Revue - Revue française de Finances Publiques n°168-2024 - 106

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Revue Française de Finances Publiques
les travaux. Nous sommes à la limite du chaos. L'individualisme
prévaut et puisque les acteurs politiques ont de moins en moins prise
sur la réalité, priorité est donnée à la communication.
Le Parlement vote les lois et contrôle l'action du gouvernement et
des administrations publiques. Si le contrôle budgétaire a progressé,
notamment grâce au « printemps de l'évaluation », à l'initiative d'Éric
Woerth et de Laurent Saint-Martin, il subsiste de larges marges de
progression. Gérard Sutter n'a pas manqué de relever les avancées
significatives, le recours à des experts extérieurs. L'idée de doter le
Parlement d'une autonomie d'expertise, à l'exemple du CBO américain,
n'a jamais pu prendre corps au motif que la Cour des comptes, en
application de l'article 47-2 de la Constitution « assiste » le Parlement
dans sa mission de contrôle de l'action du gouvernement. Le principe
d'équidistance de la Cour entre le gouvernement et le Parlement doit
être mis en question du fait du va-et-vient de ses membres entre la Cour
et les cabinets ministériels. Mon ami Michel Bouvard me pardonnera
cette digression.
Au fond, il faut s'interroger sur le financement du Parlement. Ce qui
implique la conception d'un projet, d'une vision des défis à assumer,
d'une stratégie pour répondre aux attentes des citoyens et de la nation.
En matière financière et budgétaire, j'observe que les dérives se
perpétuent, laissant à penser que déficits chroniques et emballement
de la dette sont une fatalité inexorable. Si par ailleurs, nous portons
attention au déséquilibre de notre balance commerciale, signe que
nous produisons sensiblement moins que ce que nous consommons,
nous mesurons la vulnérabilité de notre communauté nationale. Nous
avons un impératif de lucidité pour nous extraire de nos illusions et
réhabiliter le principe de réalité.
À cet égard, je voudrais souligner la lisibilité si singulière des
redditions de comptes publics et m'étonner de notre incapacité à
remettre en cause nos procédures et méthodes. Nommé ministre de
l'Économie et des Finances, il y aura bientôt 30 ans, j'ai pris conscience
en arrivant à Bercy que j'étais dans la situation d'un directeur financier
ne disposant que d'une comptabilité de caisse, point de bilan ni compte
de résultat, privé évidemment de toute vision consolidée. Pour y
porter remède, j'avais lancé une mission visant à instituer une gestion
patrimoniale de l'État. Dans ses souvenirs d'inspecteur des finances,
publiés en 2000 sous le titre « de Rivoli à Bercy », Guy Delorme va
droit au but. « Le dossier le plus prometteur pour l'avenir des finances
de l'État et qui m'a occupé le plus longtemps, portait sur la comptabilité
patrimoniale de l'État ». Les orientations prescrites par le groupe de
RFFP n° 168 - Novembre 2024
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