Chapitre 2 UN PRINCIPE MATRICIEL 313. L'étude de la jurisprudence du Conseil constitutionnel a montré que le principe d'égalité devant la commande publique constitue le principe de référence permettant de préserver les droits et libertés mis en jeu dans le cadre des contrats de la commande publique. Une fois distingué, il importe d'identifier sa portée et son champ d'application. Cette recherche passe par l'étude des décisions du Conseil constitutionnel dans lesquelles ce principe est utilisé. Il en ressort que si le terme peut sembler réduit à un contenu précis et restreint, ses potentialités sont au contraire nombreuses. Lorsque le Conseil se réfère à l'égalité devant la commande publique, son contrôle ne se limite pas à la seule protection de l'égalité mais s'exerce de façon bien plus large. Il s'avèreêtreleprincipematriciel de la matière et présente à ce titre plusieurs facettes. 314. Le principe d'égalité devant la commande publique peut d'abord se concevoir au sens strict. Son application jurisprudentielle révèle qu'il recouvre des droits et libertés classiques, équivalents à ceux protégés par le juge administratif, civil ou encore européen, c'est-à-dire les principes fondamentaux de la commande publique. L'étude montre que la liberté d'accès à la commande publique et l'égalité de traitement des candidats sont effectivement protégées derrière ce nouveau démembrement du principe d'égalité. Le principe d'égalité devant la commande publique offre de cette façon une protection similaire à celle conférée par les principes fondamentaux de la commande publique, tout en étant adaptée au contentieux de la constitutionnalité. Cette vision restreinte a été affinée par le juge constitutionnel qui a expressément écarté certaines notions du champ d'application du principe d'égalité devant la commande publique, comme c'est le cas par exemple du bon usage des deniers publics. Cet objectif s'est épanoui spécifiquement dans le contentieux constitutionnel de la commande publique et a été reconnu de façon indépendante par les juges du Palais deMontpensier. S'il paraît indispensable, l'analyse approfondie de cet impératif expose au contraire tous ses défauts et sa présence au sein des décisions du Conseil semble davantage relever d'une forme de dépassement des pouvoirs de la part du juge constitutionnel que d'un véritable contrôle de constitutionnalité. La vision stricte du principe d'égalité devant la commande publique retenue par le Conseil s'avère ainsi convaincante. 315. Le principe d'égalité devant la commande publique peut ensuite se concevoir selon un sens plus large. Il en découle une vision moins catégorielle et plus étendue que celle adoptée par le juge administratif qui permet au Conseil constitutionnel de protéger des droits et libertés qui ne sont pas propres à la matière tout en se fondant sur le principe d'égalité devant la commande publique. La force du principe identifié apparaît alors : le Conseil peut ainsi protéger de façon indirecte des droits qui n'ont pas encore été reconnus comme d'application directe à ces contrats.