Bibliothèque des sciences criminelles - Tome 76 - La question du cumul de déclarations de culpabilité en droit pénal interne et en droit international pénal - 421

UNITÉ D'INFRACTION EN VERTU D'UNE THÉORIE DU DROIT PÉNAL GÉNÉRAL
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Comme la jurisprudence du Conseil constitutionnel a évolué depuis 2002 dans le sens
d'une intensification du contrôle de la nécessité des incriminations, il est permis de
supposer que le Conseil constitutionnel rendrait aujourd'hui une décision différente.
546. Avant de conclure, on fera observer que la notion de même genre d'infractions
pourrait constituer un critère pertinent dans le cadre du contrôle de conformité
des incriminations au principe d'égalité devant la loi pénale. Si, en effet, des incriminations
relatives à des infractions du même genre prévoient des peines sensiblement
différentes sans que cette différence de régime ne soit en rapport avec la différence de
nature entre lesdites infractions, une atteinte au principe d'égalité devant la loi pénale
est caractérisée. C'est ce critère qui a conduit le Conseil constitutionnel à censurer, sur
le fondement du principe d'égalité devant la loi pénale, l'incrimination de la perception
frauduleuse de prestations d'aides sociales au motif que cette infraction était
punie des peines de l'escroquerie alors que la fraude ou fausse déclaration en vue
d'obtenir le revenu de solidarité active, l'aide personnalisée au logement ou l'allocation
aux adultes handicapés était punie d'une amende de 5 000 euros62. Dans cette
décision, le Conseil a d'abord énoncé que « la loi pénale ne saurait, pour une même
infraction, instituer des peines de nature différente, saufà ce que cette différence soit
justifiée par une différence de situation en rapport direct avec l'objet de la loi »63,
puis il a fait observer que « des faits qualifiés par la loi de façon identique peuvent,
selon le texte d'incrimination sur lequel se fondent les autorités de poursuite, faire
encourir à leur auteur soit une peine de cinq ans d'emprisonnement et
375 000 euros d'amende, soit une peine de 5 000 euros d'amende »64. Comme l'a justement
souligné M. DETRAZ
65, les termes employés par le Conseil - « même infraction
» et «faits qualifiés par la loi de façon identique » - étaient inadéquats dans la
mesure où les incriminations en cause définissaient et réprimaient des infractions distinctes.
L'expression « infractions du même genre » pourrait leur être substituée ; la
clarté et la précision de la langue juridique en sortiraient renforcées.
547. En conclusion, la théorie du conflit d'incriminations peut être fondée sur
l'intention réelle ou supposée du législateur dans la mesure où celui-ci peut très
salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral, mais cette disposition n'est pas une
incrimination et ne pose donc aucune difficulté.
62. Décision nº 2013-328 QPC du 28juin 2013, Association Emmaüs Forbach, AJpénal 2013. 471,
obs. BELLOIR ; Dr.pén. 2013, nº 149, obs. PELTIER ; RSC 2013. 827 ; D. 2013. 1631 et 2713, obs. ROUJOU
DEBOUBÉE ; LPA, 14 mai 2014, obs. TELLIER CAYROL ; Gaz. Pal. 5 sept. 2013, obs. DETRAZ.
M. Jacques-Henri ROBERT a quelque peu critiqué la décision du Conseil en ce qu'elle a abrogé l'incrimination
la plus sévère (J.-H. ROBERT, « Alignement par le bas », Droit pénal, 1er
oct. 2013, nº 10, p. 35-36 : « les
nombreux délinquants astucieux qui pillent les organismes sociaux appartiennent à la même catégorie criminologique
que les escrocs », tandis que la peine de 5 000 euros d'amende est bien trop basse par rapport
« aux préjudices énormes causés par la fraude aux innombrables prestations et allocations sociales »). Il
faut cependant convenir que le Conseil n'avait d'autre choix que de censurer la disposition qui était contestée
devant lui, soit l'incrimination qui constituait le fondement des poursuites dirigées contre l'association.
La faute revient au législateur qui a produit une législation incohérente et contraire au principe d'égalité.
D'ailleurs M. ROBERT reconnaît que « les différences entre les pénalités que le Conseil relève sont choquantes
». À charge pour le législateur de réparer les conséquences de ses erreurs, dans le sens de l'aggravation
des peines encourues s'il l'estime nécessaire. Sur ce rattrapage législatif, v. P. MORVAN, « Ordre et confusion
des sources réprimant la fraude sociale », Droit social, 2014, p. 878.
63. Décision nº 2013-328 QPC du 28juin 2013, Association Emmaüs Forbach, précité, § 3.
64. Ibid., §6.
65. S. DETRAZ, « Inconstitutionnalité des incriminations doublons faisant l'objet d'une répression disparate
», Gaz. Pal., nº 248, 5 sept. 2013.

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