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Doctrine
s'est arrogé du pouvoir de dissoudre le Parlement 50
devait, comme son homologue malien en mars 1997 51
, là où elle
, proposer
au président de la République de le faire.
Il n'est plus évident de ce qui précède de dire, de manière
péremptoire, qui détient le pouvoir constituant dans un État.
La théorie constitutionnelle classique semble être prise en
défaut tant sur les détenteurs de ce pouvoir que sur ses propriétés,
elles aussi sujettes à des transformations.
II. Les propriétés du pouvoir
constituant : la logique de l'évolution
inversée
Il ne s'agit nullement de les énumérer, mais d'insister sur celles
qui subissent des transformations. Il faut partir de la synthèse
de Kemal Gözler sur les propriétés du pouvoir constituant
telles qu'elles résultent des auteurs positivistes en insistant sur
la dialectique limitation et illimitation 52
.
Il est constaté une limitation du pouvoir constituant originaire
(A), et inversement une certaine illimitation du pouvoir
constituant dérivé (B).
A. Les dérogations à l'illimitation du pouvoir
constituant originaire
Le pouvoir constituant originaire aujourd'hui s'exerce dans
l'hypothèse du vide constitutionnel 53
. Une partie de la doctrine
(jusnaturaliste) estime malgré ce vide qu'il serait limité
par un écheveau ramifié de profondes racines invisibles sous
le tronc et le feuillage visibles des règles posées 54
dans une importante contribution 55
, est revenu sur la ques.
Au-delà des arguments
. Alain Viala,
tion en réaffirmant ce qu'il appelle « l'impossible limitation
du pouvoir constituant originaire » 56
théoriques, l'expérience des processus constituants dans le
monde permet d'envisager la limitation du pouvoir constituant
originaire par une juridiction (1) que par un organe
politique (2).
50 V° Décision de la Cour constitutionnelle du Gabon, 30 avr. 2018, n° 022/CC,
Premier Ministre.
51 A. Bourgi, « L'évolution du constitutionnalisme en Afrique : du formalisme à
l'effectivité », RFDC 2002, p. 721-748 ; v. aussi C. Keutcha, « Droit constitutionnel
et conflits politiques dans les États francophones d'Afrique noire », RFDC
2005, p. 451-491.
52 K. Gözler, Le pouvoir de révision constitutionnelle, thèse, Dmitri Georges Lavroff
(dir.), 1995, Université de Montesquieu-Bordeaux IV, Faculté de droit, des
sciences sociales et politiques, p. 774.
53 Bernard Chantebout estime que cela apparaît dans trois circonstances : lorsque sur
un territoire donné il se crée un État à la suite d'une guerre avec occupation du sol
national ou tout simplement d'une décision de bâtir autre chose ; lorsque plusieurs
États décident de fédérer ; il y a enfin apparition d'un État nouveau lorsque le
régime politique s'effondre complètement à la suite d'une révolution, un coup de
force ou un consensus, Droit constitutionnel, 2015, Paris, Sirey, p. 28-29.
54 H. Taine, Notes sur l'Angleterre, 1876 ; A. Le Divellec et M. De Villiers,
Dictionnaire de droit constitutionnel, 13e
éd., 2022, Paris, Sirey, p. 274.
55 A. Viala, « La limitation du pouvoir constituant : la vision d'un constitutionnaliste
», Civitas Europa 2014, p. 81-91.
56 A. Viala, « La limitation du pouvoir constituant : la vision d'un constitutionnaliste
», Civitas Europa 2014/1, n° 32, p. 81. Sur le point de vue contraire et
suivant une perspective internationaliste, v. G. Cahin, « Limitation du pouvoir
constituant : le point de vue de l'internationaliste », Civitas Europa 2014, p. 55
à 79.
57 Il existe dans le contexte africain, plusieurs dispositions quasi-conventionnelles
et constitutionnelles interdisant les coups de force (v. par ex. Acte constitutif de
l'Union africaine, art. 30).
58 G. Cahin, « Limitation du pouvoir constituant : le point de vue de l'internationaliste
», Civitas Europa 2014/1, op. cit., p. 65 et s.
1. La limitation juridictionnelle du pouvoir
constituant originaire
La doctrine classique défend fermement l'idée d'une illimitation
du pouvoir constituant originaire sur le plan juridique,
car, estime-t-elle, pour que le pouvoir constituant originaire
soit limité, il faut qu'une Constitution en vigueur puisse
interdire sa déconstitutionnalisation par le pouvoir constituant
originaire, or, les Constitutions n'interdisent pas leur
révision révolutionnaire 57
. Même si une Constitution comporte
une telle disposition, elle n'aurait aucune valeur juridique,
les révolutions étant des phénomènes ne connaissant
pas de restrictions juridiques.
Cette ligne de pensée témoigne d'une étroitesse d'esprit imposée
par la théorie positiviste et normativiste, pourtant incapable
de discourir avec crédibilité sur le pouvoir constituant
originaire, à partir du moment où elle la considère comme un
fait non juridique 58
. Elle ne prend pas en compte, dans une
certaine mesure, la « complexité » des processus constituants
au-delà des Pyrénées. Ainsi qu'il s'agisse de l'hypothèse du
vide existant ou du vide créé, il est possible d'envisager des
limitations purement juridiques au pouvoir constituant originaire,
à condition d'admette la théorie que nous entendons
énoncer ici : théorie du « double palier », que l'on appellera
autrement « théorie du séquençage du pouvoir constituant
originaire » ou encore « théorie du dédoublement différencié
et hiérarchisé du pouvoir constituant originaire ».
Qu'est-ce qu'elle signifie ? Dans un même processus constituant,
le pouvoir constituant originaire peut résider en des
mains de plusieurs autorités ou acteurs ou organes intervenant
de manière successive ; le pouvoir constituant originaire
ne se manifeste pas toujours par une seule expression, mais
est l'objet d'un séquencement ou d'une expression en palier
ou en degrés ; ces expressions séquencées sont inégales : la
seconde devant être conforme à la première ; que cette supériorité
peut donner lieu à un contrôle, soit par une juridiction
ayant subsisté au renversement de l'ordre constitutionnel (ce
qui suppose que l'on peut, au-delà de l'enseignement classique,
envisager l'hypothèse d'un « vide juridique partiel »)
ou spécialement instituée par les autorités constituantes pour
certifier leur œuvre, soit par une autorité internationale ou
extérieure devant certifier l'œuvre constituante.
La certification par un organe constituant différenciée
national (le cas sud-africain). Le Multi-party Negotiating
Process, qui fut une véritable « conférence constituante »,
avait, dans le contexte sud-africain, rédigé et adopté les
34 « principes fondamentaux » devant guider « l'assemblée
constituante », qui reçut mission de rédiger la « Constitution
définitive ». Parmi ces principes, il était par exemple exigé que
la « Constitution définitive » intègre la Déclaration des droits
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