Bibliothèque de droit des entreprises en difficulté - Tome 33 - Le mandat de justice dans les procédures collectives - 31

INTRODUCTION
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que la loi du 25janvier 1985 a supprimé la masse des créanciers, l'article L. 622-20,
al. 4 du Code de commerce dispose que les sommes recouvrées à l'issue des actions
introduites par le mandataire judiciaire entrent également dans le patrimoine du débiteur
mais sont affectées en cas de continuation de l'entreprise selon les modalités prévues
pour l'apurement du passif59. Autrement dit, le fruit de l'action intentée par le
mandataire judiciaire n'est pas directement distribué aux créanciers. La rédaction de
cette disposition ne permet pas de savoir si les sommes récoltées sont disponibles et
saisissables lorsqu'elles sont appréhendées au cours de la période d'observation. De
même, il faut se demander si les sommes obtenues après l'adoption d'un plan de
continuation doivent servir à anticiper le paiement des échéances du plan ou si elles
peuvent abonder la trésorerie du débiteur en convalescence.
Si les sommes récoltées dans l'intérêt collectifdes créanciers ne s'avéraient ni indisponibles
ni insaisissables, elles contribueraient en premier lieu à reconstituer la trésorerie
du débiteur. À cet égard, il serait difficile d'affirmer que les actions intentées dans cet
intérêt collectif profitent nécessairement aux créanciers60.En d'autres termes, au regard
de l'affectation de leur produit, les actions des deux mandataires de justice serviraient
paradoxalement le même intérêt, à savoir la sauvegarde de l'entreprise. Cette situation
résulte-t-elle d'une maladresse du législateur ? Il est possible d'en douter car ce dernier
avait conscience des conséquences de la suppression de la masse61. Par conséquent, si
l'affectation identique du fruit des actions des deux mandataires de justice résultait d'une
volonté assumée du législateur, il faudrait se demander si la distinction des fonctions
était bien nécessaire. La question mérite d'être posée car, en scindant les fonctions du
syndic, la loi du 25janvier 1985 a conduit à comprendre les missions du mandataire
judiciaire et de l'administrateur judiciaire comme celles de défenseurs respectifs des intérêts
des créanciers et de l'entreprise. Cette approche amène à appréhender, sur le plan de
la technique juridique, ces missions au prisme de la notion de représentation, ce qui ne
va pas sans créer d'autres difficultés.
13. Les questions soulevées par la notion de représentation appliquée à la mission
du mandataire judiciaire. Le mandataire judiciaire n'est plus qualifié de représentant
des créanciers dans le livre VI du Code de commerce depuis la loi du 26juillet 2005.
En revanche, l'article L. 812-1 du Code de commerce dispose encore que les mandataires
judiciaires sont des personnes chargées par décision de justice de représenter les
créanciers. En contemplation des incertitudes portant sur l'affectation des sommes, il
59. Sur les difficultés causées par la suppression de la masse, v. A. Martin-Serf, « L'intérêt collectif
des créanciers ou l'impossible adieu à la masse », in Procédures collectives et droit des affaires : morceaux
choisis. Mélanges en l'honneur d'Adrienne Honorat, éd. Frison-Roche, 2000, p. 158 ; M. Cabrillac, « L'impertinente
réapparition d'un condamné à mort ou la métempsychose de la masse des créanciers », in Propos
impertinents de droit des affaires : mélanges en l'honneur de Christian Gavalda, Dalloz, 2001, p. 72 ;
L. Martin, « Le représentant des créanciers et l'article 46 de la loi du 25janvier 1985 », RD bancaire et
bourse 1990, p. 64. Comp. : M. Sénéchal, L'effet réel des procédures collectives : essai sur la saisie collective
du gage commun des créanciers, préf. M.-H. Monsèrié-Bon, Litec, 2002, pour qui la disparition de la
masse pose moins de difficultés techniques que ne le soutiennent les auteurs précités.
60. En ce sens : F. Derrida, P. Godé, J.-P. Sortais, avec la collab. d'A. Honorat, Redressement et liquidation
judiciaires des entreprises, Dalloz, 3e éd., 1991, no
61. Projet de loi no
518, p. 386.
1578 relatifau règlementjudiciaire, Exposé des motifs, p. 5 : « Lefait que l'activité
est poursuivie dans l'intérêt de l'entreprise et non plus des créanciers a également des incidences
significatives sur les actions qui ont pour objet de reconstituer l'actifde l'entreprise ou d'en distraire des
éléments. D'une part, le produit des actions remettant en cause les actes du débiteur particulièrement préjudiciables
aux droits de l'ensemble de ses créanciers ne peut que rentrer dans le patrimoine du débiteur
ou alimenter la trésorerie de l'entreprise. »

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