Revue - Les Cahiers de l'Arbitrage N°2 - 2024 - 114

CASE LAW
que l'exercice du retrait litigieux pourrait relever de la compétence du juge de
l'exécution.
La RDC s'est pourvue en cassation et le 28 février 2024, la Cour de cassation
a jugé, après une motivation particulièrement détaillée, que :
« 21. Dès lors, il y a lieu de juger désormais qu'est irrecevable une demande
d'exercice d'un droit au retrait litigieux formée devant [le juge du recours]
comme n'entrant pas dans les cas prévus à l'article 1520 du Code de procédure
civile. »
Elle a ainsi opéré un revirement radical avec sa position de 2018 : alors qu'elle
s'était contentée d'une motivation assez laconique d'une phrase en 2018, la Cour
de cassation a rendu cette fois deux décisions motivées, écartant la recevabilité de
2018 au profit de l'irrecevabilité de la demande d'exercice de retrait litigieux devant
les juges du contrôle et de la compétence exclusive du juge de l'exécution... sans
pour autant donner raison à la cour d'appel, dont elle a cassé les décisions pour
avoir retenu le « rejet » et non l'« irrecevabilité » de la demande de retrait litigieux.
Cette saga semble donc avoir pris fin par un « mea culpa » de la Cour de
cassation (I). Pour autant, la lecture de ces décisions laisse un goût de mea culpa
en « demi‑teinte » (II) et en « demi‑fond » (III).
I. - Le mea culpa de la Cour de cassation
Nombreux auteurs ont dû se réjouir de ce revirement de la Cour de cassation.
En effet, sa position retenue en 2018 avait suscité de vives critiques doctrinales,
en ce qu'elle reconnaissait le juge du recours compétent pour trancher la question
de l'exercice du droit de retrait litigieux au seul motif que « l'exercice du retrait
litigieux affect[ait] l'exécution de la sentence » 11
.
Certains avaient considéré qu'une telle position revenait à faire « voler en éclat
le caractère limitatif des cas d'ouverture du recours » 12
ou encore que la Cour de
cassation avait touché aux « sacro-saints » 13
la sentence 14
cas d'ouverture des recours contre
, ce qui aurait notamment pour conséquence de porter atteinte à
l'attractivité de Paris comme « friendly place » de l'arbitrage. En effet, sous l'empire
des arrêts de 2018, le juge du recours devenait aussi le juge du retrait litigieux, au
risque d'affecter l'efficacité de la sentence. Cette ouverture au retrait litigieux de la
compétence des juges du recours contre la sentence était d'autant plus surprenante
que, comme le soulignait un auteur, le retrait litigieux est « un mécanisme qui
vient interférer de manière assez sérieuse avec le droit des contrats », avec des
« effets pour le moins radicaux [...] » 15
, ce qui avait amené la Cour de cassation à
11. Cass. 1re civ., 28 février 2018, n° 16‑22.126 et n° 16‑22.112.
12. J. Jourdan‑Marques, « Chronique d'arbitrage : le juge anglais, juge universel de l'arbitrage ? »,
Dalloz actualité, 21 mars 2024.
13. Th. Clay, D. 2018.2448.
14. J. Jourdan‑Marques, AJ Contrat 2018.187 ; Th. Clay, D. 2018.2448 ; M. Laazouzi, Rev. arb.
2018.390 ; P‑Y. Gautier, RTD civ. 2018.431 ; v. contra L. Weiller, Procédures 2018.148 ; H. Barbier,
RTD civ. 2018. 411 ; C. Seraglini, JCP E, 2019.1036 ; P. Casson, JCP 2018.311.
15. P. Pinsolle, Clunet 2018.1201.
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