institutionnel de la paralysie doctrinale de l'Église réformée,
l'intérêt du gouvernement rejoignait par ailleurs celui de l'antisynodalisme des
pasteurs les plus connus et des notables bourgeois qui, perpétuant au XIXe
mutations théologiques accomplies au XVIIIe siècle, se rassasiaient d'un marasme
siècle les
doctrinal laissant place nette à une morale politico-religieuse dont ils étaient les
bénéficiaires257.
112. La disparition du synode national, couplée à la seule reconnaissance légale
des nouvelles Églises consistoriales aux mains d'une ploutocratie des plus imposés258,
ainsi rédigé : " Ces articles, qui sont contenus touchant la discipline, ne sont tellement arrêtés entre nous
que, si l'utilité de l'Église le requiert, ils ne puissent être changés ; mais il ne sera en la puissance d'un
particulier de ce faire, sans l'avis et consentement du synode général " .Il s'agit bien là d'une activité normatrice
centralisée, puisque c'est en dernière analyse un " organe central qui décide quelles normes seront
par elle posées " », op. cit., p. 45.
253. Art. 30 et 31 (OP). Il fallut attendre 1850 pour voir un premier synode se tenir avec régularité.
Ce fut dans la Drôme.
254. D. ROBERT, Les Églises Réformées en France (...), p. 73.
255. Protestants français au milieu du XIXe
siècle, p. 78. C'est d'ailleurs pour pallier cette absence,
qu'on assistera, sous la Restauration, à la naissance de sociétés religieuses spécialisées et des Conférences
pastorales qui, bien qu'imparfaitement représentatives de l'ensemble des courants du protestantisme
réformé de France, permettront au moins aux calvinistes de se réunir, sans pouvoir les résoudre en l'absence
d'organe central, pour discuter des problèmes de leur Église.
256. J. -É.-M. PORTALIS, Discours (...), p. 10.
257. « L'absence d'autorité supérieure, ainsi que l'absence de liens entre les divers consistoires, ne
gênaient nullement les pasteurs qui, en fonction depuis 1787, avaient subi l'influence du XVIIIe siècle et
prêchaient la morale plus que le dogme : morale [...] prosaïquement inspirée des vertus bourgeoises dont les
pasteurs développaient les thèmes fondamentaux entre deux panégyriques du système politique existant »,
D. ROBERT, op. cit., p. 98.
258. Art. 15, 16, 18, 23, 24 (OP).

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