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Doctrine
ce que l'on appelle la bonne gouvernance » 18
en faisant de la
transparence, du partenariat, de la coopération et de l'accès
à l'information tout au long du processus de budgétisation
« des principes clés » 19
de la décision publique. Elle rapproche
les politiques locales des principaux intéressés, ce qui était, à
tout le moins, le but de la décentralisation.
Cependant, si l'instauration d'un budget sensible au genre
rapproche les politiques locales des hommes et des femmes
auxquelles elles s'appliquent, elle le fait différemment encore
de la mise en place d'un budget participatif. Si la budgétisation
sensible au genre peut redynamiser la démocratie locale
et la participation des individus au débat public, cela ne se
fait que de manière très indirecte. En effet, l'objectif premier
de la budgétisation sensible au genre est, pour faire simple,
de lutter contre une répartition inégalitaire des ressources et
des charges et non d'offrir aux citoyens la capacité de choisir
par eux-mêmes l'affectation d'une partie des ressources. Elle
n'a donc pas pour but de corriger les lacunes de la démocratie
représentative par l'adjonction d'un processus participatif,
mais de corriger des inégalités « cachées » dans l'affectation
des ressources notamment. En définitive, alors que la création
de budgets participatifs offre un surcroît de légitimité
procédurale aux collectivités, le déploiement d'une budgétisation
sensible au genre apporte une légitimité substantielle aux
décisions adoptées. Les collectivités territoriales souhaitant
réellement œuvrer en faveur de l'égalité entre les hommes
et les femmes tout en construisant des budgets participatifs
(Paris, Rennes, Lyon, Grenoble, etc.) seront parfois face à
un dilemme. Certaines décisions d'affectation des ressources
prises par les citoyens ne contribueront peut-être pas toujours
à favoriser l'égalité réelle : il faudra alors adopter une règle de
priorité.
Surtout, il s'avère que l'intégration d'une perspective de genre
dans le processus budgétaire est un élément qui, à moyen
terme, permettra de renforcer la croissance économique et
donc l'attractivité des collectivités l'ayant mis en place (intérêt
économique). En restant « aveugles » à l'égard du genre, les
décideurs ne tiennent pas compte des rôles, des capacités et
des responsabilités que la société attribue aux hommes et aux
femmes 20
. Le risque est que le budget qui ignore les inégalités
entre les hommes et les femmes ne puisse que reproduire
ou maintenir les relations de genre existantes. En ce sens, les
politiques publiques envisagées ou les subventions débloquées
au profit de telle ou telle activité ne pourront que difficilement
avoir des effets positifs sur la croissance économique
et le développement humain. La budgétisation sensible au
genre entraîne donc « des conséquences positives en termes
18 V. Zebadúa Yáñez, « Une introduction aux budgets avec une perspective de
genre », in C. Verschuur et F. Reysoo (dir.), Genre, pouvoirs et justice sociale, 2003,
L'Harmattan, Cahiers genre et développement, p. 216.
19 G. Hewitt et T. Mukhopadhyay, « Promoting Gender Equality through Public
Expenditure », in D. Budlender, D. Elson, G. Hewitt et T. Mukhopadhyay (dir.),
Gender Budgets Make Cents. Understanding Gender Responsive Budgets, 2002, The
Commonwealth Secretariat, p. 58.
20 R. Sharp et R. Broomhill, « Budgeting for equality : The Australian Experience »,
Feminist Economics 2002, vol 8(1), p. 25 à 47, spéc. p. 26.
21 V. Zebadúa Yáñez, « Une introduction aux budgets avec une perspective de
genre », in C. Verschuur et F. Reysoo (dir.), Genre, pouvoirs et justice sociale, 2003,
L'Harmattan, Cahiers genre et développement, p. 217.
22 V. Zebadúa Yáñez, « Une introduction aux budgets avec une perspective de
genre », in C. Verschuur et F. Reysoo (dir.), Genre, pouvoirs et justice sociale, 2003,
L'Harmattan, Cahiers genre et développement, p. 217.
23 V. Zebadúa Yáñez, « Une introduction aux budgets avec une perspective de
genre », in C. Verschuur et F. Reysoo (dir.), Genre, pouvoirs et justice sociale, 2003,
L'Harmattan, Cahiers genre et développement, p. 217.
24 TUE, art. 3, § 1 : « L'Union a pour but de promouvoir la paix, ses valeurs et le
bien-être de ses peuples ».
25 TFUE, art. 8 : « L'Union développe avec les pays de son voisinage des relations
privilégiées, en vue d'établir un espace de prospérité et de bon voisinage, fondé sur
les valeurs de l'Union et caractérisé par des relations étroites et pacifiques reposant
sur la coopération ».
26 G. Perrier, « Genre et application du concept de gender mainstreaming. Étude de
cas dans la mise en œuvre du fonds social européen en Île-de-France et à Berlin
depuis 2000 », Politique européenne 2006/3, n° 20, p. 70.
27 G. Perrier, « Genre et application du concept de gender mainstreaming. Étude de
cas dans la mise en œuvre du fonds social européen en Île-de-France et à Berlin
depuis 2000 », Politique européenne 2006/3, n° 20, p. 70.
d'efficience et d'efficacité » 21
. Aucune politique économique
ne pourra pleinement atteindre ses objectifs « si l'on ne tient
pas compte des effets spécifiques au genre, car la politique ne
sera pas dûment ciblée et de ce fait ne sera pas totalement efficace
» 22
. De même, l'identification précise des bénéficiaires
des dépenses ainsi que le fait de concevoir des politiques et
d'y affecter les ressources correspondantes « permettraient de
définir des budgets à l'orientation plus claire, et plus efficace
dans la production de biens et services publics » 23
.
Cependant, malgré l'existence d'avantages notables pour les
collectivités à intégrer une perspective de genre dans leur
processus budgétaire, doivent-elles s'y atteler ? Ont-elles
aujourd'hui l'obligation juridique d'intégrer la question de
l'égalité de genre au sein de leur processus budgétaire ? Un
rapide tour d'horizon des règles juridiques françaises et européennes
en vigueur montre que le déploiement d'une budgétisation
sensible au genre n'est en rien une obligation très
contraignante pour les collectivités territoriales.
L'article 23 de la Charte des droits fondamentaux dispose que
« l'égalité entre les hommes et les femmes doit être assurée
dans tous les domaines, y compris en matière d'emploi, de
travail et de rémunération ». Consacrée comme une valeur de
l'Union à l'article 2 du traité sur l'Union européenne (TUE),
la promotion de l'égalité en est aussi un objectif 24
. En sus,
cette promotion de l'égalité au sein des politiques publiques
de l'Union est renforcée par l'existence de l'article 8 du traité
sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) 25
, qui
peut être lu comme une clause transversale facilitant la mise
en place du gender mainstreaming. On peut bien entendu y
voir une obligation, mais il s'agit là d'une « obligation théorique
» 26
de prise en compte des problématiques de genre ;
si cela peut constituer un facteur de légitimation de l'action
des collectivités infra-étatiques, il n'y a nullement d'obligation
juridique concrète et précise. C'est plutôt « une sorte de
tremplin » 27
dont les collectivités locales peuvent ou non se
saisir. Partant, l'Union européenne apporte aux collectivités
locales « un soutien certes nécessaire, mais insuffisant pour
impulser un réel changement » en ce que l'on peut constater
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