Bibliothèque de droit social - Tome 88 - L'organisation des groupements professionnels - 155

LE (RE)GROUPEMENT PROFESSIONNEL ET SES MEMBRES
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361. Des incriminations encadrées. L'autonomie organisationnelle n'a jamais
été synonyme d'indépendance absolue. Le principe de spécialité en est la première
manifestation. Seules des prescriptions statutaires destinées à atteindre le but professionnel
peuvent être imposées aux membres. Croyance religieuse ou opinions politiques
sont autant de faits de la vie privée qui, sauf répercussion sur la personne morale,
échappent au pouvoir disciplinaire du groupement. À cette première limite, s'ajoute le
principe de subordination, qui interdit au pouvoir disciplinaire de porter atteinte aux
intérêts de l'État et aux droits de l'individu113 ; ce qui explique au demeurant l'interdiction
des clauses syndicales.
362. Plus qu'une illustration du rôle fondateur des statuts dans l'organisation
interne du groupement professionnel, la question des sanctions disciplinaires (2)
révèle le rôle du juge dans la construction d'un droit commun des groupements.
2. Les sanctions
363. Une compétence statutaire. Il revient aux statuts de prévoir les sanctions
disciplinaires infligées à un membre lorsqu'il se rend coupable d'une faute disciplinaire.
Mais leur lacune n'est pas dirimante. Le droit commun des contrats offre de
nombreuses solutions qui participent à la construction d'un droit commun des groupements.
364.
Les sanctions pécuniaires. Statuts et règlements intérieurs peuvent prévoir
des sanctions pécuniaires dont la licéité est depuis longtemps acquise114. Dotées
d'une nature indemnitaire, elles ont aussi une fonction comminatoire et punitive qui
explique, outre leur caractère forfaitaire115,qu'elles soient soumises au régime de la
clause pénale116.Il s'ensuit que toute inexécution peut être sanctionnée par une
amende117, même dans le silence des textes statutaires. Mieux, le juge est autorisé à
modérer ou augmenter la pénalité statutairement convenue si celle‑ci est manifestement
excessive ou dérisoire118.
365. La suspension de droits. Dans les groupements à caractère contractuel, il
n'est pas rare de rencontrer des clauses de suspension de droits. Affectant en principe
l'ensemble des avantages et droits attachés à la qualité de membre, la suspension peut
aussi n'intéresser qu'un droit particulier119. Mais là encore le silence des statuts n'est
pas un obstacle. Si l'on admet que la suspension de droits constitue une application
dérivée120 de l'exception d'inexécution, le groupement peut, par application de
113. DURAND Paul et VITU André, op. cit., nº 76.
114. Civ., 27juin 1944 ; D. 1944. 1. 143 ; CE 16janvier 1985, nº 52654, Lebon 11.
115. TERRÉ François, SIMLER Philippe, LEQUETTE Yves et al., Droit civil : les obligations, Dalloz,
2022, no 892 : il s'agit d'un des deux caractères de la clause pénale, les dommages-intérêts et le caractère
forfaitaire.
116. WICKER Guillaume et PAGNUCCO Jean-Christophe, « Personne morale », Répertoire de droit
civil, 2018, nº 100 ; GERMAIN Michel et VATINET Raymonde, op. cit., p. 403.
117. Cass. 1re
civ., 10 février 1960, Bull. civ. I, nº 60 ; PIMONT Sébastien, « La clause pénale »,
Répertoire de droit civil, 2022, nº 56 : c'est un « remède à l'inexécution » qui ne suppose pas la preuve
d'un préjudice.
118. C. civ., art. 1231-5 ; sur les pouvoirs du juge, v. PIMONT Sébastien, op. cit., nº
79 et s.
119. DESHAYES Olivier, GENICON Thomas et LAITHIER Yves-Marie, Réforme du droit des
contrats, du régime général et de la preuve des obligations, LexisNexis, 2018, p. 543.
120. GERMAIN Michel et VATINET Raymonde, op.cit., p. 405 ; GUYON Yves, note ss.
Cass. 1re civ., 3 décembre 1996, nº 94-21775 et Cass. 1re
civ., 22 avril 1997, nº 95-15769, Rev. sociétés
1997. 550.
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