Manuel - Droit civil. Tome 2 - 33e - 156

DROIT CIVIL : RÉGIMES MATRIMONIAUX - SUCCESSIONS - LIBÉRALITÉS
Section 2
Clause de prélèvement moyennant
indemnité
291. Clause dite : « Clause commerciale ». - Le contrat de mariage
prévoit qu'un époux pourra, s'il survit, prendre un bien déterminé dans
la succession du prémourant, à charge de payer aux héritiers une indemnité
correspondant à la valeur de ce bien.
Une telle clause présente un intérêt particulier lorsque le bien dont le prélèvement
est ainsi prévu est un fonds de commerce appartenant à un des
époux : le conjoint survivant pourra, grâce à la faculté de prélèvement, continuer
l'exploitation du fonds. D'où l'expression couramment utilisée de
« clause commerciale ». Mais une telle clause peut viser d'autres biens (un
logement, un domaine rural, etc.).
292. Validité. - Prévoir au profit du conjoint la faculté de prélèvement
d'un bien propre constitue, de la part du propriétaire du bien, un
pacte sur succession future. Antérieurement à la loi du 13juillet 1965, il
était dérogé à la prohibition des pactes sur succession future pour les
donations de biens à venir entre époux, ce qui validait la clause de prélèvement
à titre gratuit, mais rien n'était prévu au sujet de la clause de prélèvement
moyennant indemnité. Aussi, selon la jurisprudence, une telle
clause était nulle. La loi du 13juillet 1965 a heureusement comblé la
lacune des textes antérieurs en étendant à la clause dite « commerciale »
l'exception à la prohibition des pactes sur succession future (art. 1390).
Ces clauses sont donc valables (la validation a été étendue rétroactivement
aux contrats de mariage antérieurs : loi du 13juillet 1965, art. 20).
293. Fonctionnement. - Les articles 1390, 1391 et 1392 précisent le
mécanisme, qui est semblable à celui du prélèvement des biens communs
moyennant indemnité (v. supra,nos
242 et s.). Il suffit de noter quelques
particularités.
- La clause ne peut jouer qu'en cas de décès de l'époux propriétaire (alors
que le prélèvement de biens communs moyennant indemnité peut être
prévu pour tous les cas de dissolution du régime matrimonial).
- L'évaluation du bien, en vue de calculer le montant de l'indemnité, a lieu
au jour où le bénéficiaire use de la faculté qui lui est offerte (pour le prélèvement
de biens communs, il s'agit de la date du partage). La loi précise que le
contrat de mariage peut adopter d'autres règles d'évaluation ; mais s'il en
résulte un avantage pour le conjoint, cet avantage est traité comme une libéralité,
éventuellement réductible pour atteinte à la réserve (sur la réserve et
la réduction, v. infra,nos
668 et s.).
294. Nature de l'opération. - Si le conjoint n'est pas héritier du prédécédé (en raison
692 et s.), l'opération s'analyse en une vente, faite en exécution d'une promesse figudes
libéralités consenties par celui-ci, quand le conjoint n'est pas réservataire - v. infra,
nos
rant au contrat de mariage. Si le conjoint est héritier du prédécédé, le prélèvement est
une opération de partage (partage successoral) : art. 1392, al. 2.
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