Bibliothèque de droit de l'urbanisme et de l'environnement - Tome 23 - L’appréhension juridique de la nature ordinaire - 144

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L'APPRÉHENSION JURIDIQUE DE LA NATURE ORDINAIRE
cohérents sur plusieurs plans, dont le plan écologique237. Dans la suite de ce qu'exposait
déjà Éric NAIM-GESBERT, il convient d'encourager le dialogue entre le droit
public, la géographie et l'écologie. Le législateur a déjà pris la mesure de cet enjeu,
notamment à travers le champ d'application de la loi Littoral et de la loi Montagne,
qui illustre cette capacité conciliatrice à travers l'application de politiques spécifiques
sur des espaces-milieux permettant ainsi une « gestion globale de situations localement
différentes »238. Désormais, il appartient aux acteurs décentralisés d'en prendre
toute la mesure particulièrement lors de la délimitation des périmètres des schémas de
cohérence territoriale (SCOT) dont l'initiative revient aux communes ou groupements
de communes239.L'obligation de « prendre en compte de façon cohérente les besoins
de la protection des espaces naturels et agricoles et les besoins et usages des habitants
en matière d'équipements, de logements, d'espaces verts, de services et d'emplois »
ainsi que l'obligation de « tenir compte » des périmètres existants corroborent l'existence
d'une alternative à la rigidité des cadres spatiaux. L'article L143-3 du Code de
l'urbanisme dispose en effet que les périmètres des SCOT doivent tenir compte des
périmètres « des pays et parcs naturels, ainsi que des périmètres déjà définis des autres
schémas de cohérence territoriale, des plans de déplacements urbains, des schémas de
développement commercial, des programmes locaux de l'habitat et des chartes intercommunales
de développement et d'aménagement », soit autant de plans qui dessinent
les contours d'un territoire a priori spatialement pertinent.
188. Enfin, à la suite de S. JOLIVET, il faut convenir que l'émergence du réseau
renouvelle la conception de l'espace. Il offre de nouvelles perspectives pour établir
des méthodes et outils inédits en faveur de la conservation de la nature (y compris
ordinaire), en complément de la technique du zonage peu probante puisqu'elle vise
à appliquer dans un espace délimité un régime juridique exorbitant de droit commun
non proportionné à l'objectif poursuivi. Ainsi, en promouvant l'idée de connexion, le
réseau transcende la frontière pour instituer la solidarité. Juridiquement, cette solidarité
prend l'appellation de solidarité écologique. Sur le plan institutionnel, on peut
retrouver cette idée sous la dénomination de solidarité territoriale. Dans tous les cas,
la promotion de cette solidarité montre qu'il est inconcevable de penser le réseau écologique
sous le seul prisme de ses dimensions spatiales et temporelles. Plus globalement,
il requiert l'appréhension de la coopération horizontale des différents acteurs du
territoire240.
237. La législation en matière de droit de l'eau est ici une bonne illustration.
238. E. Naim-Gesbert, Les dimensions scientifiques du droit de l'environnement, Contribution à
l'étude des rapports de la science et du droit, op. cit., pp. 173‑184.
239. Dans ce cadre, en application des articles L143-2 et L143-3 du Code de l'urbanisme, les autorités
compétentes ont l'obligation de définir le périmètre du SCOT de manière à ce qu'il soit d'un seul
tenant et sans enclave, et doivent assurer que « le périmètre du schéma de cohérence territoriale permet
de prendre en compte de façon cohérente les besoins de protection des espaces naturels et agricoles ». À
l'occasion de l'adoption de la loi ALUR, le législateur avait imposé que le périmètre du SCOT couvre au
minimum deux EPCI. Cela permettait d'une part, d'éviter la superposition sur un même territoire d'un
SCOT et d'un PLUi, et d'autre part, de conforter le rôle prospectif du SCOT en favorisant une échelle
correspondant à un bassin de vie, notion qui emprunte à la fois au droit, à la géographie et à l'écologie.
Cette mention a été supprimée par la loi NOTRe.
240. S. Jolivet, La conservation de la nature transfrontière, Mare & Martin, Paris, 2015, p. 240.

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