Bibliothèque de droit de l'urbanisme et de l'environnement - Tome 24 - L’entreprise et la lutte contre le changement climatique - 77

LA GESTION DES RISQUES D'ENTREPRISE
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§2. LES RISQUES DE NATURE FINANCIÈRE
91. Le processus de transition vers une économie bas carbone, qui implique de
rediriger les investissements vers les secteurs les moins polluants, cristallise le besoin
pour l'entreprise d'adapter sa stratégie économique et de croissance au phénomène du
réchauffement climatique. L'entreprise fait face aujourd'hui à une double pression :
une pression externe, d'abord, liée à l'essor de la finance durable (I) et une pression
interne, ensuite, liée à l'essor de l'engagement actionnarial (II).
I. L'ENTREPRISE FACE À L'ESSOR DE LA FINANCE DURABLE
92. L'objectif d'atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050, désormais
inscrit dans la loi, implique pour les institutions bancaires et les assurances qu'elles
fassent évoluer leur portefeuille d'actifs afin de diminuer les risques climatiques auxquels
elles sont exposées. Selon les résultats du premier exercice pilote climatique de
l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), réalisé en 2020, les secteurs
les plus affectés par le changement climatique, i.e. le secteur pétrolier, l'industrie chimique,
l'agriculture et la gestion des déchets, représentent environ 10% du portefeuille
de crédit des banques et 17% du portefeuille des assureurs. Certes, au regard
de ces chiffres, l'exposition des banques et compagnies d'assurances françaises aux
risques induits par le changement climatique semble plutôt modérée. Il reste que le
changement climatique est appréhendé par ces acteurs comme une donnée matérielle
ou comme un risque devant être intégré dans les stratégies de moyen et de long terme.
C'est ce que confirment aussi les résultats du premier test de résistance (stress test)
aux risques climatiques de la Banque centrale européenne (BCE), publiés en juillet
2022, même s'il est vrai que, sur le plan pratique, la BCE constate que les banques
n'intègrent toujours pas suffisamment les risques climatiques à leurs dispositifs de
tests de résistance et leurs modèles internes.
Des progrès sont encore à faire mais les portefeuilles d'actifs commencent d'ores
et déjà à évoluer. Cette évolution se traduit différemment pour chaque acteur. Tantôt
elle implique une réorientation des financements vers des projets « verts » ou « durables
», tantôt elle appelle au désinvestissement des énergies fossiles. Ainsi, petit à
petit, la finance se met-elle au service du climat (A). La mise en œuvre de la taxonomie
verte européenne, qui a vocation à devenir le langage commun de la finance
durable, permettra assurément de renforcer ces dynamiques (B).
A. LA FINANCE DURABLE AU SERVICE DU CLIMAT94
93. Sur le plan juridique, l'Accord de Paris a conforté au niveau international le
rôle de la finance dans la transition écologique. Son article 2, 1, c) énonce clairement
l'objectif d'aligner les flux financiers vers une économie bas carbone. En effet, l'atténuation
du réchauffement climatique implique un changement de modèle et une évolution
profonde de nos économies. Pour cela, il convient de réorienter les flux de
capitaux, de reléguer l'investissement non durable et de promouvoir, a contrario,l'investissement
durable. Or, bien avant la signature de l'Accord de Paris, certains investisseurs
s'étaient déjà saisis de ces problématiques. C'est ainsi que l'on a vu d'abord
94. M. Roussille et V. Mercier, « La finance au service du climat » (Dossier), Bull. Joly Bourse,nº 2,
2021, p. 38.

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