Cours - Introduction au droit - 9e - 64

INTRODUCTION AU DROIT
Attention toutefois : en raison de la prohibition des arrêts de règlement163
,si, à l'occasion d'une autre
affaire, la même question de droit se posait, toute juridiction du fond saisie - y compris la seconde
juridiction de renvoi - serait libre de statuer en fait et en droit. Il ne faut pas confondre la faculté de
« rébellion » de la juridiction de renvoi dans une affaire donnée, avec la possibilité de « résistance »
d'une juridiction du fond saisie de la même question de droit, mais dans une autre affaire.
35 L'unification de l'interprétation des lois. - La Cour de cassation est dotée d'uneautoritédoctrinale
très marquée, on a même parlé « d'autorité morale »164
,pour unifier l'interprétation des lois et
harmoniser l'état de la jurisprudence. Placée au sommet de l'ordre judiciaire, auquel elle appartient pleinement,
la Cour de cassation a acquis au fil de son histoire la mission d'unifier l'interprétation des
textes de loi, en plus de veiller à leur bonne application, faisant d'elle - selon une expression courante
et richedesens - une « Cour régulatrice ». Cette supériorité hiérarchique de la Cour de cassation dans
l'unification et la création de la norme est accentuée par une « auto-réforme » enclenchée en 2014 par
son premier président Bertrand Louvel : avènement du contrôle de proportionnalité165
tion des arrêts avec une motivation développée et enrichie166
depuis la fin de l'année 2019167
; nouvelle rédac;mise
en
valeur et diffusion de la jurisprudence par une nouvelle classification des décisions selon une nomenclature
remaniée depuis juin 2021... Il fut même envisagé d'instaurer un filtrage plus fin des pourvois168
,
mais ce projet fut finalement repoussé (pour combien de temps ?) en raison des nombreuses critiques
suscitées169
et de statuer au fond
.C'est dire si ces
... Cela revient à faire de la Cour de cassation un
;d'autant que la Cour
. Or, parmi toutes ces innovations, l'une des plus marquantes est assurément la possibilité
introduite en matière civile par loi du 18 novembre 2016 de casser sans renvoi170
lorsque l'intérêt d'une bonne administration le justifie171
troisième degré de juridiction (d'autant qu'elle peut, dans toutes ces hypothèses, statuer sur les
dépens - commeun jugedu fond leferait - et que l'arrêt emporte exécution forcée)172
bouleversent profondément le modèle français de cassation174
transformations173
de cassation est aujourd'hui dotée de fonctions nouvelles.
V. Pour aller plus loin 15 : Comment lire et comprendre un arrêt de la Cour de cassation ?
163. C. civ., art. 5. V. infra,nº 52.
164. L. CADIET (dir.), op. cit.,spéc. p. 261.
165. V. Cass. 1re
civ., 4 déc. 2013, nº 12-26066.
166. M. DUGUÉ et J. TRAULLÉ, La motivation enrichie des arrêts rendus par la Cour de cassation: LexisNexis, 2023 ; A. MARTINEL, « La motivation enrichie
prend racine à la Cour de cassation », JCPG 2024, 172 ; S. PELLÉ, « La figure des arrêts de systématisation. Réflexions sur la motivation enrichie
des arrêts de la Cour de cassation », D.2023, p. 2144. Adde, Cour de cassation, Motivation enrichie, Guide de rédaction, sept. 2023 (en ligne).
Attention : motivation enrichie et développée ne doivent point être confondues, l'une et l'autre se distinguent.
167. V. « Les réformes de la motivation et de la rédaction des décisions de la Cour de cassation », site de la Cour de cassation (mis en ligne le
20 déc. 2019). Les arrêts sont rédigés dans un style direct, sans « attendu » ni phrase unique et les grandes parties composant l'arrêt sont clairement
identifiées. En outre, la Cour de cassation promet d'adopter une motivation enrichie s'agissant des arrêts de principe en expliquant
notamment la méthode d'interprétation utilisée et les solutions alternatives écartées.
168. B. LOUVEL, « La réforme du traitement des pourvois », site de la Cour de cassation (mis en ligne le 20 mars 2018).
169. B. HAFTEL et L. MAYER, « Pour un accès démocratique à la Cour de cassation », D. 2018, p. 1653 ; Th. LE BARS, « Menaces sur la cassation à la
française : des propositions de réforme consternantes », Gaz. Pal.,10 avr.2018, nº 14,p. 12.
170. A. TANI, « Cassation avec ou sans renvoi ? », RTDciv. 2023, p. 517.
171. COJ, art. L. 411-3. Sur ces questions, v. S.-L. TEXIER, « Réflexions sur le règlement du litige au fond par la Cour de cassation », D. 2017, p. 63 ;
L. CADIET, « La loi J21 et la Cour de cassation : la réforme avant la réforme ? », Procédures 2017, étude 3 ; E. PIWNICA, « Commentaire des dispositions
de la loi J21 relatives à la Cour de cassation », Gaz. Pal., 31 janv. 2017, nº 5, p. 76 ; Fr. FERRAND, « La Cour de cassation dans la loi de modernisation
de la justice du XXIe
siècle », JCPG 2016, 1407. Déjà, F. LUXEMBOURG, « La Cour de cassation, juge du fond », D. 2006, p. 2358 ; S.-L. TEXIER, « De la possibilité
pour la Cour de cassation de mettre fin au procès civil », D.2011, p. 116.
172. COJ, L. 411-3, al. 4 et 5.
173. J. BONNET, « La politique de rupture de la Cour de cassation », JCPG2019, 903.
174. Mais, selon le professeur Fr. ZENATI-CASTAING, les transformations actuelles et à venir de la Cour de cassation ne sont pas autant une rupture
qu'il paraît ; elles seraient le résultat d'un processus amorcé au XIXe
s. (« La juridictionnalisation de la Cour de cassation », RTDciv2016, p. 511).
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