Droit civil - Droit des sûretés - 17e - 41

n TITRE I n
CAUTIONNEMENT
25. Définition. - Le cautionnement1
.
est un contrat unilatéral par lequel la
caution2 s'engage envers un créancier à exécuter l'obligation au cas où le débiteur
ne le ferait pas3
Cette définition postule que le débiteur et la caution sont deux personnes différentes. Et en
effet, on ne peut en principe être à la fois caution et débiteur principal de la même dette4
.
Mais la création de l'EIRL par la loi du 15 juin 2010 (C. com., anc. art. L. 526-6 à L. 526-21),
auquel a succédé, depuis le 15 mai 2022, le régime légal du patrimoine professionnel de l'entrepreneur
individuel (C. com., nouv. art. L. 526-22 et s.), a renouvelé la question puisqu'une
même personne peut désormais être titulaire de plusieurs patrimoines. Si elle donne à un créancier
de l'un des patrimoines un droit de poursuite sur l'autre, l'altérité des patrimoines-gages
suffit-elle à qualifier le contrat de cautionnement5
? Sous l'empire du régime de l'EIRL, la possibilité
d'un tel « cautionnement » était douteuse, car cela aboutissait à supprimer la séparation de
patrimoines en faveur d'un créancier ; or, seules les renonciations générales à la séparation
étaient envisagées par la loi, et le principe suivant lequel les créanciers professionnels ont pour
« seul » gage le patrimoine affecté (art. anc. L. 526-12) pouvait paraître impératif6
. Désormais,
sous l'empire du mécanisme légal et automatique du patrimoine professionnel de l'entrepreneur
individuel7
, la possibilité de renoncer à la séparation des patrimoines au profit d'un créancier en
particulier est expressément admise (C. com., art. L. 526-25), bien que strictement encadrée en
la forme et sur le fond (C. com., art. D. 526-28 et s.). Mais la possibilité de constituer un véritable
cautionnement d'un patrimoine par un autre est expressément exclue (C. com. art. L. 526-22,
al. 3 : « La distinction des patrimoines personnel et professionnel de l'entrepreneur individuel
ne l'autorise pas à se porter caution en garantie d'une dette dont il est débiteur principal »). Se
trouve ainsi consacrée l'exigence que le débiteur et la caution soient deux personnes différentes.
(cité : SIMLER); Lamy Droit des sûretés, coll. Lamy Droit civil ; Le cautionnement, Regards croisés Université-Notariat,Ve
1.
Ph. SIMLER, Cautionnement, garanties autonomes, garanties indemnitaires, Litec, 4e
Rencontres de l'ARNU, Nîmes, févr. 2008, Dr. et patr. 2008, no
172, p. 45.
2. Étymologie : du latin cavere : être sur ses gardes ; d'où cautio : précaution ; par suite, garantie.
L'utilisation du terme caution dans un sens technique ne date que de la fin du Moyen Âge. Les
Romains, qui mettaient l'accent sur le caractère personnel de l'engagement plutôt que sur la garantie
qu'il donnait au créancier, utilisaient les termes : fide promissor puis fidejussor. Dans le langage courant,
et même dans la langue juridique (ex. : CPP, art. 130-11o
éd., 2008
), caution et cautionnement désignent
parfois tout autre chose : la somme d'argent versée d'avance à titre de garantie au créancier. Il s'agit
d'un dépôt de garantie, qui constitue un gage ou une fiducie, sûreté réelle, n'ayant aucun rapport avec
le contrat de cautionnement.
3. Définition désormais consacrée au nouvel article 2288 du Code civil : « Le cautionnement est le
contrat par lequel une caution s'oblige envers le créancier à payer la dette du débiteur en cas de
défaillance de celui-ci ».
4. Cass. com., 28 avr. 1964, Bull. civ. IV, no
215 : « Celui qui est débiteur d'une obligation à titre
principal ne peut être tenu de la même obligation comme caution ».
5. Contra, Ph. SIMLER, « EIRL et communauté de biens entre époux », JCP 2011, 11.
6. V. pour la discussion, H. SYNVET et A. GAUDEMET, « EIRL et sûretés », LPA, 28 avr. 2011, p. 32, sp.
nos 28 et s. ; N. JULIAN, La cession de patrimoine, préf. R. Mortier, Nouv. Bibl. de thèses, Vol. 174, Dalloz,
2018, nº 458 ; Ph. THERY,« L'accès au crédit de l'EIRL : garantir et exécuter », Defrénois 2011, 569 ;
A. AYNÈS, « EIRL : La séparation des patrimoines à l'épreuve du droit des sûretés », RLDC sept. 2011.
7. L. nº 2022-172 du 14 février 2022 en faveur de l'activité professionnelle indépendante, JO
15 février 2022.
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