Bibliothèque d'histoire du droit et droit romain - Tome 41 - Le régime juridique des cultes non reconnus dans la France concordataire (1801-1905) - 456

456 LE RÉGIME JURIDIQUE DES CULTES NON RECONNUS DANS LA FRANCE CONCORDATAIRE
refus d'autorisation ; « influences cléricales » commentait le journal Le Temps en
février 1877196. Tout l'embarras de celui qui, jadis député libéral d'opposition sous
l'Empire, avait précisément critiqué la loi de 1868 en ce qu'elle exceptait les réunions
de controverses religieuses du principe général de liberté197, transparaissait dans la
motivation juridique utilisée par le désormais président du Conseil et ministre de l'Intérieur
de 1877, pour interdire les conférences religieuses du père Hyacinthe. Reprenant
le motif invoqué par son prédécesseur à la fonction, Émile de Marcère, dans sa
réponse du 27 novembre 1876198, Simon s'était en effet fondé sur le décret impérial
du 17 mars 1808 portant organisation de l'Université, selon lequel le droit conféré au
ministre d'autoriser les conférences ou cours publics portait « sur des matières scientifiques
ou littéraires, et non de controverses religieuses »199. Il répondait au père
Hyacinthe, qui avait de nouveau sollicité le droit de tenir des conférences publiques
sur des sujets se rattachant « à la doctrine et la morale chrétiennes »200 :
« Mon honorable prédécesseur, saisi par vous d'une demande semblable,
n'a pas cru devoir l'accueillir, etj'ai le regret de ne pouvoir revenir sur la décision
prise par M. de Marcère, les conférences dont il s'agit paraissant devoir
constituer un véritable enseignement religieux qu'il ne saurait m'appartenir de
permettre en dehors des conditions auxquelles un enseignement de cette nature
est soumis par la loi lorsqu'il s'exerce publiquement »201.
Grossière exhumation d'un texte de loi sans rapport avec la question soumise au
ministère de l'Intérieur, qui organisait en cent quarante-quatre articles la composition
des facultés, la collation des grades, les obligations contractées par les membres de
l'université, les fonctions du Grand-Maître, du Chancelier ou du Trésorier, le mode
de renouvellement des fonctionnaires et professeurs, l'éméritat et les retraites, les costumes,
etc.202, mais qui avait néanmoins le précieux avantage de permettre à Simon
de prétendre avoir les mains liées alors que le droit applicable, à savoir l'article 1er
de
la loi du 6juin 1868, abandonnait les réunions de controverses religieuses des Cultes
non reconnus à son autorisation discrétionnaire203 :
« Cependant, si, écartant les sujets de doctrine, indiquait au surplus Simon,
vous entendiez vous borner à traiter des sujets de morale, je ne ferais aucune
difficulté de vous y autoriser, convaincu que vous aurez à cœur d'éviter toute
polémique irritante »204.
196. Le Temps, 28 février 1877, p. 1.
197. « Il n'y a en effet que deux exceptions : seulement les deux choses que l'on excepte, je ne crains
pas de le dire, étaient les deux choses pour lesquelles le droit de réunion était demandé, et pour lesquelles il
était nécessaire », avait alors rétorqué SIMON au rapporteur de la commission législative dans la séance du
13 mars 1868, MU, p. 383.
198. Lettre du ministre de l'Intérieur au père Hyacinthe, 27 novembre 1876, cité in Le Temps, 2 mars
1877, p. 3.
199. Ibid.
200. Lettre du père Hyacinthe au président du Conseil et ministre de l'Intérieur, 18 décembre 1876,
op. cit.,p. 4.
201. Lettre du président du Conseil et ministre de l'Intérieur au père Hyacinthe, 19janvier 1877,
ibid.
202. Cf. Décret impérial portant organisation de l'Université du 17 mars 1808, Bull. 8, août 1808,
nº 185, p. 145-171.
203. Duv., t.68, 1868, p. 186-208.
204. Lettre du président du Conseil et ministre de l'Intérieur au père Hyacinthe, 19janvier 1877,
ibid.

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