LA PORTÉE TERRITORIALE DE L'IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS Il reste à examiner, au titre des règles relatives aux groupes internationaux, celles relatives à la sous-imposition des groupes internationaux. §3. LES RÈGLES RELATIVES À LA SOUS-IMPOSITION DES GROUPES INTERNATIONAUX 807 Nous n'avons envisagé jusqu'ici la fiscalité des groupes internationaux que sous un angle « positif » : la reconnaissance du groupe y était conçue comme un moyen d'octroyer à celui-ci certains avantages en vue de stimuler le développement économique. Il arrive cependant que la reconnaissance du groupe soit conçue de façon très différente, comme un instrument permettant d'éviter que certaines sociétés ne délocalisent certaines activités dans des filiales établies dans des pays étrangers à fiscalité faible à la seule fin d'échapper à l'impôt dans leur État d'origine. Certains groupes peuvent en effet être tentés, lorsque leur société mère est établie dans un État à fiscalité élevée, de créer une ou plusieurs filiales dans des États stratégiquement choisis pour leur fiscalité plus faible afin d'y transférer certaines activités productives de revenus. Ceux-ci y sont alors soumis à un impôt nul ou très faible et peuvent être thésaurisés jusqu'à leur distribution à la société mère. Ce type de montage se révèle particulièrement intéressant lorsque cette distribution est à son tour exonérée en totalité ou presque grâce à l'application du régime des sociétés mères. La combinaison entre les différents systèmes fiscaux aboutit alors à une double exonération de fait de certains bénéfices. Pour limiter les pertes budgétaires pouvant résulter de la diffusion à grande échelle de ce type de structure, plusieurs solutions sont envisageables. La première consiste à neutraliser fiscalement le transfert d'actifs au profit d'entités étrangères établies dans des États à fiscalité privilégiée. C'est ce que fait, par exemple, l'article 238 bis-0 I du Code général des impôts lorsqu'il énonce que les entreprises sont imposables annuellement sur les produits des actifs qu'elles ont transférés hors de France entre les mains d'une entité chargée de gérer ces actifs dans leur intérêt ou d'assumer pour leur compte un engagement existant ou futur282 . Tout se passe ainsi comme si les actifs en question avaient continué d'être gérés par l'entreprise française redevable de l'impôt sur les sociétés. Ce type de règle est intéressant mais ne peut pas régler tous les problèmes posés par l'utilisation des paradis fiscaux. Elle frappe un transfert d'actifs hors de France mais ne peut pas appréhender le cas où une société française crée ex nihilo une filiale étrangère dans un État à fiscalité privilégiée. On comprend à la lumière de cette observation l'intérêt présenté par un dispositif plus ambitieux reposant sur l'adoption de règles relatives aux sociétés étrangères contrôlées. Le mécanisme mis en place consiste à faire comme si la filiale ■ 282. Ce texte a été conçu pour toucher notamment certaines opérations financières telles que les émissions restructurées de titres subordonnés à durée indéterminée (TSDI) et les opérations de défaisance de dettes (transferts d'actifs à charge pour le tiers d'assumer le service d'une dette incombant à l'auteur du transfert). Première partie : L'imposition des bénéfices des entreprises 645