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Doctrine
l'article L. 3 16
éthique » 17
, ce nouvel article confirme « une évolution
, puisque le développement durable est placé au
plus près des principes généraux. L'obligation d'adopter un
schéma de promotion des achats socialement et écologiquement
responsables, imposée lorsque le total annuel des achats
dépasse un seuil 18
, conduit à déterminer « les objectifs de
politique d'achat de biens et de services comportant (...) des
éléments à caractère écologique, visant notamment à réduire
les émissions de GES et la consommation d'énergie, d'eau
et de matériaux, ainsi que les modalités de mise en œuvre
et de suivi annuel de ces objectifs » 19
. La loi Climat et résilience
a prévu l'ajout dès 2023 d'indicateurs précis sur le taux
réel d'achats publics relevant de la catégorie de l'achat écologiquement
responsable. Le plan national pour des achats
durables portant sur les années 2022-2025 vise notamment
à obtenir une considération environnementale dans 100 %
des contrats de la commande publique 20
. Pour atteindre ces
objectifs, l'ordre public écologique, qui s'est déjà manifesté
comme une limite de la liberté contractuelle 21
, est mobilisé
en droit de la commande publique comme un « instrument
de prédétermination contractuelle » 22
. Il fonde des règles
impératives qui limitent la libre définition du besoin justifiant
le recours à un contrat de la commande publique (I),
la libre détermination des clauses du contrat 23
(II) et le libre
choix du cocontractant (III).
I. L'ordre public écologique limitant la
libre définition du besoin
« L'insertion de clauses environnementales doit se préparer
dès la définition des besoins » 24
. Le Code des marchés
publics (CMP) de 2006 a imposé au pouvoir adjudicateur de
prendre en compte le développement durable dès l'étape de
la définition de son besoin (art. 5), mais cette obligation de
« prendre en compte » le « développement durable » a alors
été présentée comme celle de s'interroger sur la possibilité
d'intégrer les exigences de progrès social et de protection de
16 E. Muller, « Principes de la commande publique : un bref regard outre-Rhin »,
Contrats-Marchés publ. 2022, repère 3.
17 A. Van Lang, « Le droit de la transition écologique en devenir », AJDA 2022,
p. 133.
18 L. n° 2014-856, 31 juill. 2014, art. 13, relative à l'économie sociale et solidaire,
mod. par L. n° 2015-992, 17 août 2015, art. 76, relative à la transition énergétique
pour la croissance verte ; le seuil d'abord fixé à 100 millions d'euros HT a été
divisé par deux (D. n° 2022-767, 2 mai 2022). La loi n° 2023-973 du 23 octobre
2023, relative à l'industrie verte, a étendu l'obligation d'élaborer un SPASER à
tous les acheteurs soumis au CCP, dont l'État.
19 « Ce schéma contribue également à la promotion de la durabilité des produits, de
la sobriété numérique et d'une économie circulaire » (CPP, art. L. 2111-3, mod.
par L. n° 2023-973, 23 oct. 2023).
20 L'objectif de 30 % fixé par le précédent PNAD n'avait pas été atteint, puisque
seuls 15,8 % des marchés notifiés en avaient une.
21 M. Hautereau-Boutonnet (dir.), Le contrat et l'environnement, 2014, PUAM.
22 À l'instar de l'ordre public économique (S. Hourson, « L'ordre public économique
en matière contractuelle », in A. Lajet-Annamayer (dir.), L'ordre public économique,
2018, LGDJ, p. 281, EAN : 9782275059013).
23 Comme on peut s'y attendre au regard de la notion d'ordre public dans les
contrats administratifs (J. Martin, « La notion d'ordre public dans les contrats
administratifs », RDC mars 2020, n° RDC116u1).
24 L. Henriques et L. Lequilliec, Initiation à l'achat public performant et durable,
2021, Le Moniteur, p. 85.
l'environnement, donc comme une obligation de moyen 25
.
Le CCP a étendu cette obligation aux contrats de concession
en prévoyant que « la nature et l'étendue des besoins
à satisfaire sont déterminées avec précision avant le lancement
de la consultation en prenant en compte des objectifs
de développement durable dans leurs dimensions économique,
sociale et environnementale » (CCP, art. L. 2111-1
- CCP, art. L. 3111-1). En tout cas, « la notion même de
besoin évolue à partir du moment où il est exigé de l'acheteur
ou du concédant qu'il intègre les aspects sociétaux » 26
. Par
exemple, un ouvrage doit être envisagé à toutes les étapes de
son cycle de vie, les besoins en matière d'exploitation et de
gestion étant anticipés dès la conception de l'ouvrage. Certes,
la référence au développement durable exige une conciliation
entre ses différentes dimensions. Néanmoins, « l'administration
ne pourra s'extraire de son obligation en ce qu'elle peut
toujours intégrer une norme technique ou un label environnemental
lorsqu'elle définit son besoin » 27
. Pour le professeur
Fonbaustier, « eu égard aux exigences constitutionnelles du
développement durable et de protection de l'environnement,
le pouvoir adjudicateur ne devrait plus avoir le choix » 28
. Or,
alors que, depuis le CMP de 2006, les spécifications techniques
peuvent inclure des caractéristiques environnementales
(art. 6) 29
tion diesel dans un marché de transport collectif 30
, par exemple exclure les véhicules à motorisa,
la loi du
22 août 2021 a adopté une formulation plus impérative tout
en dissolvant la protection de l'environnement dans le développement
durable : le 22 août 2026 au plus tard, les articles
L. 2111-2 et L. 3111-2 du CCP disposeront que les spécifications
techniques « prennent en compte des objectifs de développement
durable dans leurs dimensions économique, sociale et
environnementale », ce qui « concrétise l'obligation d'introduire
des considérations environnementales dès le stade de la
définition du besoin » 31
une obligation de résultat 32
. L'obligation de moyen est devenue
.
Une obligation d'achat circulaire a été imposée. La transition
vers l'économie circulaire, affirmée par la loi n° 2020105
du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage
et à l'économie circulaire, « vise à atteindre une empreinte
25 Rép. min. n° 102882 : JOAN, 28 nov. 2006 ; H. Delzangles, « Commande
publique et environnement, jusqu'où peut-on aller ? », RJE 2015, p. 13.
26 L. Richer, « L'efficacité de la commande publique. Synthèse », JCP A 2022, 2323.
27 F. Akoka, Contrats de la commande publique et environnement, 2020, PUAM,
préf. F. Lichère, p. 51.
28 L. Fonbaustier, « La place du critère environnemental dans le droit de la commande
publique : une exemplarité en trompe-l'œil ? », in V. Coq (dir.), L'éthique
en droit des marchés publics, 2020, LexisNexis, p. 27.
29 V. aussi PE et Cons. UE, dir. n° 2014/23, art. 36 - PE et Cons. UE, dir.
n° 2014/24, art. 42. Des labels ou certifications peuvent être mentionnés à condition
d'admettre aussi un équivalent pour ne pas causer de restrictions de concurrence
(CJUE, 10 mai 2012, n° C-368/10 : AJDA 2012, p. 982, obs. R. Grand).
30 TA Paris, 21 janv. 2016, n° 1521405, Sté des transports Andrieux.
31 Ministère de l'Économie et des Finances, DAJ, Les mesures commande publique
de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique
et renforcement de la résilience face à ses effets (dite loi Climat et résilience) :
https://lext.so/l9MWCO.
32 H. Hoepffner, « Les objectifs horizontaux de la commande publique, des obstacles
à l'efficacité ? », JCP A 2022, 2320 ; H. Delzangles, « Vers une commande
publique et des acheteurs écologiquement responsables ? », Contrats-Marchés
publ. 2023, étude 1.
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