Bibliothèque de droit public - Tome 335 - Le rescrit - 211

UNE PLACE À PART PARMI LES INSTRUMENTS DE SÉCURITÉ JURIDIQUE
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537. De même que la position historique du Conseil d'État tendant à exclure les
appréciations de fait du premier alinéa de l'article L. 80 A LPF au motif qu'elles ne
constitueraient pas une interprétation d'un texte fiscale a été jugée artificielle212,il
n'est plus opportun aujourd'hui de maintenir cette distinction qui, si intéressante
qu'elle soit du point de vue intellectuel, est à l'origine d'une différence de traitement
et de régime des contribuables selon que leur demande d'information porte sur une
qualification juridique des faits ou sur « un point de droit ». Dans la première hypothèse,
le contribuable bénéficie du régime du rescrit et l'administration est notamment
contrainte de lui répondre dans les trois mois. Dans le second cas, l'administration
n'est pas tenue de répondre, contrairement au rescrit, ce mécanisme ne comporte pas
de droit au Droit. Il serait certainement plus simple de traiter ces demandes, dont l'objet
est très proche, sous la bannière commune du rescrit. Cela reviendrait à élargir le
champ du droit au renseignement sur lequel porte le rescrit fiscal. Afin d'éviter
d'éventuels abus, il suffirait de dispenser le fisc de répondre aux questions ne concernant
pas directement le contribuable à l'origine de la demande. En pratique, cela allègerait
le travail de l'administration fiscale qui n'aurait plus à conduire ces distinctions.
Celle-ci tend d'ailleurs à privilégier le rescrit et à traiter dans, la mesure du possible,
les demandes du contribuable plutôt sous l'angle de l'article L. 80 B 1º LPF que sous
celui du premier alinéa de l'article L. 80 A LPF213.
2. Une innovation à parfaire : le « rescrit » social de branche
538. Le « rescrit social de branche » tranche avec les autres dispositifs partageant
une finalité commune en raison de l'étendue de son objet et de sa portée. Ajouté
au quatrième alinéa de l'article L. 243-6-3 I du Code de la sécurité sociale par l'ordonnance
du 10 décembre 2015214, ce texte prévoit que « lorsqu'elle porte sur une application
spécifique à la situation de la branche de dispositions du Code de la sécurité
sociale, la demande [de rescrit social prévue au premier alinéa du même article] peut
être formulée par une organisation professionnelle d'employeurs ou une organisation
syndicale reconnues représentatives au niveau de la branche professionnelle. Par dérogation
au premier alinéa, l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale se prononce
sur cette demande. »
539. Ce dispositif se justifie sans doute par les particularités propres au droit du
travail et au droit de la sécurité sociale au sein desquels une forme de colégislation,
rappelées par les dispositions préliminaires du Code du travail215, existe de longue
date entre le gouvernement et les partenaires sociaux. Il faut certainement y voir une
forme de prolongement, au stade de l'interprétation administrative des textes, du principe
de négociation qui sied à leur élaboration.
540. Le rescrit de branche, comme il est couramment appelé, se démarque ainsi
des autres procédures de rescrit par son objet. Il ne s'agit pas d'interroger l'administration
sur une situation juridique particulière mais sur un ensemble plus général,
212. « Tout juriste un peu expérimenté sait que notamment l'opération intellectuelle de qualification
éd., 2010, p. 88, § 90.
juridique des faits implique nécessairement une interprétation de la loi appliquée » relevait Jean-Jacques
Bienvenu in J.-J. BIENVENU,TH.LAMBERT, Droit Fiscal, PUF, 4e
213. DGFIP, Rapport sur l'activité en matière de rescrit - année 2017, préc., p. 3.
214. Dispositif créé par l'article 4 de l'ordonnance nº 2015-1628 du 10 décembre 2015, préc. Par
renvoi à ces dispositions, ce mécanisme est également applicable auprès des caisses agricoles, art. L. 72524
du Code rural et de la pêche maritime.
215. Chapitre préliminaire : dialogue social, art. L. 1 à L. 3 du Code du travail.

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