Cours - Introduction au droit - 9e - 467

Pour aller plus loin
Le costume universitaire des enseignants en droit. - Unesociété ne vit pas quedetraditions, elle ne
vit pas, non plus, sans celles-ci. Le mot « tradition » vient du latin tradere, verbe qui signifie « donner »
ou « transmettre ». Il a, d'ailleurs, une signification juridique très précise en droit de la vente : la tradition
du bien vendu est la remise de la chose par le vendeur à l'acquéreur. Une tradition est, simplement, le
legs du passé au présent mais en contemplation de l'avenir. C'est la nappe phréatique qui renouvelle la
source ; c'est la mémoire qui empêche l'amnésie et ses errements ; c'est le point d'ancrage qui permet
au navire de prendre le large. Une tradition au sens exact de ce mot, comme le dieu romain Janus à
deux faces : elle regarde le passé pour se projeter dans l'avenir. Sinon, elle n'est que sclérose.
Depuis des années, on « invente » de toutes pièces de prétendues traditions qui n'en furent jamais.
Ainsi, les remises de diplômes n'ont quasiment jamais existé en France ; après tout, une tradition doit
bien naître un jour. Pourquoi pas ? Mais alors pourquoi se croire obligé d'importer une tradition anglosaxonne,
en particulier en revêtant les costumes universitaires de ces pays ? Les coutumes américaines
et anglaisessont trèsbelleset séduisantes. Nousne pouvons que les admirer. Cesnations sont nos
amies. Néanmoins pourquoi ne pas commencer par connaître la richesse des traditions françaises ? La
France n'est pas que le paysdu pain, desfromageset des vins...
Quasiment chaque pays dispose d'un riche éventail des costumes des « gens de robe » : les magistrats
et les universitaires. Un petit tour sur internet vous permettra de les découvrir. Un séjour Erasmus
(saisir l'occasion si elle se présente !) fera de même.
Le point commun de ces « gens de robe » est de porter, en certaines occasions, la « robe ». Celle-ci tient
à une origine religieuse facile à expliquer. Les clercs de l'Église catholique demeurèrent fidèles à l'habit
romain, ample comme la toge ou long comme la tunique, alors même que petit à petit l'habit se fit court
(le justaucorps de la Renaissance) puis, pour les hommes du moins, engendra la culotte et le pantalon.
Or, beaucoup d'universités furent créées par l'Église. Ainsi les premières universités françaises furent
fondées par des bulles (actes) pontificales : Paris (1215), Toulouse (1229), Montpellier (1289), Avignon (1303)
pour les premières. Ajoutons, ultérieurement, Aix (1409), Caen (1432) et bien d'autres.
Les universitaires étaient des clercs, y compris les étudiants, et y tenaient d'autant plus que ce privilège
leur permettait de relever de la justice ecclésiastique préférable à celle, sans concession, des souverains
ou des seigneurs locaux. Les fameuses « franchises universitaires » ont là leur origine : l'université était
un lieu dans lequel ne pénétraient pas les « gens du guet » (la police). Vieux souvenir : le recteur de
Paris, maître de la Sorbonne, dans les cérémonies est précédé d'un huissier portant l'épée, symbole de
ce qu'il a pouvoir de police en son domaine. Soyez rassuré, ladite épée demeure dans le fourreau d'un
huissier par ailleurs paisible...
De leur état d'origine, les universitaires ont conservé l'« habit long » autrement dit la « robe » (terme
préférable à celui de « toge »).
En réalité cet habit, à l'origine, comportait deux éléments séparés : un vêtement d'intérieuretun vêtement
d'extérieur. Le vêtement intérieur est la « simarre » qui n'est autre qu'une « soutane », ce mot
vient de l'italien sottana qui veut dire « vêtement de dessous » (par rapport aux vêtements mis pardessus).
Le vêtement extérieur que l'on rajoutait donc sur le premier était un manteau que l'on prenait
pour sortir, donc plus ample : c'est lui, à proprement parler, qui était la « robe ».
Devenu symbolique, le costume universitaire français, dont les lignes se sont fixées définitivement au
XVII
e siècle, finit par ne plus faire qu'un. Mais on discerne encore la simarre, laquelle est toujours noire,
avec une ceinture de même, et la robe dont la couleur varie selon les disciplines.
S'agissant des professeurs de droit (au sens générique du mot car, contrairement à ce qui est parfois
dit, les maîtres de conférences ont le même costume), il est le plus ancien des costumes académiques
puisque ce fut le roi Philippe IV le Bel qui donna à ces enseignants le droit de revêtir la même robe que
467

Cours - Introduction au droit - 9e

Table des matières de la publication Cours - Introduction au droit - 9e