Cours - Droit des régimes matrimoniaux, du PACS et du concubinage - 8e - 108

DROIT DES RÉGIMES MATRIMONIAUX, DU PACS ET DU CONCUBINAGE
d'un contrat exorbitant dans lequel le mari engloutit l'essentiel de son patrimoine mobilier au détriment
des enfants du premier lit153
.
Les choses sont plus compliquées lorsque le contrat souscrit l'était dans l'intérêt du souscripteur. Par
exemple, le mari, exerçant une profession libérale, avait ainsi préparé le financement de sa retraite. La
Cour de cassation a en tiré la conclusion dans une importante décision, le fameux arrêt Praslicka154
du 31 mars 1992 (que l'on ne confondra pas avec l'arrêt Authier- lesfruitsdes propressontdes
biens communs dès leur origine - rendu lemêmejour) qu'il fallait rapporter à la communauté la
valeur du contrat au jour de la dissolution155
. La solution, convenons-en, est plus aisée à énoncer qu'à
réaliser156
car cela signifie que l'on est en mesure de calculer « la valeur de rachat » d'un contrat
: celle par capitalisation et celle par répartition.
d'assurance-vie. C'est ici qu'intervient la distinction entre deux grandes catégories d'assurance sur la
vie157
L'assurance par capitalisation (comme son nom l'indique) fonctionne selon des modalités (quant au
financement) proches d'un contrat d'épargne.L'assuré versedes primes (lenom ici neconvient d'ailleurs
pas très bien) qui vont fructifier. Lors du dénouement du contrat, le bénéficiaire recevra le
capital constitué ainsi que les intérêts qu'il aura engendrés. Le contrat repose donc sur un investissement.
L'assurance
par répartition fonctionne selon des données essentiellement démographiques : une
classe d'âge plus jeune paye pour celle qui la devance. On sait que c'est ce système est à la base
de la Sécurité sociale française. Les primes (qui sont là de véritables primes) versées sont immédiatement
utilisées par l'assureur pour couvrir les garanties dues présentement. Leur versement donne
simplement des droits au souscripteur quant à l'avenir. Il est inutile de préciser que ces primes
appartiennent définitivement à l'assureur et sont à fonds perdus. Le contrat repose donc sur une
contribution.
153. Cass. 1re civ., 8mars 2005, Bull. civ. I, nº 114 ; D. 2005. IR. 914 ; JCP2005.I.163, nº 14, obs. Tisserand ; JCP2005.II.10146, note Robineau ; Cass. 1re
12 nov. 2009, JurisDatanº 050290 ; Dr. fam. 2010., nº 7, et la note.
154. Cass. 1re
civ.,
civ., 31 mars 1992, nº 90-16343 ; Bull. civ. I, nº 95, JCP1992.I.3614, obs. Ph. Simler ; JCP1993.II.22059, obs. B. Abry ; Defrénois, 1992,
art. 35439, obs. G. Champenois ; RTDciv., 1992. 632, obs. Lucet et Vareille, D., 1993, somm. 219, obs. Lucet : « Vu l'article 1401 du Code civil, ensemble,
l'article L. 32-13 du Code des assurances ; Attendu qu'au cours de la communauté, M. X... a souscrit une assurance-vie mixte dont le capital lui a
été versé, à la date d'échéance, postérieurement à l'assignation en divorce ; Attendu que pour décider qu'il ne devait pas récompense à la
communauté de ce chef, la cour d'appel, après avoir affirmé que ce capital n'est pas tombé en communauté, énonce que les primes de cette
assurance qui sont élevées à 565,52 francs par mois seulement, n'étaient pas disproportionnées par rapport au salaire de M. X..., supérieur
à 20 000 francs par mois ; Attendu qu'en se déterminant ainsi, après avoir retenu que les primes de cette assurance en cas de vie du souscripteur
avaient été payées avec des fonds communs jusqu'à la dissolution de la communauté, si bien que la valeur de la police faisait partie de
l'actif de celle-ci, et après avoir constaté que M. X... avait reçu le capital prévu au contrat après la dissolution, ce qui établissait que les droits
nés de ce contrat lui avaient été attribués, de sorte qu'il devait être tenu compte dans les opérations de partage de la valeur du contrat au
jour de la dissolution de la communauté, la cour d'appel a violé les textes susvisés (...) ; par ces motifs, casse et annule ».
155. Cette valeur de rachat est également portée à l'actif de communauté sur le plan fiscal depuis la réponse ministérielle Bacquet, nº 26231,
JOAN29juin 2010. 7283 ; JACQUIN, « Assurance-vie et régime de communauté. Proposition de solutions aux conséquences de la réponse ministérielle
Bacquet », JCPN 2010. Et 1269 ; CONVERS, « Contrats d'assurance-vie non dénoués et communauté : optimisation », JCPN 2010. Et. 1384 s. ; et
antérieurement : AULAGNIER, « Le droitde rachatd'un contrat d'assurance mis hors communauté par décision du ministre des Finances », Dr. et
patr. nov. 1999. 30 ; Ph. DELMAS SAINT-HILAIRE, « Assurance-vie : Praslicka... encore et toujours ! », RJPFmai 2010. 27, à propos de Rép. Min. nº 65745,
JOANQ2 févr. 2010 ; F. SAUVAGE, « Réponse ministérielle Bacquet : retour vers un futur fiscalement désenchanté ! », RD bancaire et fin. 2013, nº 3,
comm. 100.
156. J. BIGOT, « Clair-obscur sur l'assurance-vie (de l'arrêt Pelletier à l'arrêt Praslicka) », JCP1993.I.3718 ; J. KULLMANN, « Contrats d'assurance sur la vie :
la chance de gain ou de perte », D. 1996, chr. 25 ; l'excellent article de J. AULAGNIER,« L'assurance-vie est-elle un contrat d'assurance ? », Dr. etpatr.,
déc. 1996, p. 44 ; LUCET, « Le sort des contrats d'assurance-vie non dénoués lors de la dissolution de la communauté », Defrénois1993.I.3718 ;
GHESTIN,« L'incidence du décès du conjoint de l'assuré sur l'assurance-vie », JCP1995.I.3881 ; GRIMALDI,« Réflexions sur l'assurance-vie et le droit
patrimonial de la famille », Defrénois1994.35841 ;A. TRESCASES, Assurances et droit des régimesmatrimoniaux,éd. Defrénois,2007, préf.R. Cabrillac.
157. Sur la qualification de contrats d'assurance : Ch.mixte,23 nov.2004 (4 arrêts) ; B. Ch. mixte,nº 4 ; D. 2005. 1905, et la note ; JCP2005.I.128,
obs. Simler ;et 187,Le Guidec ; RTDciv. 2005. 435, Grimaldi ; J. GHESTIN, « La Cour de cassation s'est prononcée contre la requalification des contrats
d'assurance-vie en contrats de capitalisation », JCP2005.I.111 ; F. BERTOUT, « Les arrêts de la Cour de cassation de nov. 2004 sur la qualification des
contrats d'assurance », RDbanc. fin. janv.-févr. 2005. 36 ; Ph. GROSJEAN, « Les nouvellesfrontièresde l'assurance-vie », JCPN 2005. 1003.
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