Revue - Les Cahiers de l'Arbitrage N°3 - 2024 - 138

CASE LAW
de la sentence arbitrale et décide soit de renvoyer le litige au tribunal administratif
compétent pour en connaître 213
, soit d'évoquer l'affaire et de statuer lui-même
sur les réclamations présentées devant le tribunal arbitral. Si le litige est arbitrable
ensuite. Il peut rejeter le recours dirigé contre la sentence 214
ou partiellement 215
ou l'annuler totalement
. Dans un tel cas, il ne peut ensuite régler lui-même l'affaire au
fond que si la convention d'arbitrage l'a prévu ou s'il est invité à le faire par les
deux parties. On note une différence avec le droit commun de l'arbitrage puisque
le Code de procédure civile prévoit que le juge étatique, s'il annule la sentence,
« statue sur le fond dans les limites de la mission de l'arbitre, sauf volonté contraire
des parties » 216
. Dans le cas contraire, il revient aux parties de déterminer si elles
entendent de nouveau porter leur litige contractuel devant un tribunal arbitral,
à moins qu'elles ne décident conjointement de saisir le tribunal administratif
compétent. Sur ce dernier point, il nous semble toutefois difficile d'admettre que
l'annulation de la sentence emporte, par ricochet, annulation du compromis. Les
parties sont toujours liées par le compromis, elles n'ont pas à s'entendre sur la
possibilité de saisir à nouveau le tribunal arbitral 217
d'arbitrage soit pathologique.
, à moins que la convention
Le Conseil d'État est toutefois muet sur les possibilités de contester en cassation
sa décision (qu'elle soit favorable ou défavorable). Or, en application de la
jurisprudence d'Aillières de 1947 218
, aucun texte n'évacue la possibilité de former
un tel recours d'ordre public en la matière.
Enfin, l'arrêt ne dit mot sur l'acquiescement de la sentence par les parties. On
sait que le juge judiciaire considère que l'acquiescement à une sentence emporte
renonciation aux voies de recours 219
. Néanmoins dans l'affaire AREA, le Conseil
d'État avait jugé recevable le recours à l'encontre de la sentence effectuée par la
partie perdante qui avait pourtant déjà exécuté la sentence 220
. Cette question devra
être tranchée à l'avenir.
Deuxièmement, le Code de procédure civile dispose explicitement que les
recours « sont formés, instruits et jugés selon les règles relatives à la procédure en
matière contentieuse prévues aux articles 900 à 930‑1 » 221
.
. Il n'y a dès lors aucune
raison de raisonner différemment en matière administrative concernant le ministère
d'avocat obligatoire, l'obligation de se faire représenter par un avocat aux conseils
ou encore les conditions de forme et d'intérêt pour agir 222
213. Étant précisé, s'il en est besoin, que ce renvoi ne saisit absolument pas le tribunal
administratif d'une demande de désignation d'un arbitre ou d'une demande d'arbitrage, mais a pour
effet de saisir la juridiction administrative de droit commun des conclusions recevables : CE, 4 oct.
2017, Société Broadband Pacifique, n° 401154, inédit.
214. CE, 20 juill. 2021, Stés Tecnimont SpA et TCM FR SA, préc.
215. CE, Ass., 9 nov. 2016, Société Fosmax LNG, préc.
216. Art. 1493.
217. En ce sens pour les sentences internationales v. M. Laazouzi et S. Lemaire, « Arrêts Fosmax :
un guide incomplet du contrôle par les juridictions administratives des sentences internationales »,
Cah. Arb. 2016, p. 977.
218. CE, Ass., 7 févr. 1947, d'Aillières, préc.
219. Paris, 29 avr. 1982 ; Rev. arb. 1983, p. 342, obs. Bernard.
220. CE, Sect., 3 mars 1989, Société des autoroutes de la région Rhône‑Alpes, préc.
221. Art. 1495 du Code de procédure civile.
222. M. Le Corre, concl. sur CE, 20 juill. 2021, Stés Tecnimont SpA et TCM FR SA, p. 3
(disponibles sur ArianeWeb).
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