Bibliothèque d'histoire du droit et droit romain - Tome 41 - Le régime juridique des cultes non reconnus dans la France concordataire (1801-1905) - 93

LES CONDITIONS DE LA RECONNAISSANCE JURIDIQUE
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104. Une commission, composée de membres des diverses religions, fut chargée
de rédiger des normes précises. L'idée d'une réunion des Cultes fut sans doute rapidement
abandonnée, en tout cas en ce qui concerne les mennonites, puisque, par un
décret du 24janvier 1812, Napoléon nommait une commission spéciale, dite Commission
d'Amsterdam, chargée d'examiner les conditions d'une reconnaissance particulière
du culte anabaptiste dans les départements de la Hollande208. En application
des principes posés pour la réorganisation des Cultes en France en 1801-1802, le gouvernement
allait se livrer à un examen préalable des doctrines anabaptistes. Les notes
et rapports conservés dans les archives du " ministère des Cultes " en font mention.
Ainsi, dans une note anonyme sur les anabaptistes du Zuiderzee, l'annotateur se
livrait-il à une esquisse des positions doctrinales : « Les Mennonites reconnaissent la
divinité de Jésus-Christ, ils prétendent qu'on ne doit obéir ni à l'Église, ni au Concile,
ni à aucune assemblée ecclésiastique. Ils rejettent le baptême des enfants ; ils soutiennent
qu'aucune Église ne doit être réputée la vraie Église à l'exclusion des autres, et
que l'ouvrage de la réformation ne saurait être regardé comme une entreprise exécutée
par l'autorité de Dieu et de Jésus-Christ »209. Quant à la fonction ministérielle, précisait-il,
les anabaptistes « ne croient pas que les ministres et les diacres aient aucune
autorité de droit divin. De là, ils concluent que l'excommunication n'a plus lieu
depuis les apôtres qui seuls ont été établis par Dieu ». Après avoir souligné qu'ils
reconnaissaient l'obligation d'obéir aux magistrats civils, l'annotateur terminait sur
la nécessité de s'adresser au préfet local pour obtenir de plus amples renseignements
sur « l'état de population, commune par commune, de tous les individus de ce culte,
sur le nombre de leurs temples, sur les principes religieux et civils de leur secte, sur
leurs principes politiques, sur leurs mœurs et sur leurs usages »210. Les mêmes éléments
d'information seront portés à la connaissance de l'Empereur par Bigot de Préameneu.
Dans un rapport en date du 13 octobre 1813, le " ministre des Cultes " allait
ratifier, avec des réserves de grande importance, le projet de la Commission d'Amsterdam.
Bigot de Préameneu pouvait par ailleurs croire avoir une idée de leurs doctrines,
puisqu'au début de l'année 1812, il avait été sollicité par une délégation d'anabaptistes
français en vue d'obtenir l'exemption de leurs coreligionnaires du service
militaire211. Après avoir comptabilisé le nombre d'âmes mennonites dans les différents
départements hollandais, relaté leur antipédobaptisme, leur hostilité au serment
religieux, au port d'arme et à l'exercice des fonctions de magistrature, le ministre
insistait sur la volonté des Églises anabaptistes de demeurer séparées de l'État quant
au traitement, manière d'euphémisme pour cette forme de protestantisme fondée
en Hollande, 10 octobre 1813, AN F19
208. Rapport de Bigot de Préameneu à sa Majesté l'Empereur sur l'organisation du culte mennonite
10926.
209. Note sur les Mennonites du Département du Zuiderzee,AN F19
10926.
210. Ibid.
211. Cf. J. SÉGUY, Les assemblées anabaptistes-mennonites en France, Paris, La Haye, Mouton,
EHESS, 1977, p. 369. Ce qui n'empêchait cependant pas Bigot de Préameneu de confondre baptistes et
anabaptistes. Il écrit en effet dans son rapport : « J'ai l'honneur de soumettre à Votre Majesté un projet
d'organisation du Culte Protestant connu en Hollande sous le nom de Mennonites, autrement dit Baptistes
». Et plus loin d'insister : « Ils ne doivent pas être confondus avec les Anabaptistes qui ont pour chef
un des disciples de Luther nommé Stok, et qui sont connus par les troubles qu'ils ont causés dans le 16e
siècle
», Rapport de Bigot de Préameneu à sa Majesté l'Empereur sur l'organisation du culte mennonite en
Hollande, 13 octobre 1813, AN F19
10926. À l'origine de l'anabaptisme hollandais, c'est le nom de Menno
Simons (1496-1561) qui retient évidemment l'attention, et ce pour la simple raison que, selon l'expression
de Jean Séguy, après lui « l'ensemble de l'anabaptisme [y compris en France] est devenu mennonite », op.
cit., p. 70.

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