Bibliothèque de droit public - Tome 336 - Contribution à une théorie juridique des biens communs - 294

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CONTRIBUTION À UNE THÉORIE JURIDIQUE DES BIENS COMMUNS
dispositif énumératif308. Celui-ci est révélateur du « profond malaise qui entoure la
dichotomie domaniale »309. Certains biens, qui auraient dû intégrer le domaine public
par application des critères du Code général de la propriété des personnes publiques,
en sont soustraits pour être rangés dans le domaine privé. Ainsi que l'écrivent les
commentateurs du Code précité, « le domaine privé comprend aussi des biens affectés,
non à un service public, mais à l'usage du public »310.C'est le cas des bois et
forêts publics relevant du régime forestier ou encore des chemins ruraux311.À l'inverse,
d'autres biens, pourtant dépourvus d'affectation, sont incorporés au domaine
public. C'est le cas, par exemple, de certains biens désaffectés, sans être déclassés.
L'illisibilité de la répartition domaniale des biens publics est confortée du fait de
l'interprétation du juge312. Il faut ici faire mention des biens communaux et
sectionaux313.
553. En résumé, l'incorporation des biens communs dans la catégorie des objets
de propriété publique est opportune. Toutefois, la propriété publique - en tant
308. Sur la définition du domaine public entre méthodes conceptuelle et énumérative, H. HUBRECHT,
« Faut-il définir le domaine public et comment ? Méthode énumérative et méthode conceptuelle », AJDA,
2005, nº 11, pp. 598-603. V. également H.-G. HUBRECHT,F. MELLERAY, « Le Code général de la propriété des
personnes publiques », Dr. adm., 2006, nºs 8-9, p. 7.
309. M. CHOUQUET, th. préc., p. 137.
310. CGPPP, Paris, Dalloz, éd. 13, 2023, p. 541, comm. F. BRENET,C. CHAMARD-HEIM,F. MELLERAY,
P. YOLKA.
311. CGPPP, art. L. 2212-1. Pour une approche critique de l'incorporation des forêts publiques au
domaine privé, C. LAVIALLE, « Remarques sur le classement des forêts publiques dans le domaine privé »
in Mélanges en l'honneur de Pierre Bon. Long cours, Paris, Dalloz, 2014, pp. 945-958 ; C. CHAMARD-HEIM,
« Les forêts publiques. A- domanialité ou domanialité atypique ? » in Des petits oiseaux aux grands principes.
Mélanges en hommage au professeur Jean Untermaier, Paris, Mare & Martin, 2018, pp. 111-124.
Sur l'incohérence de l'incorporation des chemins ruraux au domaine privé, C. LAVIALLE, « La fin des chemins
ruraux » in Mélanges offerts à Pierre Montané de la Roque, t. 1, Toulouse, Presses de l'Institut d'études
politiques, 1986, spéc. p. 449 ; C. ROUX, « Existe-t-il un " domaine privé naturel " ?» in Mélanges en
l'honneur du Professeur Christian Lavialle, Toulouse, PUTC, 2020, spéc. p. 594.
312. Sur ce point, C. LAVIALLE, « Remarques sur la définition législative du domaine public », RFDA,
2008, nº 3, p. 494 : « Le juge peut, par le seul jeu de son pouvoir d'interprétation, donner une portée non
nécessairement attendue à un de ces critères [de la domanialité publique] dès lors qu'il demeure dans le
cadre de sa fonction juridictionnelle de qualification des faits ». Pour aller plus loin, J.-Y. CHÉROT, « Les
techniques du juge administratif dans la détermination de la consistance du domaine public. Essai d'appréciation
de certains concepts », RRJ, 1981, nº 10, pp. 213-240.
313. Ces biens sont intégrés par le juge au domaine privé de la commune, alors même qu'il est
généralement admis qu'ils font l'objet d'une affectation publique. Or, cette incorporation au domaine
privé n'est explicitement prescrite ni par l'article 542 du Code civil ni par le Code général de la propriété
des personnes publiques, qui restent muets sur la question. Les biens communaux relèvent du domaine
privé par détermination de la loi uniquement concernant les chemins ruraux et les forêts, dès lors que ces
dernières sont soumises au régime forestier. Cependant, la domanialité privée des biens communaux - et
par extension des biens sectionaux - a été à plusieurs reprises affirmée par le juge (Cass. 3e
1988, nº 87-10687, Bull. civ., III, nº 110 ; Cass. 3e civ., 5juill. 1989, nº 88-11579, Paolini ; CA Riom,
civ., 15juin
9 sept. 2010, nº 09-00497, Section de cne de la Rouveyre) et confirmée par la doctrine (P. GODFRIN,
M. DEGOFFE, Droit administratif des biens, Paris, Dalloz, éd. 13, 2020, p. 13 ; H. BERTHÉLEMY, Traité élémentaire
de droit administratif, Paris, Rousseau, éd. 13, 1933, pp. 632-633 ; G. MAROGER, L'affectation à
l'usage public des biens des patrimoines administratifs, préf. R. CAPITANT, Paris, Sirey, 1942, p. 18). Pour
une approche critique, P. YOLKA, op. cit., p. 483 : La domanialité privée des biens communaux « fait figure
de curiosité (voire d'anomalie) dès lors qu'elle n'est pas imposée - sauf exception (forêts) - par les textes
» ; C. LAVIALLE, Droit administratif des biens, Paris, PUF, 1996, p. 67 : Il faudrait « les distinguer de
ceux qui constituent le domaine privé communal, propriété exclusive de cette personne morale et les ériger
en catégorie de biens autonome, objet d'une propriété ni publique, ni privée mais collective ». L'auteur
ajoute que les biens communaux figurent au rang des « biens qui ont été classés directement dans le
domaine privé alors que leur fonction sociale aurait dû leur valoir une autre qualification » (ibid., p. 68).
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