Bibliothèque de droit international et de l'Union européenne - Tome 139 - La dénonciation et la renégociation des traités - 21

INTRODUCTION
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nombre d'États sur une durée suffisamment étendue31. Grâce à cette flexibilité et à la
sécurité juridique qu'il confère du fait de sa nature écrite le rendant facilement accessible
et identifiable, le traité est conçu comme la « technique normative privilégiée »32
du droit international33.
16. D'un point de vue sociologique, le traité cristallise le moment qui a marqué
un compromis entre les parties contractantes34. Alors que certains traités, notamment
ceux relatifs au maintien de la paix et à l'établissement de frontières sont par nature
destinés à assurer une stabilité de très longue durée voire quasi-permanente, les engagements
conventionnels cristallisant l'accord des États dans des domaines tels que la
coopération commerciale semblent plus susceptibles à évoluer à des intervalles relativement
réguliers. Lorsque ces engagements internationaux ne répondent plus aux
besoins de la société internationale ou aux intérêts des États concernés, ceux-ci tendent
à les adapter aux nouvelles circonstances35. Ce faisant, ils optent, en règle générale,
soit pour sortir de ces engagements en les dénonçant, soit pour les renégocier.
17. En effet, tel que la résume parfaitement G. Nolte :
La question générale des « traités dans le temps » reflète la tension entre les
exigences de stabilité et d'évolution dans le droit des traités. D'une part, c'est
généralement le but d'un traité et du droit des traités d'assurer une stabilité
dans des circonstances changeantes. Par ailleurs, les systèmes juridiques doivent
aussi permettre la prise en considération de développements ultérieurs afin de
garantir le respect véritable de l'accord des parties et la détermination de ses
limites36.
18. Ce passage met également l'accent sur le rapport entre le temps et le droit
des traités qui se manifeste dans la problématique de conciliation entre mutabilité
sociale et stabilité juridique soulignée par G. Scelle en 1948 :
La valeur sociale de la loi se mesure à la facilité même de sa révision. Elle
est par définition une création continue. D'un point de vue transcendental. On
pourrait prétendre que toute loi qui cesse d'être en accord avec la nécessité
sociale perd par là sa validité intrinsèque pour ne garder qu'une validité formelle.
C'est l'hypothèse et le principe nécessaire du bien légiféré. Il y a lieu d'insister
sur ce point, car il domine l'intégralité de cette étude. L'intégration de la société
internationale, la consistance de l'ordre juridique qui lui correspond, dépendent
de cette condition d'ordre sociologique. Sans un système de mise au point
continu de la règle de Droit conventionnelle, il n'y a plus que précarité dans les
relations internationales, sous les apparences d'une stabilité périlleuse37.
31. R. Kolb, The Law ofTreaties. An Introduction, Edward Elgar, 2016, p. 5.
32. J. Fernandez, Relations internationales, Dalloz, 2019, p. 312. Voir également P.-M. Dupuy,
Y. Kerbrat, Droit international public, 2018, op. cit., p. 303.
33. J. Fernandez, Relations internationales, op. cit., pp. 312-313. Voir également P.-M. Dupuy,
Y. Kerbrat, Droit international public, 2018, op. cit., p. 303.
34. Voir en ce sens P. Reuter, Introduction au droit des traités, op. cit., p. 24. Voir aussi G. Scelle,
« La révision dans les conventions générales », Annuaire IDI, 1948, p. 8.
35. Voir, en ce sens, R. Kolb note que : « [n]o human compact is meant to last for eternity. Things
evolve and change ; thus laws and treaties have to be adapted ». R. Kolb, The Law ofTreaties, op. cit.,
p. 193.
36. G. Nolte, « Les traités dans le temps, en particulier l'accord et la pratique ultérieurs », Annexe I,
ACDI, 2008, vol. II, partie 2, p. 163.
37. G. Scelle, « La révision dans les conventions générales », Annuaire IDI, vol. 2, 1948, p. 3.

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