Droit et Société - L'État post-moderne - 6e - 229

Chapitre 3 nLa redéfinition du droit politique
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finira par l'emporter, conduisant à concevoir l'État de droit comme un
type particulier d'État, soumis à un « régime de droit », c'est-à-dire dont
l'action est entièrement encadrée et régie par le droit : ses divers
organes, et le Parlement aussi, ne peuvent agir qu'en vertu d'une
habilitation juridique et faire usage seulement des moyens autorisés
par le droit ; l'État de droit se présente ainsi sous l'aspect de la
hiérarchie des normes, dont le respect doit être garanti, à tous les
niveaux, par le contrôle d'un juge indépendant. L'objectif (politique) est
déjà alors d'encadrer le pouvoir des représentants, la théorie de l'État
de droit apportant une caution théorique et offrant une voie pratique
(le contrôle de constitutionnalité) à la limitation de la toute puissance
des élus.
Cette conception formelle, qui contraste avec la théorie britannique
de la Rule oflaw (L . HEUSCHLING, 2002), a été, après la Seconde guerre
mondiale, intégrée dans une perspective plus large : il est apparu en
effet, à la suite de l'effondrement du fascisme et du national-socialisme,
que l'État de droit ne saurait être réduit à un simple agencement
hiérarchisé de normes, sans que soit pris en compte le contenu de
celles-ci. L'État de droit n'est pas l'État de n'importe quel droit : sa
construction est en réalité indissociable d'un substrat libéral, constitué
par des principes et des valeurs. La conception formelle de l'État de
droit va se trouver dès lors relayée par une conception substantielle,
qui l'englobe et la dépasse, assurant du même coup un rapprochement
avec la Rule oflaw britannique.
Cet État de droit substantiel comporte deux aspects. D'abord, l'idée
que la règle de droit est tenue de présenter certains attributs
intrinsèques répondant à l'impératif de sécurité juridique : elle doit
constituer pour les destinataires un cadre clair, précis, stable, qui leur
apporte les éléments de certitude nécessaires et leur donne la
possibilité de prévoir les conséquences de leurs actes ; garantie contre
l'arbitraire, la sécurité juridique apparaît comme une exigence
fondamentale de l'État de droit. Ensuite, et surtout, la reconnaissance
d'un ensemble de « droits fondamentaux », inscrits dans des textes de
valeur juridique supérieure : la hiérarchie des normes devient un
moyen de protection de ces droits ; les deux dimensions, formelle et
substantielle, de l'État de droit sont dès lors conçues comme
indissociables.
L'État de droit ainsi reproblématisé s'est trouvé à partir des
années 1980 investi d'une portée nouvelle, en étant érigé à la hauteur
d'un standard international (D. MOCKLE, 2002) : cette hégémonie était
cependant plus apparente que réelle et dans les pays libéraux eux
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