Bibliothèque de droit international et de l'Union européenne - Tome 139 - La dénonciation et la renégociation des traités - 184

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LA DÉNONCIATION ET LA RENÉGOCIATION DES TRAITÉS
concernées devront chercher une solution parmi celles prévues à l'article 33 de la Charte
de l'ONU63.
464. Il ressort de l'analyse de cet article qu'il a été essentiellement prévu pour éviter
l'arbitraire et freiner la remise en cause du lien conventionnel. Il s'inscrit decefait dans le
même esprit de la protection absolue de la stabilité des traités. L'étude du régime juridique
établi par la CVDT pour la dénonciation démontre l'introduction dans celle-ci de plusieurs
limites (ou plus précisément la multiplication de la même limite) visant à garantir
la préservation du lien conventionnel sans toutefois prévoir expressément un mécanisme
efficace qui aurait pour fin principale l'adaptation du lien conventionnel aux évolutions
des circonstances au lieu de la préservation d'un statu quo préjudiciable à certains États,
au moins aux yeux de l'un des États parties64. À cet égard, certains ont même estimé que
la procéduredelaCVDT n'a pas freiné la dénonciation mais l'a« bannie »65.On aurait
ainsi pu envisager l'insertion d'une obligation de renégociation dans l'article 65 notamment
lorsque la mesure envisagée est un retrait ou une dénonciation (contrairement aux
cas de nullité et de non-validité du traité).
465. En ce qui concerne l'indication de la « raison », le texte nous paraît relativement
ambigu. S'agit-il simplement de noter la raison (nullité pour coercition,
dénonciation pour impossibilité d'exécution, etc.) ou bien la motivation derrière
l'acte envisagé, qu'elle soit juridique ou politique (harmonisation avec les changements
juridiques au niveau de droit interne ou contestation politique) ? Il apparaît de
l'étude des travaux préparatoires qu'il s'agit de la simple raison de la mesure envisagée
et du contexte circonstanciel66. Il faudra par exemple spécifier que la dénonciation
est fondée sur l'article 61 en précisant, selon l'État dénonciateur, l'objet indispensable
à l'exécution du traité définitivement disparu ou détruit. Il semble que cette
explication suffira pour satisfaire l'objectif de cette disposition qui consiste en l'information
des autres parties qui apprécieront la (légitimité de la) situation67. En mentionnant
la mesure et les raisons, la partie qui se retire qualifie les faits qu'elle invoque et
la mesure qu'elle prendra. Il reviendra donc aux autres parties d'apprécier la situation
et d'interpréter le traité et non de qualifier les faits68. La simple indication de la raison
tel que décrit ci-dessus nous paraît insuffisante pour déclencher une renégociation. Le
manque d'exigence de motivation minimum est regrettable.
466. Le délai d'au moins trois mois dans ce contexte joue un rôle relativement
distinct de celui prévu à l'article 56 (2)69. Le premier est censé permettre aux autres
États d'apprécier la légitimité de la situation et de formuler leurs objections le cas
échéant, tandis que le second assure une durée de transition qui pourrait ouvrir la
63. L'article 33 de la Charte des Nations Unies prévoit que : « 1. Les parties à tout différend dont la
prolongation est susceptible de menacer le maintien de la paix et de la sécurité internationales doivent en
rechercher la solution, avant tout, par voie de négociation, d'enquête, de médiation, de conciliation, d'arbitrage,
de règlement judiciaire, de recours aux organismes ou accords régionaux, ou par d'autres moyens
pacifiques de leur choix. 2. Le Conseil de sécurité, s'il le juge nécessaire, invite les parties à régler leur
différend par de tels moyens ».
64. M. Cosnard, « Article 65 - Convention de 1969 », op. cit., p. 2362. M. Cosnard souligne, à cet
égard, que « [l]a solution ainsi adoptée traduit la volonté farouche de préserver la stabilité des engagements
conventionnels, même s'ils ne sont que des « apparences » d'engagements ».
65. Ibid., p. 2373.
66. Ibid., p. 2371.
67. Ibid.
68. Ibid.
69. Ibid., p. 2365.

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