Droit civil - Droit des sûretés - 17e - 303

PREMIÈRES VUES SUR LE DROIT DE RÉTENTION
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Il est opposable aux autres créanciers, chirographaires ou munis de sûretés,
alors même qu'il n'a pas à être publié82, et au vendeur de la chose bénéficiant
d'une clause de réserve de propriété, lorsque le rétenteur est un créancier
gagiste83
.
.Il l'est aussi au débiteur, quand bien même il ferait l'objet d'une procédure
collective (C. com., art. L. 622-7-II et L. 642-20-1)84
Le droit de rétention est encore opposable au tiers acquéreur de la chose
détenue85
. Si le droit de propriété est né après la détention du créancier, parce
que le tiers a acheté le bien retenu au débiteur, l'opposabilité du droit de rétention
à ce tiers acquéreur s'impose car il n'a pu acquérir plus de droits que n'en avait
son auteur et qu'en pratique, ainsi que l'écrivaient Baudry-Lacantinerie et de Loynes,
« cette garantie deviendrait illusoire, si le droit de rétention n'était pas opposable
aux tiers. Il suffirait au propriétaire d'aliéner... pour que le droit de rétention
s'évanouisse »86
. Il en est ainsi même si l'acquéreur en a payé le prix ou si son
vendeur est en liquidation judiciaire87. Le rétenteur refusera donc de livrer la
chose tant qu'il ne sera pas payé. Ainsi, en pratique, l'acquéreur, bien qu'il ne
soit pas juridiquement obligé de payer le rétenteur, n'aura d'autre choix que de
le désintéresser s'il veut obtenir la délivrance de la chose.
82. Cass. 3e civ., 16 déc. 1998, Bull. civ. III, no
253 ; RDI 1999.293, obs. Théry : « l'opposabilité du
droit de rétention n'étant pas subordonnée à la publicité foncière... » ; en l'espèce, le bénéficiaire
d'une promesse de vente exerce son droit de rétention sur l'immeuble, contre un créancier hypothécaire,
afin d'obtenir restitution du prix payé d'avance. L'arrêt signifie-t-il que, pour la 3e
civile, le droit de rétention n'est pas un droit réel ?
83. Cass. com., 3 oct. 1989 ; Bull. civ. IV, no
chambre
244, JCP G, 90.21454, n. Behar-Touchais : conflit entre
189 ; v. ég. infra,
un créancier gagiste (commissionnaire de transport) et le vendeur qui s'est réservé la propriété ; le
premier l'emporte, s'il est de bonne foi ; Cass. com., 11 juin 1968, Bull. civ. IV, no
no 522. La solution repose sur l'ancien article 2279 du C. civ., devenu aujourd'hui l'art. 2276 du
C. civ., appliqué au gagiste. Il n'est pas sûr qu'elle vaudrait lorsque le rétenteur ne peut invoquer ce
texte ; v. cep. les arrêts cités à la note précédente.
84. V. infra,no
300. Déjà dans le cas de la suspension provisoire des poursuites : * Toulouse,
11 févr. 1977, sté Sittex et autres, D., 78.206, n. crit. J. Mestre ; JCP G, 78.II.18892, n. Verschaeve ;
Gaz. Pal., 13 juin : « le droit de rétention ne confère ni droit de suite, ni droit de préférence ; il n'est
pas un privilège véritable mais une sûreté de fait à laquelle n'est pas applicable l'article 16 de l'ordonnance
du 23 sept. 1967... ; les délais prévus par l'article 27 de l'ordonnance préc., qui sont des délais
de grâce, ne suspendent pas l'exigibilité de la dette et leur effet suspensif ne s'étend pas au droit de
rétention ». En l'espèce, une entreprise de filature avait confié dix tonnes de fil à un façonnier soustraitant,
afin qu'il en fasse des tissages. Le façonnier n'est pas payé de ses premières livraisons ; il a le
droit de retenir les cinq tonnes de fil qui lui restent tant que le payement n'est pas effectué, bien que
son contractant bénéficie d'une suspension provisoire des poursuites. La solution compromet les chances
de redressement de l'entreprise de filature si elle est en difficulté ; la solution contraire aurait transporté
la ruine de l'entrepreneur au sous-traitant (le façonnier). C'est le problème permanent de la « faillite
» : est-il juste d'habiller Paul en déshabillant Jacques ?
85. Cass. civ., 8 déc. 1868, DP 1868, DP 1869, I, 76 : « Le droit de rétention du dépositaire est
opposable au tiers qui a acquis la chose déposée » ; Cass. com., 14 avr. 1992, Bull. civ. IV, no
164 ;
D. 1993, som. p. 298, obs. F. Pérochon : le vendeur impayé d'un camion peut refuser de délivrer au
sous-acquéreur, qui a pourtant payé le revendeur, les pièces administratives relatives à ce véhicule ;
Cass. com., 31 mai 1994, Bull. civ. IV, no
1996.II.22622, n. Ch. Jubault ; Cass. 1re
178 ; JCP G,
195,
2009, no 44, 380, n. A. Aynès ; D. 2010, p. 302, n. N. Borga ; JCPG 2010, no 40, 100, no 7, obs.
M. Cabrillac ; JCP G, no 48, 23 nov. 2009, 492, no 17, obs. Ph. Delebecque ; Dr. et patr. no
sept. 2010, p. 91, obs. Ph. Dupichot ; Banque et droit,no 128, nov.-déc. 2009, p. 64 et s., obs.
N. Rontchevsky.
86. BAUDRY-LACANTINERIE et DELOYNES, Traité théorique et pratique de droit civil - Du nantissement,
des privilèges et hypothèques,3e éd, 1906, nº 227.
87. Cass. 1re civ., 24 sept. 2009, nº 08-10152, Bull. civ. I, nº 178 ; JCPG 2009, nº 44, 380, note
A. Aynès ; JCPG 2009, nº 48, 492, nº 17, obs. Ph. Delebecque.
195 ; JCPG 1994.I.3807, no 21, obs. Ph. Delebecque ; JCPG
civ., 24 sept. 2009, no 08-10152, Bull. civ. I, no
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