Revue - Revue française de Finances Publiques n°168-2024 - 87

La difficile évaluation du travail parlementaire
67
Sénateurs.fr, sont reproduits par nombre d'élus dans leurs propres
publications, la question doit être à nouveau posée.
Elle l'a été dès 2012 lorsqu'à l'occasion de l'université d'été du parti
socialiste le Ministre délégué aux relations avec le Parlement Alain
Vidalies dénonce « les effets dangereux voire pernicieux » du site,
ouvrant une polémique marquée par une rencontre entre le ministre
et les animateurs de Regards citoyens qui consacra leur désaccord sur
la manière d'évaluer le travail des élus. Les responsables du site vont
alors écrire sur ce dernier « préciser à l'opinion publique qu'il s'agit
d'un compteur et non pas d'un indice qualitatif».
De fait le problème viendrait de l'interprétation qui en est faite au
travers des classements par la presse.
Pour Alain Vidalies, il y avait un risque, qu'il constatait déjà, que dans
le seul but d'améliorer les statistiques individuelles et de progresser dans
les classements on aboutisse à une inflation des amendements comme
des questions écrites et à un engorgement, sans pour autant apporter de
valeur ajoutée au travail législatif. Le président de la commission des
lois du Sénat apportait sa contribution à ce même débat en mettant en
avant qu'un rapport de 900 pages pouvait être comptabilisé de manière
identique à un rapport de 3 pages. Le rapport du projet Arcadie,
observatoire de la vie parlementaire, quelques années plus tard, va plus
loin et s'interroge sur le fond. Les questions écrites présentées sur le
site de l'Assemblée nationale comme l'un des éléments du contrôle
du gouvernement peuvent-elles être vraiment ainsi catégorisées, de
surcroît la multiplication des questions tend à confirmer la tentation
relevée par Alain Vidalies pour un certain nombre de parlementaires
de faire du chiffre. Jean Jacques Urvoas évoque le risque que cette
quantification du travail des députés aboutisse « à une véritable
fétichisation du chiffre ». En octobre 2015, l'Assemblée nationale met
fin à cette dérive en contingentant le nombre de questions pour chaque
élu. Le rapport observe aussi que le site ne prend pas en compte les
travaux menés dans des enceintes moins visibles « délégations » ou
« office interparlementaires des choix scientifiques et technologiques »
dont chacun s'accorde à reconnaître l'expertise dans des débats de fond
comme sur la bioéthique, la politique énergétique par exemple. On
peut aussi citer la mission d'évaluation et de contrôle de la commission
des finances, son homologue de la commission des affaires sociales
ou enfin la mission LOLF. De même le site ignore que le nombre de
présences des parlementaires en commission est directement lié à la
fréquence de réunions de ces dernières avec de fortes amplitudes entre
RFFP n° 168 - Novembre 2024
Revue - Revue française de Finances Publiques n°168-2024

Table des matières de la publication Revue - Revue française de Finances Publiques n°168-2024
