Bibliothèque d'histoire du droit et droit romain - Tome 41 - Le régime juridique des cultes non reconnus dans la France concordataire (1801-1905) - 311

LE CONTRÔLE ÉTROIT DES FORMES D'EXISTENCE PUBLIQUES...
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fournir une réponse au contexte politique particulier de la monarchie de Juillet en privilégiant
opportunément une perpétuation la conception monisme du régime juridique
des Cultes issu de la matrice napoléonienne, quitte à proposer des solutions d'assouplissement.
D'autre part, nous l'avons dit, la doctrine néo-gallicane, qui est celle portée
sous Juillet par le tiers-parti et son porte-parole, Dupin aîné - manifeste sur la
question de l'application des articles 291 et s. aux formes de vie religieuse extraconcordataire
- est une composante majeure du libéralisme de Guizot et l'un des fondements
à l'opposition doctrinaire à la consécration d'un élargissement de la liberté
religieuse des Cultes non reconnus à ses aspects collectifs251.
415. Victor de Broglie, qui était lui aussi, par mariage, un familier du mouvement
revivaliste parisien, pouvait également craindre qu'on l'accusât d'apostasier.
Membre du gouvernement qui était à l'origine de la loi sur les associations du
10 avril 1834, il en défendit le principe - celui de l'interdiction générale du droit d'association
- devant la Chambre des députés252. Le 11 mai 1843, il devait revenir, à la
Chambre des pairs cette fois, sur dix années d'application de la loi sur les associations.
Les années 1842-1843 avaient été marquées par certaines « tracasseries »253 faites
à la liberté religieuse et à l'évangélisation protestante. Surtout, le procès des néoprotestants
de Senneville et de l'évangéliste Roussel, de novembre 1842 à avril 1843,
avait abouti à une nouvelle confirmation de la jurisprudence de la Cour suprême quant
au libre exercice des Cultes non reconnus254. Aussi les protestants, toutes tendances
confondues255, décidèrent-ils d'engager la lutte sur le terrain parlementaire. Celle-ci
débuta devant la Chambre des pairs, le 11 mai 1843, à l'occasion d'une pétition déposée
par le Consistoire de Niort demandant que « désormais, il suffise, pour l'établissement
d'un culte, d'en faire la déclaration au maire de la commune, afin qu'il puisse
exercer sa surveillance »256. Dans un discours qui n'est pas des plus conformes à
l'image de probe aristocrate qui était la sienne, Victor de Broglie, vice-président de
la Chambre, allait manipuler le vrai et le faux, se disculper en déchargeant le gouvernement
de 1834 tout en accablant certains membres de celui de 1843, et, enfin, jouer
le principe de la séparation des pouvoirs, non sans placer au premier plan des responsabilités
la jurisprudence de la Cour de cassation. L'association visée par l'article 291
devait-elle être confondue avec la réunion pour l'exercice du culte : « Comment faut-il
considérer les simples réunions privées, interrogeait-il, c'est ici toute la question, les
réunions dans lesquelles plusieurs personnes se rassemblent, le plus souvent, sans se
connaître, se séparent, le plus souvent sans s'être parlé, et n'ont rien de commun
ensemble, si ce n'est de prier Dieu, de chanter des cantiques, et d'entendre lire et
expliquer l'Évangile ? »257. Pour le cabinet de 1834, rappelait-il, les réunions pour
251. Voy. supra nº 9. Pour un approfondissement des liens entre « libéralisme notabiliaire » et régime
moniste des Cultes, nous renvoyons à notre étude F. ZARLENGA « Monisme ou dualisme du droit des
Cultes dans la France concordataire. Approche des équivoques des juristes libéraux (1801-1930) », à paraître
252.
AP, séance du 17 mars 1834, t.87, p. 526-529.
253. J. BAUBÉROT, L'évangélisation protestante non concordataire en France (...), p. 124.
254. Cf. supra.
255. Roussel et ses brebis étaient soutenus par des pasteurs de la Confession d'Augsbourg et de
l'Église Réformée à Paris comme en province, même si le caractère " séparatiste " des réunions de Senneville
fit dire à Athanase Coquerel, pasteur libéral fervent défenseur de l'Église nationale : « Nous n'éprouvons
qu'un très tiède intérêt pour les prétendus protestants de Senneville [...] [mais] se dit protestant, en
France, qui veut et qui le dit doit être cru sur parole [...] », cité par J. BAUBÉROT, op. cit., p. 125.
256. Séance du 11 mai 1843, MU, p. 1071.
257. BROGLIE, séance du 11 mai 1843, MU, p. 1076.

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