Bibliothèque d'histoire du droit et droit romain - Tome 41 - Le régime juridique des cultes non reconnus dans la France concordataire (1801-1905) - 527

LES LIMITES DU MODÈLE RÉVOLUTIONNAIRE...
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d'association partielle susceptible de créer un pouvoir politique et un ordre juridique
alternatif, en d'autres termes, un État dans l'État :
« Je dirais, Messieurs, que la loi estparfaitement constitutionnelle ; car que
sont les associations ? Un nouveau corps constitué, un nouveau pouvoir dans
l'État [...]. La Constitution n'ayant pas admis les associations, il en résulte
naturellement et nécessairement qu'elles ne peuvent être autorisées que par le
gouvernement. Elles ne sont donc pas de droit naturel ; elles ne sont que la
conséquence de la tolérance que le gouvernement pourrait leur accorder, du
moment où elles n'ont pas été insérées dans la Constitution »105.
659. Il faut relever également l'intervention, dans la séance du 17 mars, du
ministre des Affaires Étrangères, le duc de Broglie. Celui-ci se fondait de manière
plus explicite sur l'idée de garantie constitutionnelle des libertés publiques. Si le
droit d'association était bien « une faculté naturelle que personne ne
[contestait] »106,ce n'était point l'ordre naturel mais l'ordre juridique qui venait
poser des limites à la volonté législative : « Messieurs, proclamait-il, vous êtes parfaitement
libres, vous êtes [...] constitutionnellement libres de maintenir l'autorisation
préalable en matière d'association [...] »107. Au même titre que « le droit de
locomotion »108,l'auteur de la constitution n'avait pas entendu mettre ce droit à
l'abri du pouvoir législatif. En lui refusant une consécration constitutionnelle, le
constituant avait entendu laisser au législateur ordinaire l'entière détermination du statut
de la liberté d'association : « [...] je dis que lorsque le droit public du pays n'a pas
interdit au législateur de régler l'exercice d'un droit par telle ou telle mesure restrictive,
le législateur est le maître de le faire ; je soutiens que cela est ainsi en France et
dans tous les pays »109. La constitutionnalisation apparaissait, par ailleurs, comme un
critère de hiérarchisation des droits et libertés publiques : « Je sais fort bien qu'il y a
des personnes qui en veulent à la Charte de n'avoir pas placé le droit d'association au
même rang que la liberté de publier sa pensée, au même rang que la liberté d'enseignement,
et qui désireraient qu'il en fût ainsi »110.C'est stérilement que l'opposition
tentera de contrecarrer le projet gouvernemental en insistant sur le caractère central,
105. 12 mars 1834, p. 398. Dans le même sens, BARTHE, 11 mars 1834, p. 375 ; DUMON, 14 mars
1834, p. 450-451 ; HERVÉ, 14 mars 1834, p. 456-459.
106. BROGLIE, 17 mars 1834, p. 527.
107. Ibid. Et plus loin : « Vous n'avez à cet égard aucun engagement pris ; vous n'êtes liés ni par la
Charte, ni par vos serments. Vous n'avez à consulter que votre propre raison et l'intérêt de l'État ; et il n'est
aucune autorité antérieure, aucune autorité supérieure à votre raison qui la domine et l'enchaîne sur ce
point », ibid.
108. « Je pourrais citer une foule de droits non moins précieux, non moins sacrés que le droit d'association,
et qui sont réglés comme celui-là l'a été jusqu'ici par voie préventive. Ainsi, le droit de locomotion,
qui tient essentiellement à la liberté individuelle, qui est un droit sacré, un droit inviolable, dans le sens
qu'on entend, est cependant un droit réglé par voie d'autorisation préalable dans la matière des passeports
», ibid.
109. Ibid.
110. Ibid. « Cette loi, que dispose-t-elle ? Je ne dirais pas qu'elle suspend, mais je dirais qu'elle restreint
la liberté d'association ; elle ne la suspend pas, car cette liberté n'existe pas. Elle déclare que cette
liberté d'association n'est pas une liberté de même nature que la liberté de la presse, par exemple, c'est-àdire,
une liberté inviolable. Or, personne n'a cherché à citer un article de la Charte qui fonde la liberté
d'association ; on ne pourrait trouver, même en torturant le sens des articles, ni la consécration ni la promesse
de la liberté d'association dans aucun », RÉMUSAT, 13 mars 1834, p. 428.

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