Manuel - Droit international pénal - 3e - 32

DROIT INTERNATIONAL PÉNAL
crimes « de droit international »34
sont des infractions d'abord promues
dans l'ordre juridique interétatique avant d'être le cas échéant transposées
en droit interne. Le droit international pénal comprend finalement
deux objets : l'édiction de normes prohibant certains comportements
considérés comme particulièrement graves et l'organisation de poursuites
contre ceux qui manquent à ces normes.
D. Droit international pénal et droit pénal
international
12. Faut-il faire une différence entre « droit pénal international35
»et
« droit international pénal » - même si les deux expressions sont souvent
employées de manière équivalente et correspondent à l'international criminal
law anglais ? Le droit pénal international est en réalité une branche
du droit national qui s'intéresse aux infractions présentant un caractère
d'extranéité, « un élément par lequel le droit interne entre en contact
avec un ordre juridique étranger »36
. Le droit international pénal procède,
lui, du droit international et renvoie à des infractions principalement définies
par des conventions interétatiques. Il s'agit, dans une version exigeante,
des infractions qui intéressent « par nature » la « communauté
internationale », et qui sont donc initialement définies par des instruments
internationaux. À partir de là, il faudrait réserver l'appellation de
droit international pénal au seul corpus qui concerne des faits qui troublent
l'« ordre public » international et qui constituent des infractions
contre le droit des gens37
. Aujourd'hui, cependant, on observe des points
de convergence. En somme, le droit pénal international « s'internationalise
» et le droit international pénal se « nationalise ». Le premier
comprend ainsi de plus en plus de conventions bilatérales ou multilatérales
qui viennent organiser l'entraide pénale ou proposer une définition
internationale d'infractions déjà connues en droit interne (piraterie,
fausse monnaie, corruption, etc.). À cet égard, la conclusion d'un nouveau
traité relatif à l'entraide judiciaire en matière de crimes de droit
international est assez significative (initiative « Mutual Legal Assistance »,
MLA)38
. Le second comprend des instruments qui ont tendance à établir
34. En ce sens, J. SALMON distingue les crimes de droit international (« [t]out fait individuel qualifié d'infraction
internationale pénale par le droit international coutumier ou conventionnel ») du concept plus flottant
de crimes internationaux (« [c]atégorie de violation du droit international accomplie par un sujet de droit
international qui se caractérise à la fois par l'importance de l'obligation violée et par la gravité de sa violation
»), in Dictionnaire de droit international public, Bruxelles, Bruylant, 2001, 1198 p., p. 287-289.
35. V. ici l'excellent précis de D. REBUT, Droit pénal international, op. cit.
36. F. BELLIVIER,M. EUDES et I. FOUCHARD, Droit des crimes internationaux,Paris,PUF, 2018, 500 p., p. 2 et
D.REBUT, Droit pénal international, op. cit., § 27.
37. R.MERLE et A. VITU, Traité de droit criminel, Paris, Cujas, tome I, 1967, 1048p., p. 196-197. V. aussi sur la
délimitation discutée des deux corpus, A.HUET et R. KOERING-JOULIN, Droit pénal international, Paris, PUF,
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éd., 2005, 507 p., p. 3-6 ou R. KOLB, Droit international pénal, Bruxelles, Bruylant, 2008, 488 p., p. 12.
38. Les États de poursuite ont souvent besoin du concours d'autres États pour la remise des suspects, l'accès
aux preuves et aux témoins. Il n'existait pourtant aucun instrument international gouvernant cette
nécessaire coopération en matière de crimes de droit international. L'initiative MLA entendait répondre
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