Bibliothèque de finances publiques et fiscalité - Tome 78 - Recherche sur la transparence en droit des finances publiques - 272

272
RECHERCHE SUR LA TRANSPARENCE EN DROIT DES FINANCES PUBLIQUES
676. Comme l'écrit le professeur Philippe RAYNAUD, un décideur ou un
organe de décision de la même façon, « qui ne connaîtrait d'autre régulation que ses
désirs et ses calculs d'utilité se rapprocherait donc en fait beaucoup plus du mécanisme
que de l'autonomie »146. Au sein de l'État et de ses activités, « le calcul, la
prévision et le formalisme, l'optimisation des moyens en vue des buts s'y sont constamment
affinés »147, faisant le lit de la performance comme une forme de mécanisation
de la décision financière détachée de déterminants politiques.
677. Selon Frédéric LORDON cette toute-puissance du rationalisme conduit
également à l'émergence d'un certain nombre d'« idées simples »148 qui se déploient
au cœur de la société. Cela au travers des « mots d'ordre » qui consistent en des impératifs
catégoriques de la politique économique ou bien au travers des seuils, qui tentent
d'établir la forme accomplie d'une norme en matière de politique économique149.
La rationalisation conduit à une réduction numérologique, c'est-à-dire à une forme de
simplification qui ne peut transcrire l'intégralité des réalisations d'une activité sociale.
Des économistes eux-mêmes ont remis en cause ce modèle de rationalité parfaite dès
les années 1960, à l'instar d'Herbert SIMON selon qui « Lorsque la perception et la
connaissance s'interposent entre le décideur et son environnement objectif, ce modèle
n'est plus approprié »150.
B. L'ÉVALUATION : LATRANSPARENCE POUR LE CONTRÔLE
DE LA PERFORMANCE
678. La diffusion de la performance dans l'ensemble du droit public financier
conduit à mettre en œuvre des éléments visant à apprécier le respect de cette exigence
nouvelle. Ces éléments s'inscrivent dans une filiation avec le principe de transparence
et développent des modes nouveaux de contrôle des décisions financières non plus
échafaudés autour du respect des règles et procédures, mais autour du principe de
bonne gestion et de performance de l'action publique dont l'évaluation est la garante.
1. Une logique récente comme élément de recherche de la performance
679. La révision constitutionnelle de 2008 a introduit, par l'article 47-2 de la
Constitution, la notion d'évaluation des politiques publiques. C'est au Parlement et
au Gouvernement assistés dans cette tâche, à l'instar de l'exécution des lois de finances
et de financements de la sécurité sociale, par la Cour des comptes que revient cette
mission d'évaluation151.L'article 48 de la Constitution précisant en son alinéa 4 les
conditions de mise en œuvre de cette mission d'évaluation par le Parlement152.
146. P. RAYNAUD, op. cit., p. 137.
147. L. FLEURY, Max Weber, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2016, p. 43.
148. F. LORDON, op. cit., p. 183 et s.
149. Ibid., p. 186-191.
150. H. A. SIMON, " Theories of Decision Making in Economics and Behavioral Science " , Amrican
Economic Review vol. 49, 1959, p. 272, cité par J.-F. KERLÉO, op. cit., p. 246.
151. Article 47-2 al 1 de la Constitution : « La Cour des comptes assiste le Parlement dans le contrôle
de l'action du Gouvernement. Elle assiste le Parlement et le Gouvernement dans le contrôle de l'exécution
des lois de finances et de l'application des lois de financement de la sécurité sociale ainsi que dans l'évaluation
des politiques publiques. Par ses rapports publics, elle contribue à l'information des citoyens » (souligné
par l'auteur).
152. Article 48 al 4 de la Constitution : « Une semaine de séance sur quatre est réservée par priorité et
dans l'ordre fixé par chaque assemblée au contrôle de l'action du Gouvernement et à l'évaluation des politiques
publiques ».
Bibliothèque de finances publiques et fiscalité - Tome 78 - Recherche sur la transparence en droit des finances publiques

Table des matières de la publication Bibliothèque de finances publiques et fiscalité - Tome 78 - Recherche sur la transparence en droit des finances publiques
